"Tirez sur mon doigt, monsieur le président !" obtient le prix Gotlib : cette BD vise à rendre "le monde un peu moins mélancolique", selon Ariane Gotlieb
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Lundi 15 avril 2024 : La fille de l’artiste Gotlib, Ariane Gotlieb. Elle vient de remettre le deuxième prix Gotlib de la BD humoristique au Festival du livre à Paris.
Ariane Gotlieb est, comme son nom l'indique, la fille unique du couple Claudie et Marcel Gottlieb, fans inconditionnels du septième art. Son père, Gotlib était auteur de bande dessinée, artiste, écrivain, dessinateur et éditeur. Aussi militant, il a même créé le héros intergénérationnel indémodable Gai-Luron. Gotlib, c'est aussi : La Coccinelle ou encore les séries tout aussi incontournables comme Les dingodossiers réalisé par René Goscinny, Rubriques-à-brac, Les aventures de Superdupont qui ont marqué à jamais le monde de l'art et notamment du neuvième art. Il a aussi beaucoup publié dans L'Écho des savanes et dans Fluide Glacial, deux mensuels devenus cultes, qu'il a cofondés. Depuis sa disparition en 2016, Ariane Gotlieb a décidé d'arrêter son métier de scripte pour se consacrer à plein temps à au devoir d'ayants droit.
Vendredi 13 avril, elle a remis le deuxième prix Gotlib de la BD humoristique au Festival du livre à Paris.
franceinfo : Vous êtes devenue conservatrice en chef du monument, très joyeux, Gotlib. Et dans ce cadre-là, vous avez créé le prix Gotlib, remis au Festival du livre de Paris samedi dernier pour la deuxième année consécutive. Quel est le nom du lauréat ?
Ariane Gotlieb : C'est l'album : Tirez sur mon doigt, monsieur le président ! De Mo-CDM.
Je voudrais qu'on parle de ce prix. C'est un clin d'œil, un hommage, une façon de saluer justement l'importance du dessin ?
Alors, l'importance du dessin, l'importance de la bande dessinée, l'importance de la bande dessinée humoristique et l'importance de Gotlib dans la culture générale. Je trouve que cet album est particulièrement adapté puisque dans son histoire, l'histoire que raconte l'album, pour le coup, c'est comment rendre le monde un peu moins mélancolique, un peu moins triste. Donc c'est idéal cette année pour recevoir ce prix-là.
C'était ça le travail de votre père ? D'embellir un peu ce monde, de le rendre plus gai et surtout de dédramatiser une histoire familiale qu'il a vécue enfant puisqu'il a fait partie de l'Œuvre de protection des enfants Juifs (OPEJ). Il avait réussi à échapper à deux rafles. Son père, malheureusement, a été pris et envoyé à Drancy. C'était ça son travail ?
Oui, c'était de rendre humoristique tout ce qui pouvait l'être, en tout cas dans son travail. Et puis ça lui permettait d'être un peu plus heureux dans sa vie privée.
"C'est vrai que mon père n'était pas quelqu'un d'aussi drôle que ça à l'arrivée. Un peu névropathe, un poil hystérique, mais c'était un très chouette mec qui essayait vraiment de rendre le monde un peu moins triste."
Ariane Gotliebà franceinfo
Vous étiez très proche de votre père, très fusionnels. L'écriture, c'est ce qui l'a sauvé lui aussi ? Le fait de créer des personnages, d'être auteur, dessinateur, d'avoir effectivement ce crayon... Ça lui a permis de voyager, de sortir d'une enfance difficile, d'un parcours de vie très dur.
On était extrêmement proches. Oui, c'est un vrai exorcisme. Après, quand il a commencé à un peu plus s'épanouir dans des bandes dessinées toujours humoristiques, mais peut-être un peu plus trash comme Rhââ Lovely ou Rhâ Gnagna, on comprend bien finalement au travers des dessins son vécu, comme ce mec qui est chez son psy et qui fait ses besoins par la tête. C'est quand même très clair !
Gai-Luron, c'est sans doute le personnage qui lui colle le plus à la peau. Il s'est beaucoup caché derrière.
Il s'est caché. Il a évolué avec son héros et son héros a évolué avec lui puisqu'après, il lui a mis un slip. C'est vrai qu'il avait une tendresse absolue pour ce héros. Et puis parce que ce héros a été inspiré d'autres chiens, que ce soit ceux de chez Tex Avery, Walt Disney, Snoopy, voilà, il était très attaché à Gai-Luron.
Étonnamment, il était très positif dans sa création. C'était aussi une façon détournée d'exorciser tout ça. Je pensais à la Coccinelle par exemple. Une coccinelle, c'est normalement un animal qui nous porte bonheur. Est-ce que c'était ça aussi votre père ?
Il avait cet optimisme très clairement, puisque quand il a cessé de l'avoir et ça, on en a beaucoup parlé, il m'a dit : "J'ai envie d'avoir envie, mais je n'ai plus envie. Un artiste qui ne crée plus, c'est un artiste mort".
"La Coccinelle de Gotlib était là, un peu comme tous les petits personnages de Walt Disney un peu féeriques, pour remplir le décor, pour égayer un peu l'histoire et faire l'idiot."
Ariane Gotliebà franceinfo
C'est étonnant d'ailleurs, parce qu'il avait une énorme humilité.
C'était même maladif !
Il ne supportait pas le mot "génie", le mot "génial".
Non. Il était très étonné que ça continue à se lire, que ça continue à se vendre. Et en même temps, c'était très ambigu parce qu'il se dessinait énormément donc, finalement, il parvenait parfois à avoir une reconnaissance du public où il était vraiment heureux de ça. Mais son ego n'était pas surdimensionné, loin de là et effectivement, il était d'une modestie absolument maladive.
Il avait surtout une énorme capacité, celle de refuser de grandir. N'est-ce pas ce qui définit le plus Gotlib ?
Jusqu'à la fin, il a été attiré par la scatologie, le pipi, le caca, tout ce qu'il faisait marrer. Tout ça est très enfantin.
Si vous deviez, vous, en tant que fille, définir votre père en quelques mots, que diriez-vous de lui ? Qui était Gotlib ?
Un papa artiste génial.
Avec un nom qui change de Gottlieb à Gotlib. C'est effectivement une erreur, mais qui vient de l'état civil.
Oui ! Sur les papiers d'identité de papa : sa carte d'identité, son passeport et son permis de conduire c'est aussi avec le "e" comme maman et moi.
Mais par contre le prix Gotlib n'en a pas.
C'est le prix de l'artiste !
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