Russie : d'anciens détenus de la prison où est retenu Alexeï Navalny décrivent les terribles conditions de détention
Le principal opposant à Vladimir Poutine est incarcéré depuis le mois dernier dans une colonie correctionnelle, à 100 km à l'est de Moscou. Des heures debout ou assis sans bouger, aucune activité, impossibilité de parler aux autres détenus... D'anciens prisonniers racontent à franceinfo leurs conditions de détention.
C'est l’une des prisons les plus sévères de Russie : la colonie correctionnelle numéro 2 de Pokrov, là où est emprisonné Alexeï Navalny. Le principal opposant à Vladimir Poutine y a été transféré en février dernier après sa condamnation à deux ans et demi de prison. Franceinfo a pu rencontrer d’anciens détenus qui donnent une idée assez précise des conditions dans lesquelles vit l'avocat et militant de 44 ans.
>> Nationaliste, anti-corruption et ambitieux, qui est Alexeï Navalny, l'opposant numéro 1 au Kremlin ?
Nous nous sommes rendus devant cette colonie correctionnelle numéro 2, jusqu’aux abords de la prison qui se trouve à 100 km à l’est de Moscou. De l’extérieur on n'aperçoit rien d’extraordinaire, mais c’est à l’intérieur que les conditions de vie et les consignes sont très dures, d’après les anciens prisonniers dont nous avons recueilli le témoignage. Les détenus sont contraints de rester debout, puis assis, à chaque fois sans bouger pendant des heures. Ils doivent respecter des "postures sanitaires", d’après l’administration du pénitencier.
Deux minutes seulement pour prendre le petit-déjeuner. Cinq minutes pour le déjeuner, afin de maintenir les détenus dans l’inconfort. Alexeï Navalny pourrait même, comme d’autres, se voir réveillé la nuit pour réciter son nom et donner le numéro de l’article du code pénal russe qui l’a conduit derrière les barreaux. Mais le pire, pour Konstantin Kotov, un ancien prisonnier politique, sorti en décembre dernier après huit mois de détention sur place, c’est l’isolement : "La chose la plus dure c'est que je ne pouvais pas parler aux autres prisonniers. Et eux, ils avaient peur des sanctions de l'administration à cause de cette interdiction. En fait, c'était comme une sorte de complot du silence contre moi."
Dans cette prison "tout est dirigé par Vladimir Poutine"
À ce régime-là, même avec les visites régulières de ses avocats et celles de son épouse Youlia, il faudra qu’Alexeï Navalny soit très solide physiquement et psychologiquement, assure un autre ancien détenu. Dmitri Diomouchkine a passé un an au pénitencier de Pokrov : "Il sera dans la section des contrôles renforcés, sans contact avec les autres prisonniers."
Il va rester toutes les huit heures soit assis, soit debout sans bouger. Il ne pourra aller ni dans la chapelle, ni dans la salle de sport, ni à la bibliothèque. Ce sera très dur pour lui.
Dimitri Diomouchkine, ancien détenu de Prokovà franceinfo
La notoriété d’Alexei Navalny peut-elle lui garantir d'échapper à certains traitements ? On a du mal à imaginer l’opposant numéro un à Vladimir Poutine, soutenu par toutes les grandes puissances occidentales, être victime par exemple de sévices corporels, comme cela a déjà été relaté à Pokrov. C’est un phénomène courant dans les colonies pénitentiaires en Russie, largement dénoncé par les ONG spécialisées.
A priori, Alexei Navalny évitera de tels traitements. L’objectif des autorités russes est en effet d’abord qu’il soit totalement sous contrôle, comme l’explique Zvoia Svetova, journaliste indépendante et défenseure des droits de l’homme à Moscou : "Dans ces conditions assez abominables, que l'on peut considérer comme une torture psychologique - parce que je suis sûre qu'on ne va pas le battre pour l'instant - est-ce que sa notoriété va l'aider ou va rendre sa situation encore pire ? Je crois que la situation ne peut pas être pire. Tout ce qui se passe dans cette prison avec Navalny, tout est dirigé par Vladimir Poutine ou par les gens du FSB qui patronnent cette prison et son chef."
Navalny souffre du dos
Comment Alexeï Navalny vit-il ces premières semaines d'emprisonnement ? Le militant politique a lui-même réussi à transmettre deux messages à l’extérieur. Dans le dernier en date, lundi 22 mars, il explique que son quotidien ressemble à celui d’un prisonnier d’un monde tout droit sorti d’un épisode de Star Wars. Et puis mercredi soir, ses avocats ont expliqué que Navalny souffrait fortement du dos, et ne supportait plus la position debout très longtemps. Ses avocats n’ont d’ailleurs pas été autorisés à le voir alors que cette visite était programmée, officiellement pour des raisons de sécurité. Ils soupçonnent la direction du pénitencier d’avoir transféré Alexeï Navalny dans l’hôpital à l’intérieur de l’établissement.
Alors comment imaginer l’avenir plus lointain ? À moyen terme, le scénario le plus couramment évoqué en Russie prend des airs de Guerre froide, et envisage un échange entre Alexeï Navalny et des prisonniers russes détenus du côté occidental.
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