Maxime Chattam : "Quand on écrit, on donne tellement de soi qu'on se livre"
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Lundi 16 décembre 2024 : l’écrivain Maxime Chattam. Il vient de publier "Prime Time" aux éditions Albin Michel.
Au départ, Maxime Chattam voulait être acteur. C'est un voyage en Thaïlande qui a changé l'orientation de la boussole. La jungle découverte a donné naissance à un récit écrit dans un petit cahier devenu le journal quotidien de ce périple et de ce fait, le premier lien avec cette envie d'écrire. Ses histoires sont quant à elles des invitations à découvrir et élucider des décès, meurtres, assassinats. Fin 2024, après Lux en 2023, il publie Prime Time aux éditions Albin Michel. Le plateau télé du journal de 20 h va devenir le point névralgique d'une prise d'otage orchestrée et menée d'une main de maître par un certain Kratos. Tout est réaliste et pour cause, son épouse Justine Bollaert l'a beaucoup aidé dans l'écriture des détails, des lieux, des coulisses, des métiers, avec les gestes et les personnalités du milieu. Il est même allé assister au journal du 20h où l'équipe l'a accueilli.
franceinfo : Dans Prime Time, le lecteur est invité à découvrir les coulisses d'un journal et à vivre cet événement comme s'il y était. C'est un page-turner avec une prise d'otage, celle du lecteur, que vous réussissez à insuffler tout au long de cet ouvrage. Parfois, cela dépasse le raisonnable de nous tenir en haleine de cette façon !
Maxime Chattam : Si ça marche, je suis content ! Oui, c'est le principe du thriller qui est avant tout une mécanique au service du suspense. C'est un travail sur le rythme. Moi, j'ai une histoire en tête, j'ai des personnages, j'ai envie de raconter tout ça avec des retournements de situation, une révélation finale. Maintenant, il faut parvenir à tout distiller correctement et à embarquer le lecteur sur un rythme qui est satisfaisant pour ma narration et pour la lecture aussi.
Comment allez-vous chercher cette inspiration ? Est-ce que vous dessinez ces personnages à un moment donné pour les avoir sous les yeux ? Est-ce que vous les avez rencontrés ?
L'inspiration sur les personnages se fait au fur et à mesure de l'écriture. Je commence, j'ai une trame, j'ai une idée pour les personnages principaux et puis à mesure que j'écris, ils se révèlent d'eux-mêmes. Moi-même, quand je me penche au-dessus de l'imagination que je peux avoir, je ne vois pas grand-chose, mais il faut tirer des fils pour que ça vienne. Écrire, c'est tiré des fils. Chaque phrase, c'est un fil qu'on tire. Les personnages se créent ainsi. Je les dessine par des notes. Je prends beaucoup de notes sur eux et parfois ça m'arrive de revenir un peu en arrière, de changer une phrase pour réajuster parce que la psychologie de l'être humain, c'est de la dentelle. Et parfois, je me rends compte que pour qu'il ait une réaction cohérente plus tard, il y a peut-être un trait de caractère qui doit se dessiner avant, qui n'était pas cohérent avec ce que j'ai fait. Je reviens en arrière, j'ajuste tout ça et puis ça crée des personnages que j'espère crédibles.
Quand on parle de la lecture, toutes les personnes qui aiment lire disent que la force de l'écriture, c'est de nous emmener très loin. Est-ce que ce sont vos voyages qui vous ont donné envie d'écrire ?
"Ce sont les voyages qui m'ont ouvert au monde."
Maxime Chattamà franceinfo
J'ai voyagé tôt. Jusqu'à l'âge de 11,12 ans je ne voyageais pas vraiment et puis, je suis parti aux États-Unis, en Thaïlande. Et ces voyages m'ont permis d'éclore, de ne pas être juste autocentré sur le petit garçon que j'étais, de me rendre compte qu'il y a un monde gigantesque autour de moi, avec une richesse insoupçonnable. À 12 ans, j'ai fêté Noël dans la tribu des Akha, dans le nord de la Thaïlande qui n'était pas encore un pays touristique et pour qui Noël ne voulait rien dire, n'existait pas. Ma grand-mère m'avait emmené là exprès et un matin, elle m'a dit : "Joyeux Noël", elle m'a embrassé et m'a donné un petit truc juste en me disant "c'est un cadeau de Noël". C'était un petit objet, mais c'était symbolique. L'idée, c'était justement de dire : "regarde ici Noël, ça ne veut rien dire et pourtant ça va être une belle journée de s'ouvrir à quelque chose de différent". Souvent la différence, c'est d'abord s'enrichir, c'est Saint-Ex, mais au-delà de ça, c'est aussi découvrir l'appétence de la curiosité de l'autre. Et dans cette curiosité, forcément, il y a envie d'échanges et envie de construire quelque chose. Quand on a de l'imagination, on fabrique des histoires et parfois des livres.
Cette grand-mère a été au cœur du développement de votre imaginaire, de cette envie de prendre votre vie en main. Et on retrouve dans cet ouvrage, cet aspect "reprendre son destin en main".
Je vais vous dire un truc. Jusqu'à il y a très peu de temps, j'étais convaincu que je me cachais et que dans mes livres, ce n'était que de la fiction et que je faisais partie de ces auteurs qui ne se révèlent jamais dans leurs livres. Il m'a fallu avoir 48 ans et 30 bouquins pour me rendre compte qu'en réalité, c'est une hérésie de croire cela. Quand on écrit, on donne tellement de soi qu'on se livre. Mes livres sont guidés par ce que j'ai envie de raconter, l'histoire qui me semble importante, mais aussi forcément, parce que je suis un être humain, par ce que je traverse et ce que je suis.
Plus on avance dans le temps et plus on se rend compte que vous aimez mélanger les genres et proposer autre chose. C'est un gros challenge ?
"Le travail du conteur, c'est de sentir qu'on a un truc à raconter et tirer cette pelote pour voir ce qu'on peut proposer en essayant de lui donner un sens. Ce n'est pas juste se contenter de dérouler des chapitres pour faire plaisir ou pour faire peur."
Maxime Chattamà franceinfo
Ce n'est même pas un défi, c'est un besoin. Typiquement, cela fait quelque temps, depuis que j'ai commencé à écrire Lux, que je me suis rendu compte que je n'avais plus envie d'aller dans une forme de noirceur, d'aller explorer ce qu'il y a de pire chez l'être humain. Et je me suis demandé pourquoi je n'avais plus envie alors que je l'avais fait pendant 25 ans et que j'avais même fait de la criminologie pour ça. Eh bien, c'est parce que je pense que j'ai fait le tour des questions qui pour moi étaient importantes et de ce que j'avais à raconter sur le sujet. Peut-être qu'un jour j'aurais de nouvelles idées, que j'aurais envie d'y retourner, mélanger qui je suis, moi, au service d'une histoire.
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