"Ce n’est pas normal qu’on fasse des économies sur notre dos" : le déremboursement possible des cures thermales effraie le secteur

Les cures thermales vont-elles être déremboursées ? Avec les 5,5 milliards d'euros d'économies à trouver dans le budget de la Sécurité sociale, la question a été officiellement posée par les autorités de santé cet été. À Dax, curistes, professionnels et élus font part de leur préoccupation.

Article rédigé par franceinfo
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L’entrée des thermes Regina à Dax (Solenne Le Hen / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
L’entrée des thermes Regina à Dax (Solenne Le Hen / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Moins rembourser les cures thermales prescrites par les médecins : de bon matin, en ce mois de septembre, la rumeur inquiète les curistes de Dax, dans les Landes. "En tant que retraités, on a travaillé toute notre vie, je ne vois pas pourquoi on commencerait à faire des économies sur notre dos", réagit Patrick, un des curistes. Une cure de 18 jours prescrite par un médecin contre l'arthrose, les maladies de peau ou encore les problèmes de circulation du sang, coûte entre 700 et 1 000 euros. Elles sont remboursées à 100% par la Sécurité sociale, si vous êtes en Affection longue durée, à 65% pour les autres, puis les mutuelles, souvent, complètent. Il reste néanmoins pour tout le monde un complément à payer généralement d'une centaine d'euros, ainsi que, pour une grande partie des curistes, le transport, le logement et la restauration.

Les curistes continueraient-ils de venir si ces séjours étaient moins remboursés ?  "Tout dépend de la différence,  explique l'un d'eux. Si je peux ou pas me le permettre parce que je ne suis qu'un ouvrier à la retraite". Une autre affirme qu'elle continuera à venir, mais "il y a des choses que l'on fera moins, au lieu d'aller au restaurant une fois dans la cure, on n'ira pas. On fera des économies autres part."

Même si ces curistes sont motivés, le risque que d'autres ne reviennent plus est bien réel, craint Maxime Vilgrain, président du groupe Arenadour. Les six établissements thermaux du groupe à Dax, emploient 400 personnes. "Il est fréquent pour nous d'avoir des curistes qui vont régler le complément tarifaire en plusieurs fois, pour qui c'est difficile" de tout payer d'un coup, explique-t-il.

"Il y aurait un effet très négatif pour nos territoires."

Julien Dubois, président du Grand Dax, maire de Dax

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Toute l'économie locale pâtirait d'un remboursement moins conséquent des cures, estime Julien Dubois, maire de Dax et président de l'Agglomération du Grand Dax. "Nos stations thermales, nos villes, nos agglomérations, se sont construites autour de cette activité thermale,"assure-t-il. Si elle venait à diminuer, "il y aurait des répercussions négatives pour le tissu économique, les curistes quand ils viennent." À

En 2024, la ville a accueilli 45 000 curistes avec des retombées de plus de 100 millions d'euros pour l'économie locale.

Un remboursement qui coûte très cher

Selon la Cour de compte, ces remboursements coûtent 250 millions d'euros par an à l'Assurance-maladie et "le service médical" des cures thermales n'a pas été démontré. Pourtant, les curistes jurent qu'ils ressentent les bienfaits sur leur santé. "Cela ne guérit pas, mais ça soulage énormément", dit l'un d'eux. "C'est bénéfique par rapport à l'arthrose surtout, c'est un acte médical", estime un autre curiste. "Si on vient en cure, ce n'est pas pour se payer des vacances, c'est pour se faire du bien", ajoute-t-il. Une autre explique que depuis qu'elle fait des cures, elle n'a plus de rééducation, va une fois par an chez le médecin. "Je pense que la Sécurité sociale s'y retrouve vraiment."

Il n'y a pas de consensus scientifique sur le sujet. La Haute autorité de santé, l'organe scientifique indépendant qui décrète ce qui peut être remboursé ou non par la Sécurité sociale, n'a jamais été saisie sur la question.

Maxime Vilgrain, président du groupe Arenadour. (Solenne Le Hen / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Maxime Vilgrain, président du groupe Arenadour. (Solenne Le Hen / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le secteur thermal s'est, lui, organisé et mène depuis 20 ans ses propres recherches : "60 études ont été réalisées, plus d'une vingtaine d'entre elles ont été publiées, elles sont réalisées avec la plus grande rigueur méthodologique et démontrent les bienfaits de la cure thermale sur l'amélioration de la qualité de vie des curistes, la baisse de volume de consultations médicales", explique Maxime Vilgrain, président du groupe Arenadour.

La méthodologie de ces études est remise en cause, selon le collectif No FakeMed, qui lutte depuis plusieurs années contre la désinformation en santé. Les études ont comparé des personnes qui allaient en cure à des personnes qui ne faisaient rien, affirme le président du collectif. "À partir du moment où vous faites quelque chose, vous allez avoir un impact, même minime, note le docteur Pierre de Bremond D'Ars, président du collectif No FakeMed. C'est aux médecins curistes d'apporter une preuve solide de l'efficacité de la cure comparée à une prise en charge sur une année par un kinésithérapeute".  "Là, ils pourront dire que ce ne sont pas des vacances payées par la Sécurité sociale."

La seule chose sur laquelle tout le monde est d'accord, c'est que l'eau thermale n'est pas une eau "magique". Il faut prendre la cure comme un ensemble de soins réalisés autour de cette eau.

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