Laurent Mariotte part à la découverte des savoir-faire de nos régions : "Ce que j'aime, c'est mettre en avant des talents"

Laurent Mariotte est cet amoureux des saveurs, des bons produits, tour à tour sucrés, salés, avec ses couleurs, ses légumes, ses fruits d'hier et d'aujourd'hui. Ça fait maintenant 20 ans qu'il a décidé de changer de voie en passant son CAP en cuisine, lui offrant la possibilité de présenter depuis 2008 cette séquence très attendue et plébiscitée par le public, Les petits plats en équilibre sur TF1. Des recettes simples et savoureuses pour profiter des ingrédients de saison en donnant la part belle aux produits locaux. En parallèle, il publie des ouvrages comme À ma table aux éditions Solar, 100 recettes qu'il cuisine à la fois à la télévision, mais aussi chez lui et entre amis. Il est aussi le numéro un de la presse cuisine chez les marchands de journaux, grâce à son magazine Les petits plats de Laurent Mariotte, dont le numéro 22, vient de paraître avec un dossier spécial Camargue.

franceinfo : Il y a 20 ans, vous décidiez de tout plaquer, ça signifie que l'amour de la cuisine était un ingrédient obligatoire pour votre bonheur ?

Laurent Mariotte : C'est vrai que c'était le fantasme, ça fait pile 20 ans que j'ai passé mon CAP de cuisine et c'était un peu le fantasme de la quarantaine qui arrivait en se disant, je vais ouvrir un restaurant avec des copains. En passant mon CAP, je me suis dit, mais c'est dingue tout ce que j'apprends, il y a peut-être quelque chose à faire autour de la transmission.

"À Canal J, où j'ai passé 10 ans, j'ai appris en fait à concerner les enfants avec des choses divertissantes, mais toujours en leur apprenant des choses."

Laurent Mariotte

à franceinfo

Je me suis dit : tiens, si on réinventait quelque chose autour de la cuisine du quotidien pour qu'elle rentre vraiment dans les foyers.

On vous sent tellement concerné, soit à l'antenne, soit quand vous prenez la plume. Il y a une grosse partie de vous dans tout ce que vous faites.

C'est vrai, j'étais encore dimanche dans la ferme de mes grands-parents que j'ai reprise, où j'ai planté mon potager. J'ai besoin de ce lien avec la terre et j'ai grandi avec cette cuisine rurale. C'est vrai qu'on est arrivé avec un magazine dans un secteur déjà concurrentiel, où il y avait 12 titres. Aller à la rencontre des agriculteurs, des paysans, c'est quelque chose que j'ai imposé au groupe de presse avec qui on s'est associé. Plusieurs groupes me disaient non, ça n'intéressera pas les lecteurs, ce qu'ils veulent, ce sont des recettes. Bien sûr, il y a 60 recettes, mais là, en Camargue, par exemple, j'ai rencontré quelqu'un qui élève des taureaux, je suis parti en mer avec des pécheurs et je suis allé voir une famille qui fait du riz bio. Les lecteurs, les téléspectateurs et les auditeurs veulent savoir d'où vient la nourriture qu'ils consomment, ils sont très curieux et ce sont presque les pages les plus lues. Ce que j'aime, c'est mettre en avant des talents et des savoir-faire dans nos régions.

On découvre effectivement les spécialités de la région, donc, pour la Camargue, vous nous parlez des morilles, du Rocamadour, mais vous nous racontez notre propre histoire. Par exemple, le Rocamadour servait à payer la dîme.

Il y a toujours une histoire derrière les produits, la cuisine, l'alimentation, c'est de la culture, c'est de la géographie.

"Je pense vraiment que la nourriture est le moyen le plus intime d'être en contact avec la nature."

Laurent Mariotte

à franceinfo

Aujourd'hui, on est ultra-connecté, on n'a le temps de rien. J'aime l'idée qu'on puisse se réapproprier comme ça nos régions. On va dire, il est chauvin, mais oui, je suis chauvin. C'est hallucinant tout ce qu'on possède comme richesses.

Ce qui est assez puissant, dans votre présence, dans votre façon d'aborder la cuisine, c'est que vous permettez à beaucoup, qui ont disparu, de perdurer. Vous avez perdu votre père à l'âge de deux ans, il cultivait la terre aussi. Vous avez grandi dans la ferme familiale avec, à vos côtés, vos six oncles, votre mère et vos grands-parents qui cuisinaient la cuisine rustique. Les odeurs ne vous ont jamais quitté, elles sont restées imprégnées en vous.

Ma grand-mère faisait un riz au lait, mon grand-père faisait des œufs au plat tous les soirs. Ce sont des choses comme ça que j'aime perpétuer pour avoir ce lien effectivement avec ceux qui sont partis. La cuisine, c'est ce lien-là, même si on a toujours du mal à reproduire les goûts et les recettes de ceux qui nous ont nourris.

Est-ce que vous n'êtes pas avant tout un raconteur d'histoires ?

Oui, ça me fait plaisir et j'ai pris beaucoup de plaisir à le faire ici pendant douze ans sur franceinfo, aller à la rencontre des artisans, des chefs dans toutes nos régions. C'est vrai que c'est important de raconter des histoires pour se mettre à table et de garder ce lien vraiment avec la cuisine du quotidien.