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Reportage
"On ne nous donne ni eau, ni nourriture !" : à Mayotte, dans le bidonville de Majikavu, des sinistrés laissés à l'abandon depuis le cyclone
Six jours après le passage du cyclone Chido, franceinfo s'est rendu dans cette zone sinistrée. Les habitants l'assurent : ils sont livrés à eux-mêmes et s’organisent pour survivre.
Ni eau, ni nourriture, des conditions d'hygiène déplorables… C'est désormais le quotidien des habitants des bidonvilles à Mayotte depuis que le cyclone Chido a ravagé l'archipel. franceinfo s'est rendu dans le bidonville de Majikavu, à la rencontre de sinistrés qui oscillent entre colère et désespoir.
Ces bidonvilles sont à flanc de colline à Mayotte. Il faut donc grimper à travers les ruelles boueuses pour s'y rendre. Plus on monte, plus les destructions sont importantes, avec des odeurs pestilentielles, des poubelles partout et une chaleur étouffante. Au milieu des bâtiments en ruine, comme un symbole, une petite école a tenu bon.
Odeurs pestilentielles, enfants malades...
L'établissement sert de refuge à plusieurs dizaines de familles. Dans la classe, les chaises sont empilées dans un coin et femmes et enfants dorment à même le sol. En voyant notre micro, une mère de famille d'origine comorienne laisse éclater sa colère. "On ne nous donne ni eau, ni nourriture !", nous crie-t-elle : "Personne n'est venu nous aider !"
"Il y a des enfants qui sont malades aussi à cause de l'eau que l'on boit", complète Rashma, une adolescente également hébergée dans l'école. L'urgence, selon elle, ce sont bien les enfants : "On a vraiment pitié d'eux parce qu'ils sont tout petits et ils tombent malades. Il y a même des bébés. On voit que leur ventre gonfle, ils vomissent, ont la diarrhée, on a vraiment peur..." Près d'une semaine après le cyclone, il n'y a toujours pas eu de distribution d'eau dans ce bidonville.
Les sinistrés des bidonvilles peuvent toutefois compter sur quelques associations de quartier, comme cette association musulmane qui avait fait des provisions avant la catastrophe. Au milieu des ruines, une marmite est installée sur un feu de bois : "Ici, ils sont en train de nettoyer les ailes de poulet, ils vont ensuite préparer la sauce et deux sacs de riz de 20 kilos", décrit un bénévole. Mais pas de quoi nourrir tout le quartier.
Ce qu'il faudrait, c'est que l'aide humanitaire arrive jusqu'aux habitants, martèle Habibi Lassuf, une figure de Majikavu. Il réclame un déploiement massif des militaires.
"L'armée, c'est ce que l'on a de mieux. Avec l'armée, en 24 heures aujourd'hui c'est réglé. En tout cas, la logistique de distribution est en place."
Habibi Lassufà franceinfo
"On attend quoi pour pouvoir véritablement amener toutes ces denrées auprès de la population ? Parce que, malheureusement, il y a une autre catastrophe qui va arriver si on ne fait rien. Les gens quand ils ont faim, ils n'ont plus de règles", prévient-il.
Aucune denrée de l'aide humanitaire
En attendant des renforts militaires supplémentaires, une interrogation subsiste : pourquoi l'eau et la nourriture ne sont pas encore disponibles ? "C'est la véritable question que l'on se pose depuis un bon moment", soutient Abdou Mrendada, le directeur de cabinet de la mairie de Koungou, qui, avec 50 000 habitants, est la deuxième plus grande ville de Mayotte. "On a essayé de contacter les services, les autorités, pour en savoir un peu plus. On a compris que des choses ont été réceptionnées sur la chaîne logistique. C'est en cours d'acheminement. Mais concrètement, comment cela va se faire, on en a aucune idée...", glisse-t-il. Interrogée sur ce que la mairie de cette grande ville a reçu de ce fret humanitaire jusqu'ici, la réponse est sans appel : "Pour l'heure, on n'a rien reçu".
Plusieurs pistes pour expliquer ce retard d'acheminement : un nombre de bateaux insuffisants pour acheminer le fret entre Petite Terre où atterrissent les vivres et Grande Terre. Autre explication, les pénuries de carburant qui peuvent gripper la chaîne logistique.
Un bilan humain toujours plus qu'incertain
Les habitants s'interrogent aussi sur le bilan humain de cette catastrophe. Combien de morts ? Une trentaine, selon le bilan officiel, quand d'autres voix locales annoncent des bilans dramatiques invérifiables.
Pour être le plus précis possible, la mairie de Koungou envoie tous les jours des agents pour mener l'enquête dans les bidonvilles en ruine.
"Depuis samedi, on a mis en place des médiateurs pour échanger avec la population. On a envoyé des drones pour voir s'il n'y a pas de tombes qui se creusent. Pour l'heure, on a un bilan de trois morts, ici".
Abdou Mrendadaà franceinfo
Mais ce bilan est susceptible d'évoluer : près d'une semaine après le passage de Chido, tous les décombres n'ont toujours pas été complètement fouillés."Nous sommes une Nation. Nous partageons tous la peine des Mahorais", a écrit Emmanuel Macron, en déplacement à Mayotte, sur X. "Je décréterai le deuil national pour ce lundi 23 décembre. Nos drapeaux seront en berne. Tous les Français seront invités à se recueillir à 11h", ajoute le président de la République.
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