Si elle connait son interlocuteur, l’IA serait plus convaincante qu’un humain
Des universitaires établissent que des intelligences artificielles disposant d'informations sociologiques sur ses interlocuteurs sont plus à même que des humains à les faire changer d'avis sur des sujets de société.
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"La parole est le moyen par lequel l'Homme atteint la vérité" disait Aristote. Des enseignants de l’École Polytechnique fédérale de Lausanne et de l’Université de Princeton aux États-Unis ont cherché à mesurer la capacité de persuasion d’une intelligence artificielle, ici GPT-4, face aux arguments développés par un être humain. Outre la restitution d’informations qui ont été compilées lors de la phase d’entraînement des algorithmes, il s’agit d’étudier si ces derniers sont en mesure de développer un raisonnement percutant qui conduirait son interlocuteur à changer d’avis sur un sujet donné.
Une capacité à débattre et à convaincre
Cette étude a été publiée fin mai 2025 par l’édition de la revue scientifique Nature spécialisée dans la recherche en sciences sociales et comportementales. Elle porte sur 900 personnes majeures de tous âges, homme et femmes globalement à parité, installées aux États-Unis. Il s’agit de les faire débattre sur des sujets de société qui font partie du débat public dans ce pays.
Par exemple : Est-ce que l’exploration spatiale est un investissement utile pour l’Humanité ? L’enseignement de l’art à l’école est-il aussi important que les sciences ou les mathématiques ? Faut-il des limites à la liberté d’expression pour interdire les appels à la haine ? Chaque citoyen doit-il recevoir un revenu universel ? Faut-il un service militaire obligatoire ? L’école publique doit-elle être gratuite ?
À chaque fois, les participants disposaient de quatre minutes pour exposer leur point de vue, trois minutes pour réfuter les arguments de leur contradicteur et trois minutes pour conclure. Et les débatteurs pouvaient être soit des humains, soit le modèle de langage GPT-4.
Des arguments personnalisés
On constate évidemment la capacité des algorithmes à bâtir un argumentaire en s’appuyant sur des exemples concrets en développant des prises de position. Mais là où le modèle de langage (LLM) devient nettement plus convaincant c’est lorsqu’il dispose en amont d’éléments sociologiques sur ses interlocuteurs. C’était le cas pour une partie du panel dont il connaissait l’âge, le genre, les opinions politiques (Républicains, Démocrates, Indépendant, sans étiquette), le niveau d’étude ou le statut professionnel (étudiant, chômeur à la recherche ou non d’un emploi, salarié, retraité, etc.).
L’intelligence artificielle développe alors des argumentaires personnalisés fondés sur le profil sociologique de chacun. Elle devient plus convaincante que l’humain dans 64% des cas. Moins le sujet est polarisant plus elle semble être persuasive. Les universitaires estiment que lorsque l’IA est informée du profil individuel de son public, elle a presque 82% de chances supplémentaires de parvenir à lui faire changer son point de vue initial sur le thème discuté, et de le rallier à son avis. Même sans ce profilage l’intelligence artificielle se révèle toujours plus persuasive que l’humain.
Discuter avec une IA, et alors ?
L’étude nous apprend que dans 3 cas sur 4 les panélistes ont deviné qu’ils interagissaient avec un automate. Et que malgré cela ils admettaient avoir été convaincus par le raisonnement qui leur était opposé. Au point de changer leur opinion sur le sujet discuté.
On conçoit facilement les enseignements de ce travail universitaire : l’organisation à grande échelle et de manière automatisée de façonnage sur mesure des informations et messages qui seront adressés aux individus selon qu’on les vise en tant que consommateur, électeur ou salarié. Les données sociologiques qui ont servi à renseigner GPT-4 dans le cas de cet essai académique sont des informations largement accessibles aux gestionnaires des grandes plateformes numériques pour la plupart de la population.
Ce qui renvoie, avec aujourd’hui des moyens largement augmentés par l’IA, au scandale Cambridge Analytica qui avait exploité les données des utilisateurs de Facebook, notamment dès 2015 lors des primaires présidentielles du Parti Républicain aux États-Unis. Afin d’adresser des messages politiques hyperciblés et d’orienter leurs suffrages.
Cette étude de l’École Polytechnique de Lausanne n’intéresse donc pas que les spécialistes de l’intelligence artificielle mais bien tous les citoyens que nous sommes.
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