"Les droites ont le vent en poupe en ce moment en Europe", estime la directrice de "La Revue des Deux Mondes"

Focus sur la "Revue des Deux Mondes" pour son numéro intitulé "Les droites conquérantes", notamment en Europe. Aurélie Julia, la directrice de "La Revue des Deux Mondes", analyse l'ascension des mouvements conservateurs et populistes.

Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
La couverture de "la Revue des Deux Mondes" pour son numéro intitulé "Les droites conquérantes". (Revue des Deux Mondes)
La couverture de "la Revue des Deux Mondes" pour son numéro intitulé "Les droites conquérantes". (Revue des Deux Mondes)

En Europe, les partis de droite connaissent un véritable regain d'influence, marqué par l'émergence de figures emblématiques telles que Giorgia Meloni, qui incarne un populisme rénové et un discours différent des conventions politiques traditionnelles. Ce phénomène, qui traverse plusieurs pays européens, soulève des questions sur l'évolution du paysage politique. Alors que des partis comme l'AFD en Allemagne et la CDU gagnent du terrain, la France, elle aussi, semble voir ses débats s'orienter vers une droite de plus en plus affirmée. L'essor de ces différentes formes de droites soulève des interrogations sur l'avenir du clivage politique classique et sur l'héritage des années Macron, notamment à l'approche des élections de 2027. 

franceinfo : Conservatrices, libérales, réactionnaires, populistes, pourquoi titrer sur "les droites conquérantes" ?

Aurélie Julia : Les droites ont en effet le vent en poupe en ce moment en Europe et la figure un peu emblématique, c'est Giorgia Meloni, qui est devenue une figure incontournable dans le paysage européen. On a cherché à comprendre les raisons de son succès. C'est un peu un ovni dans le milieu politique. De par ses origines, elle est très modeste, ce qui ne l'empêche pas de parler plusieurs langues. Je pense que ce qui la caractérise, c'est un discours clair, des idées très tranchées et puis elle incarne un peu le visage d'un nouveau populisme.

Il y a aussi l'alliance avec Trump

L'Alliance, elle sert beaucoup. Elle est très aimable avec Trump, avec Elon Musk aussi, et je pense qu'elle se rêverait peut-être en alliance entre l'Atlantique et l'Europe. La nouvelle passerelle.

On voit poindre ces droites européennes, récemment en Allemagne avec l'AFD, mais pas seulement

La percée historique de l'AFD, qui est tout de même un parti néonazi, et aussi la percée de la CDU, et en France, on peut se poser des questions : "Est-ce que la France se droitise ?" Je crois que c'est une évolution un peu complexe et nuancée. Si on prend les thèmes qui sont généralement alliés à la gauche, comme l'écologie, comme l'égalité, ils sont un peu en perte de vitesse, à la différence des thèmes que l'on prête souvent à la droite, comme l'autorité, l'ordre, l'inquiétude sur le déficit, qui sont plutôt mis en avant aujourd'hui.

Vous publiez aussi un article sur l'après Macron. Qu'en sera-t-il en 2027 ?

Pourquoi Macron a balayé le clivage gauche-droite qui était le clivage assez classique ? Que va-t-il se passer en 2027 ? Est-ce qu'il y aura un héritage de la macronie ou alors est-ce que nous aurons un retour du clivage gauche-droite ?

Il y a énormément d'articles dans La Revue des deux Mondes sur cette droite conquérante, notamment ceux de Jean Szlamowicz qui a écrit sur "des mots de droite"

Quand vous voulez disqualifier quelqu'un, vous le qualifier de droite généralement, la droite à mauvaise presse dans les esprits et cela vient de l'héritage aussi. On a un article "d'où vient la droite".  La droite est née, on peut le dire, sous la Révolution française où il fallait voter pour ou contre la mort du roi. Donc ce qu'on dit de droite est dans le camp des vaincus. Il y a un autre fait historique, l'affaire Dreyfus, où là, idem, la droite est du mauvais côté. Après, il y a le terrible épisode de la collaboration. Donc la droite ne s'assume pas, elle rechigne à s'afficher comme telle. Pour illustrer ce propos, Yves de Gaulle cite une phrase de son grand-père, quand il avait été interrogé à la télévision, quand le journaliste lui avait demandé : "Est-ce que vous êtes de droite ou de gauche ?" de Gaulle avait répondu : "Ce n'est pas la gauche la France, ce n'est pas la droite la France, je ne suis pas d'un côté, je ne suis pas de l'autre, je suis pour la France". Même lui refusait à être étiqueté comme de droite ou de gauche.

Mais ce qui est intéressant, c'est que ce "retour des droites" en Europe est très différent si on voit l'Italie, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique. Ce n'est pas la même affaire.

On parle de différentes droites, c'est sûr. C'est pour ça que j'ai titré sur la page de couverture il y a des droites conservatrices, populistes, libérales, réactionnaires.

Vous faites également un dossier sur Henri Michaux, l'homme du refus.

Henri Michaux, c'est un grand poète, un grand peintre, dont on a fêté l'anniversaire de sa mort l'année dernière. C'est un peu un clin d'œil. C'est quelqu'un qui ne supportait pas les hommages, ne supportait pas non plus les entretiens. C'était un homme du refus. Il disait non à tout et quelqu'un s'est amusé à publier un livre intitulé Donc c'est non. Il avait recueilli toutes les lettres de refus qu'avait adressées Henri Michaux aux personnes qui demandaient des entretiens ou des désaccords pour écrire des livres. Un grand, grand monsieur.

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