Reportage
"Avec l'arc, on vise le cœur et les poumons" : pour réguler des populations d'animaux en zone périurbaine, l'ONF fait appel aux chasseurs à l'arc

La période de la chasse s'ouvre peu à peu en France et va durer jusqu'à fin février, voire fin mars pour certaines espèces. Quand on pense chasseur, on pense fusil. Mais ils sont aussi entre 15 et 20 000 à utiliser des arcs et des flèches. Franceinfo a suivi l'un d'eux dans la forêt domaniale de Versailles.

Article rédigé par Boris Loumagne
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
La chasse à l'arc permet de réguler les animaux dans les zones périurbaines, là où le tir à la carabine est dangereux selon  Frédéric Caujolle. (BORIS LOUMAGNE / FRANCEINFO / RADIOFRANCE)
La chasse à l'arc permet de réguler les animaux dans les zones périurbaines, là où le tir à la carabine est dangereux selon Frédéric Caujolle. (BORIS LOUMAGNE / FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

En cette période d'ouverture de la chasse, de premières détonations ont pu être entendues. Mais il existe certains chasseurs qui préfèrent rester le plus discrets possible : les archers. Ils sont entre 15 et 20 000 aujourd'hui en France. Une pratique qui tend à se démocratiser, notamment en zone périurbaine où l'Organisation nationale des forêts (l'ONF) fait appel à eux pour réguler les populations de certaines espèces en toute sécurité.

Frédéric Caujolle vient de sortir de son bureau dans les Yvelines. Il est 18 heures. Mais au lieu de rentrer chez lui, il troque son costume de ville pour une tenue de camouflage. Puis, il s'enfonce dans une petite forêt. "Ce qui est assez fabuleux, c'est qu'on se dit : 'Voilà, je fais moins de dix minutes de voiture et je vais à la chasse.' C'est un vrai luxe. C'est le propre de la chasse périurbaine", souligne-t-il.

À moins de huit kilomètres de Paris, il chasse, "uniquement à l'affût", les sangliers et les chevreuils. "L'affût, ça consiste à être immobile dans un endroit fixe et à attendre que les animaux passent à portée de nos flèches", explique Frédéric Caujolle. Frédéric sort son arc en bois et commence son échauffement en tirant des flèches dans un talus, pour se mettre "en condition". Il est prêt. Maintenant, il faut choisir un arbre sur lequel le chasseur va se percher à l'aide d'une petite plateforme qu'il installe à 2,50 mètres du sol. Il explique que "plus on est haut, plus le tir est fichant, c'est-à-dire que, si on loupe ou si ça ricoche un peu, ça va se planter très vite dans le sol. Pour la sécurité, on monte".

L'animal meurt en quelques secondes

Une fois installé, il n'y a plus qu'à attendre qu'un animal passe très près, à 15 mètres de portée, pas plus. "Avec l'arc, on vise le cœur et les poumons. D'où l'idée de vraiment toujours assurer ses tirs. Donc quand on lance la flèche, on doit être sûr d'atteindre le cœur et les poumons. Et là, l'animal meurt en quelques secondes, détaille Frédéric. On tire très près et c'est ce qui fait que l'ONF fait appel à nous. Dans les secteurs comme ici, quand ils font appel aux archers, ils savent qu'on ne va pas faire n'importe quoi. Ils savent qu'ils ont une petite équipe qui va tirer très près." Et donc éviter tout risque d'accident.

Voilà pourquoi, dans cette forêt périurbaine, l'Office national des forêts, pour limiter les populations de sangliers ou de chevreuils, a recours aux chasseurs à l'arc et non aux chasseurs traditionnels avec des fusils. "Là, dans le cas présent, on ne pourrait pas avoir une carabine. Ici, on entend la route, on entend le tram, on va peut-être voir des gens passer. Ce serait beaucoup trop risqué", juge Frédéric.

Une chasse silencieuse pour les riverains

Autre avantage, la chasse à l'arc est silencieuse. Elle ne dérange pas les riverains. Elle les aide même à garder leur pelouse intacte face aux attaques de sangliers. Elle limite également le nombre d'accidents de la route. "Plusieurs fois par an, il y a des accidents avec les chevreuils et les sangliers. Donc on est là aussi pour ça", rappelle Frédéric.

Mais aujourd'hui, l'archer va repartir bredouille. Pas d'animal en vue. "Ça ne marche pas à tous les coups. C'est ce qui fait le sel et l'intérêt de la chose", commente-t-il. À la chasse à l'arc, on est régulièrement bredouilles pour une raison simple, d'après Frédéric : l'animal et l'homme sont sur un pied d'égalité. "C'est plus équitable, c'est certain, assure-t-il. Quand on tire sur un animal à dix mètres, on peut se dire qu'on a vaincu ses ruses ou une partie de ses ruses. Il n'y a pas de chien, on est tout seul. On n'a pas d'aides, entre guillemets. Donc on est dans l'essence de la chasse". Pour ceux qui aimerait s'initier, la Fédération propose régulièrement des journées de formation au tir à l'arc.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.