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Reportage
"On ne va pas très bien en ce moment" : au Royaume-Uni, les grèves se multiplient face à un "effet domino à tous les niveaux" de la crise
Il n’y a pas qu’en France qu’on manifeste. Depuis neuf mois, des grèves perturbent le Royaume-Uni. Un pays qui n’avait pas connu de mouvement social de cette ampleur depuis plus de 40 ans. Exemple à Chelmsford, au nord-est de Londres.
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Une revendication revient dans tous les secteurs du Royaume-Uni : de meilleurs salaires. Ce mouvement dure depuis des mois et s’amplifie. Vendredi 3 février, ce sont des enseignants et des cheminots qui se mobilisent. Un peu plus tôt dans la semaine, il y avait les fonctionnaires. Lundi, ce seront les infirmiers. Et les pompiers vont prochainement grossir les rangs contestataires, ils viennent de le voter.
>> Grèves au Royaume-Uni : "C'est sans précédent depuis 1979", observe une spécialiste
Au Royaume-Uni, tout coûte plus cher et leurs salaires ne suivent pas. Avec une inflation qui oscille entre 10 et 11%, tous les prix s’envolent, en particulier les factures d’énergie. La Banque d’Angleterre a augmenté, jeudi, les taux d’intérêt pour la dixième fois d’affilée. Emprunter de l’argent devient de plus en plus coûteux et ce sera aussi le cas pour certains crédits en cours.
"Ça montre bien le mécontentement dans le pays"
Ces grèves ont évidemment un impact sur le quotidien des Britanniques. Pour s’en rendre compte, direction une petite ville au nord-est de Londres : Chelmsford. Trente minutes de train pour se rendre dans la capitale ; 100 000 habitants dans cette ville, dont plus de 10 000 travaillent à Londres. D’habitude, la gare grouille de monde, mais ce jour-là des trains, il y en a beaucoup moins que d’habitude. Des voyageurs aussi. Peter fait ce trajet quotidiennement, mais pas aujourd’hui parce qu'il y a grève des cheminots, mais aussi des professeurs. "Mes deux filles sont au collège qui est fermé aujourd’hui", indique Peter. Alors, oui, il y a un gros impact. "Des grèves qui se répètent sur plusieurs jours, c’est nouveau, ça montre bien le mécontentement dans le pays."
"Coût de la vie élevé, les factures d’énergie… C’est complètement hors de contrôle. Je n’ai pas eu de véritable augmentation depuis des années. Il y a un effet domino à tous les niveaux."
Peter, habitant de Chelmsfordà franceinfo
Pas de cortège de manifestants dans les rues, ce n’est pas comme ça que l’on fait grève ici. Des grévistes sont installés devant leur établissement : la gare, l’école ou l’hôpital. Une poignée de salariés mécontents tiennent des banderoles et sont prêts à dialoguer avec les usagers. Dans le centre commercial du centre-ville, Paula n’a pas envie de leur parler. Ceux du secteur de la santé en particulier. Cette commerçante voit son chiffre d’affaires s’effondrer, faute de clients, et pour elle aussi, toutes les factures augmentent. Elle trouve que les infirmiers exagèrent, et pour le prouver elle montre son index tout tordu : "Vous voyez, j’ai un doigt cassé depuis trois mois. Ils m’ont renvoyé chez moi trois fois parce qu’ils sont trop occupés. Si vous voulez un meilleur salaire, de meilleurs horaires, trouvez un autre métier. J’en ai un peu marre de tout ça parce qu’il y a un nouveau truc toutes les semaines. Nous devenons un pays qui se plaint de tout, tout le temps."
Une ambiance morose
Dans la jolie rue pavée du centre-ville de Chelmsford, un saxophoniste accompagne la pause déjeuner sous un ciel gris bleu habituel. Aucun habitant n’est indifférent à ces grèves et, comme dans tout le pays, la tonalité générale est plutôt favorable aux grévistes. Même si ce jour-là, ils sont nombreux à avoir dû poser leur journée pour garder les enfants. C’est le cas de Francis. Les professeurs de son fils réclament une augmentation au gouvernement. Ça ne l’arrange pas, mais il fait avec. Salarié du privé, il comprend les raisons de cette colère qui se manifeste sans heurt. "Je pense que nous sommes plus stoïques que les Français, explique-t-il en souriant. J’ai de la sympathie pour ces grèves, mais il n’y a pas d’argent dans les caisses."
"On ne va pas très bien en ce moment. Notre croissance dévisse, le Brexit est un désastre, la guerre en Ukraine, la pandémie… Tout s’ajoute et propage la dépression dans le pays."
Francis, habitant de Chelmsfordà franceinfo
Ambiance morose à Chelmsford comme dans tout le Royaume-Uni, où l’on ne voit pas le bout du tunnel. Avec des grévistes de plus en plus nombreux face à un gouvernement inflexible. Les autorités refusent les augmentations et affichent même leur fermeté vis-à-vis des syndicats. Au point de faire passer une loi en ce moment qui restreint le droit de grève. Le gouvernement veut imposer un service minimum dans plusieurs domaines : les transports, la santé et l’éducation notamment. Le texte a été adopté à la chambre des communes cette semaine, c’est maintenant la chambre des Lords qui l’examine. Il est stipulé clairement qu’un salarié refusant de se plier au service minimum pour faire grève pourrait être licencié. Il faut préciser que se mettre en grève au Royaume-Uni, c’est déjà beaucoup plus compliqué qu’en France. Les syndicats doivent organiser des votes parmi leurs adhérents dans des conditions contraignantes. Et obtenir la majorité lors de ce scrutin pour planifier ensuite des dates de grève. Le plus souvent 24 heures, non-reconductibles.
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