Christine Orban rétablit la vérité sur Lady Diana : "J'aime combattre les a priori qui ont été faits sur les femmes"

Pendant son adolescence, Christine Orban était fascinée par Napoléon, ce qui l'a amenée à s'intéresser à Joséphine, la femme répudiée par cet empereur obnubilé par une seule chose, son besoin de descendance, avec à la clé le prix du roman historique décerné par l'historien Jean Tulard en 2014. L'écriture l'a toujours accompagnée avant de devenir sa principale raison de se lever le matin. Son premier ouvrage, Les petites filles ne meurent jamais, sorti en 1986, était déjà un cri du cœur et une déclaration d'amour à la liberté.

Le 26 mars 2025, elle a publié, Mademoiselle Spencer, aux éditions Albin Michel, un roman, écrit dans l'exercice de style du monologue intérieur. Elle a opté pour se mettre dans la peau de Mademoiselle Spencer, devenu plus tard la princesse Diana ou Lady Di.

franceinfo : Comment avez-vous travaillé sur ce roman et sur cette écriture-là ?

Christine Orban : J'ai travaillé avec ce qu'elle a dit, ce qu'elle a écrit et surtout avec son "body language", son langage corporel, qui est immense. C'est-à-dire que Diana, quand elle regarde vers le bas, quand elle pleure parfois ou quand elle se cache derrière sa frange, exprime très souvent ses états d'âme, ce qui est très aidant. J'ai voulu la sortir de son image people, de cette Diana de papier glacé pour voir au fond ce qu'il se passe. La seule façon, c'était d'utiliser la caméra intérieure, de venir à l'intérieur d'elle pour comprendre sa vie, de la starification aux scarifications, quand elle s'ouvre les jambes, la poitrine, jusqu'à cette émission complètement dingue à la BBC où elle balance tout.

Elle n'a que 17 ans quand elle devient l'élue, elle est d'une timidité maladive et elle dit que la timidité ne sait pas soutenir le silence. On sent qu'elle est complètement engoncée dans son corps, dans son incapacité à s'exprimer parce qu'elle n'a pas encore l'expérience de la vie.

Elle n'a aucune expérience, elle a été peut-être choisie aussi pour cela. 

"Elle n'a pas connu d'homme et elle croit au prince charmant. Donc, évidemment, elle va de déception en déception, jusqu'à la veille du mariage où elle ne veut plus y aller."

Christine Orban

à franceinfo

Sa sœur lui dit d'ailleurs, "Je t'avais dit de ne pas y aller, maintenant, c'est trop tard. Il y a ta tête sur tous les mugs d'Angleterre, il faut y aller". Donc elle y va en sachant, je pense, la lutte qu'il va falloir mener.

Ce qui fait mal, ce sont les mots. Quand elle dit notamment, "La famille m'a élue pour mon pedigree, je suis un animal de race, une sorte de corgi sélectionné dans un bon élevage et ausculté par le meilleur vétérinaire. Je suis un ventre neuf apte à enfanter". Elle va quand même aller jusqu'à rencontrer un gynécologue qui va la valider. On a l'impression d'être au Moyen Âge.

Oui, et ce sera sûrement le dernier mariage organisé parce qu'en effet, elle est choisie pour donner un successeur au trône. Alors quand le mari en plus vous aime, tout va bien, mais elle va se rendre compte que la belle histoire d'amour, c'est entre son mari et cette femme, Camilla.

Avez-vous eu des réactions de personnes qui sont associées à la cour d'Angleterre sur cet ouvrage ?

Un journaliste proche de la Couronne m'a conseillé d'envoyer le livre aux fils de Diana et il m'a donné l'adresse et la manière dont il faut les appeler. Je ne sais pas si je vais leur envoyer, mais en tout cas, je suis sûr que j'aurai des difficultés à être éditée en Angleterre. Andrew Morton, lui-même pour, Diana, true story avait eu du mal.

Ce livre répond presque à deux questions, a-t-on un destin tout tracé dès notre naissance ? Et peut-on forcer le destin ?

Je pense qu'on peut forcer le destin, mais qu'il y a certaines personnes qui ont un destin tracé. 

"On a peut-être tous, ce moment dans notre vie où la question du choix nous est posée."

Christine Orban

à franceinfo

Moi, ça a été le moment le plus important de ma vie, quand j'ai fait sept années d'études de droit, puis j'ai démissionné chez le notaire en disant, je vais écrire, je vais poster mon livre et puis s'il n'est pas pris, je me jette dans la Seine, mais au moins, j'ai tenté. Je pense qu'il y a des personnes qui ne peuvent pas parce que la route du destin est trop violente. Et c'est peut-être difficile de dire non au fait d'épouser le prince Charles quand on est amoureuse. Bon, elle va essayer de partir, mais le destin la rattrape.

Elle cherchait une liberté. Vous, vous cherchez à parler de la liberté. La liberté est au centre de tout ce que vous écrivez. Est-ce que c'est le Graal ?

J'aime combattre les a priori qui ont été faits sur les femmes, peut-être parce que j'en ai souffert. C'est très important pour moi et parfois, on peut en avoir sur Diana. Certains m'ont dit qu'elle a manipulé la presse, mais elle n'a pas du tout manipulé la presse, elle est avec un homme qui la délaisse et la presse et le peuple scandent, "Diana we love you". Forcément, elle se tourne vers ceux qui l'aiment, donc elle ne manipule pas. Carol Oates explique très bien la même situation avec Marilyn Monroe, elle va là où on l'aime et c'était le public qui l'aimait.