Départ du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la Cedeao : le repli de cette communauté économique profite à la Russie
Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, trois pays nouvellement dirigés par des juntes claquent la porte de la Cedeao, l'organisation ouest africaine à laquelle ils appartenaient depuis presque 50 ans. Toute la région s'en retrouve déstabilisée.
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C'est un peu pour la région le même effet que le Brexit a eu sur l'Europe... mais qui est survenu de façon beaucoup plus rapide. La notification formelle du triple retrait a été envoyée lundi 29 janvier, par courrier, 24 heures seulement après la lecture d'un communiqué en simultané dans les journaux télévisés du Mali, du Burkina et du Niger.
Les trois pays reprochent à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest de s'être éloignée des idéaux de ses pères fondateurs et du panafricanisme. Ils l'accusent d'être soumise à l’influence des puissances étrangères, de ne pas les avoir assistés dans la lutte contre le terrorisme et l’insécurité, enfin d'avoir adopté à leur encontre des "sanctions illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables".
Le processus de sortie prend normalement un an, période pendant laquelle les États doivent continuer à se soumettre à leurs obligations. Cette décision reste unique dans l’histoire de la Cedeao, organisation économique de 15 pays actuellement présidée par le Nigéria, qui a exprimé sa "tristesse" lundi 29 janvier. Mais ce n'est pas une surprise : les tensions s'accumulaient depuis plusieurs mois avec Bamako, Ouagadougou et Niamey, déjà suspendus depuis l'arrivée au pouvoir des militaires en 2020, 2022 et 2023. L'été dernier, l'organisation avait même brandi la menace d'un recours à la force au Niger pour y rétablir l'ordre constitutionnel et restaurer l'autorité du président Bazoum.
Des élections prévues en 2024
Ce retrait éloigne la perspective d'un retour des civils au pouvoir. Des élections devaient avoir lieu en 2024 au Mali et au Burkina, permettant un retour à un gouvernement civil. C'était un préalable exigé par la Cedeao pour la levée des sanctions économiques. Elles n'ont plus lieu d'être. "Bien installés dans les palais et devant les délices du pouvoir, [les putschistes] veulent s'éterniser dans les fauteuils présidentiels", fustige Le Patriote, quotidien du parti au pouvoir en Côte d'Ivoire.
Leur argument pour annuler les élections ? Au nom de la lutte antijihadiste, il est nécessaire de rallonger la durée des transitions. Pourtant sur le plan sécuritaire, alors que les groupes terroristes progressent, le fait que la région se fragmente n'est pas une bonne nouvelle pour sa stabilité.
La Cedeao permet à 300 millions de personnes de voyager sans visa entre ses pays membres. En quittant l'organisation, les trois réfractaires vont perdre le bénéfice de cette libre circulation (et aussi un accès à l'océan). Cela inquiète nombre de ressortissants, qui ne pourront bénéficier des mêmes avantages qu'au sein d'une autre organisation, beaucoup plus réduite, l'Union économique et monétaire ouest-africaine, qui les lie notamment au Sénégal et à la Côte d'Ivoire.
Même si des signatures d'accords bilatéraux entre voisins peuvent atténuer les effets du divorce, les tarifs douaniers pourraient par ailleurs augmenter et faire grimper le prix de certaines denrées pour les ménages : oignons ou bétail, expédiés par le Niger dans toute la région.
La Russie, partenaire privilégié
Les trois pays vont maintenant se tourner vers la Russie, qui s'installe à la place de la France dans le fauteuil de partenaire privilégié en termes de coopération économique, militaire et politique. Elle a récemment fourni gratuitement 25 000 tonnes de blé au Mali et au Burkina. Fin décembre, elle a rouvert son ambassade à Ouagadougou après 30 ans de fermeture et se rapproche aussi du Niger.
Moscou est devenue l'étape obligée des tournées diplomatiques africaines. Le Premier ministre nigérien y était il y a deux semaines, juste avant l'annonce de la rupture avec la Cedeao... Ce qui n'est peut-être pas qu'un hasard de calendrier.
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