"De Gaulle avait compris à quoi pouvait servir l'humour, à fédérer, à dédramatiser une situation" analyse l'éditorialiste Aurélie Julia
Cette semaine, Micro européen s'intéresse à l'humour comme arme politique, avec Aurélie Julia, directrice de la "Revue des Deux Mondes".
À cause du politiquement correct, à cause de l'esprit de sérieux, à cause des réseaux sociaux, considéré comme ennemis de l'humour, les hommes politiques ont beaucoup moins d'humour aujourd'hui. Pourtant, l’humour a longtemps été une arme politique redoutable, comme le souligne Aurélie Julia, directrice de la Revue des Deux Mondes, qui consacre son numéro d’été à "l'humour comme arme politique".
franceinfo : Il faut rire avec De Gaulle, Clémenceau, Elisabeth II, Churchill, les fous du roi, les bouffons, et aussi des florilèges, des perles. On commence, bien sûr, par le général de Gaulle quand on lui disait à ce propos : "Mon général, quel est votre point de vue ?", il répondait : "Le plus élevé, c'est le moins encombré."
Aurélie Julia : Le général de Gaulle était un bon acteur. On peut dire que le monde est un théâtre. Cette citation ne vient pas de moi, mais de Shakespeare. Donc la politique est aussi un théâtre et les hommes politiques se révèlent quelquefois d’excellents acteurs puisqu'ils savent manier l'éloquence, le verbe et les effets de manche. Le général de Gaulle savait justement manier toute cette rhétorique. Quand on le regarde à la télévision, ses discours étaient enregistrés. Il savait manier justement cet humour et il avait compris à quoi pouvait servir l'humour, servir à plusieurs choses, à se rendre sympathique, à fédérer, à dédramatiser une situation. Cela peut être aussi une arme politique.
Une très grande arme politique, on se souvient du discours de Mexico, "la mano en la mano". Celui qui savait parfaitement l'utiliser, c'était Clémenceau qui disait : "Qu'est-ce que l'Angleterre ? Une colonie française qui a mal tourné."
Clémenceau, comme Churchill, manie un humour extrêmement féroce, vachard. C'est intéressant et je m'en suis rendu compte en faisant ce numéro, c'est que chaque homme et femmes politiques ont un certain type d'humour. Pour De Gaulle, l'humour est une alliance entre Boileau et Audiard. Concernant l’attentat du Petit Clamart, il avait dit : "C'était tangent", pour rappeler les Tontons flingueurs. Clémenceau et Churchill, c’est un humour vachard, Elizabeth II, c'est un humour d'élégance et de politesse, Chirac, c'est un humour paillard, Mitterrand, c'est quelqu'un qui savait manier l'ironie, les petites phrases et les saillies, aussi redoutables.
Dans la Revue des Deux Mondes, il y a un florilège des bons mots, celui de Xavier Darcos : "Quand vous êtes aux affaires, vous manquez de souffle. Quand vous êtes dans l'opposition, vous ne manquez pas d'air."
J'ai entendu dire que nos hommes politiques ou les grands hommes avaient beaucoup moins d'humour aujourd'hui. Pourquoi ? À cause du politiquement correct, à cause de l'esprit de sérieux, à cause des réseaux sociaux aussi, qui sont des adversaires et des ennemis de l'humour.
Margaret Thatcher disait : "Si vous voulez qu'une chose soit dite, demandez à un homme, si vous voulez qu'elle soit faite, demandez à une femme."
Je vais vous répondre par une citation de Pierre Desproges : "Les hommes politiques, nous n'avons plus de grands hommes mais des petits qui grenouillent et sautillent de droite et de gauche avec une sérénité dans l'incompétence qui force le respect." J'espère que l'ami Desproges n'était pas visionnaire.
Aurélie Julia, vous êtes l'architecte de cette Revue des Deux Mondes sur l'humour comme arme politique. Qu'est-ce que l'humour pour vous ? Et qui préférez-vous en humour ?
Je trouve qu'aujourd'hui, on ne rit pas assez. Le tragique nous cerne. Certes, on va tous finir, on va tous mourir, la mort nous attend, mais la vie aussi nous attend. Je pense qu'il faut rire, il faut être dans l'autodérision. Pour moi, l'humour est un signe d'intelligence. Qui me fait rire ? Aujourd'hui, Fabrice Luchini me fait beaucoup rire.
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