"On vit dans une société violente et il faut être en mesure de se défendre" : qui sont ces jeunes identitaires qui multiplient les actions ?
Depuis le meurtre de Thomas dans la Drôme il y a un mois, des militants d'ultradroite se sont mobilisés. D'où viennent ces jeunes ? Quelles sont leurs motivations, leurs modes d'actions ?
Ils ont émergé dans l’actualité ces dernières semaines pour défendre une France sans immigration. Des groupes de jeunes descendent dans la rue avec l’envie d’en découdre, parfois dans les quartiers sensibles, depuis le meurtre de Thomas dans un bal à Crépol dans la Drôme. Certains de ces jeunes identitaires vivent à Lyon, une ville réputée pour être un bastion de l’extrême droite.
Dans la vieille ville, il existe un bar identitaire, La Traboule, dont la façade est recouverte de tags anti-fascistes. L’intérieur est sombre, la salle est voûtée, en pierre et décorée de quelques drapeaux lyonnais. C’est l’ancien QG de Génération Identitaire. Dissoute en 2021, Les Remparts ont pris le relais. Antoine, 22 ans, l’un des co-fondateurs, revendique une cinquantaine de membres. "On a le jeune issu de quartiers un peu sensibles de Lyon, décrit-il. Et qui se dit : 'Je ne me reconnais pas dans les personnes avec lesquelles j'ai vécues, je veux couper avec ça et renouer avec mon identité'. On a des bourgeois catholiques qui sont de familles plutôt conservatrices mais pas forcément trop politisées. Et on a aussi les enfants de familles déjà politisées à l'origine, et qui décident de s'engager".
S'engager signifie participer aux actions mais aussi aux sorties au musée, aux conférences avec des intellectuels ou politiques d’extrême droite. Les groupes identitaires comme Les Remparts fonctionnent en collectif et proposent quasiment systématiquement des cours de boxe. "Je m'entraîne trois fois par semaine à la boxe thaï, confie Antoine. On vit dans une société ultra violente et il faut être en mesure de se défendre." Il poursuit : "C'est aussi qu'on ne se reconnaît pas dans le Netflix, porno, grande consommation, dans ce qu'on veut que les jeunes deviennent. On veut les féminiser, on veut les faire redevenir vraiment à l'état de larve. Tout ce qui est obésité, etc. c'est une vraie conséquence de la société dans laquelle on vit. Donc c'est pour apprendre à se défendre et aussi pour avoir une activité physique, s'entretenir et être fort". Il s'agit d'être fort et viril, le milieu est majoritairement masculin et l’esthétique, politique.
Pour eux, l'insécurité vient de l'immigration
L'immigration est le thème de prédilection de ces jeunes identitaires, car elle est responsable, selon eux, de l’insécurité en France. Le lien n’est pas établi par les études mais il ne fait, pour eux, aucun doute. Ils font le rapprochement entre délinquance, terrorisme, immigration et islam. "Depuis 2015, il y a 290 Français qui ont été assassinés par des islamistes dans ce pays, affirme Édouard, 26 ans et membre du groupe parisien Les Natifs. Évidemment qu'on est obligé de prendre en considération ces phénomènes. Il y a eu un attentat pont de Bir-Hakeim. Il y a évidemment l'affaire Thomas à Crépol... Tout ça montre bien qu'il y a un vrai problème avec tout ça dans ce pays".
"On considère que l'islam est incompatible avec l'Europe et la nation française."
Edouard, du groupe Les Natifsà franceinfo
"Ce qu'on veut, c'est vivre chez nous, sur notre terre, selon notre identité", conclut-il. Pour ces identitaires, il existe une autre menace qui réside en la disparition de la culture française et de l’héritage catholique de la France.
Ils relaient tous ces messages sur les réseaux sociaux où ils sont très actifs. Et dans la rue, ils multiplient les actions coups de poing avec des banderoles en manifestation, des rassemblements devant des camps de réfugiés. C’est ce qu’ils appellent de "l’agitation propagande", c'est l'idée de diffuser leurs idées et leurs expressions dans le débat public, comme "racisme anti-blanc" et "grand remplacement".
Cette stratégie est donc plus intellectuelle et loin de l’image sulfureuse de l’identitaire violent, assure Antoine, le co-fondateur des Remparts : "On a fait cette révolution culturelle qui montre que nos idées sont normales et donc, on n'a pas à être à la marge. C'est d'ailleurs pour ça que nos actions se font toujours à visage découvert. On travaille avec un bar et une salle de boxe qui ont pignon sur rue dans le Vieux Lyon. S'il y avait des actions violentes, ces locaux, qui existent depuis 15 ans et 7 ans, seraient déjà fermés".
Malgré tout, ces jeunes identitaires se sont fait remarquer ces dernières semaines pour des rassemblements non autorisés, des agressions physiques, des intimidations à domicile. Les Remparts, Les Natifs insistent et ne veulent pas être associés à cela. "C'est vraiment l'héritage de Génération identitaire, ce discours-là, de normalisation d'un militantisme d'extrême droite, analyse Marion Jacquet-Vaillant, chercheuse à l’université Panthéon Assas et spécialiste de ces mouvements identitaires. 'On est des militants d'extrême droite, on défend nos idées et on ne va pas les euphémiser. Pour autant, on n'est pas des militants violents'. Et c'était aussi d'un point de vue instrumental, avec la peur d'être dissous. Ils se disaient : 'Si on est violents, on va être dissous et on a besoin de notre instrument politique donc on ne peut pas prendre ce risque'". Elle précise qu'il existe "d'autres groupes qui ont un rapport à la violence beaucoup plus ouvert et eux, revendiquent un usage politique de la violence comme un moyen légitime d'expression politique". Environ 3 000 personnes de cette mouvance radicale violente inquiètent les autorités. L’extrême droite représente la deuxième menace terroriste en France après l’islamisme.
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