Voies réservées au covoiturage à Paris : "Est-ce qu'on a envie de covoiturer sur des trajets du quotidien ?", interroge Jean Viard
À partir de ce 1er mars démarre une expérimentation de 6 mois sur le périphérique parisien et les autoroutes autour de Paris, la mise en place de voies réservées au covoiturage, c'est-à-dire aux véhicules avec au moins deux occupants à bord. Jean Viard s'interroge sur l'envie de covoiturer tous les jours sur de petits trajets et les réels enjeux derrière cette mesure.
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Sur ces voies, les taxis et les bus pourront aussi circuler, mais uniquement en semaine et aux heures de pointe. Le but de ces voies est de fluidifier le trafic et de réduire la pollution. La voie réservée est mise en place dans le cadre d'une "expérimentation" sans date de fin, selon la mairie de Paris qui s'est engagée à publier régulièrement des indicateurs de suivi, comme elle l'a fait pour la baisse de la vitesse maximale à 50 km/h sur le périphérique.
franceinfo : Est-ce qu'il faut changer nos modes de conduite ?
Jean Viard : Qu'il faille s'adapter, c'est sûr, et d'ailleurs ces voies réservées sont déjà pratiquées à Lyon, à Lille, à Grenoble et aux États-Unis dans certains endroits. Donc le modèle n'est pas complètement nouveau. Après, il y a deux questions différentes. Il y a la congestion et la pollution. Ce n'est pas le même sujet. S'il n'y a que des voitures électriques, d'une certaine façon, on peut toujours avoir la congestion, mais plus la question de la pollution. On a trop tendance à mélanger les deux questions. Je pense que la vraie question, c'est le parc électrique et donc la pollution. Ensuite, on est sur une question de congestion, c'est-à-dire est-ce que ça va modifier les comportements des citoyens ? Il faut rappeler quand même que Paris c'est 2 millions d'habitants et qu'il y a tous les jours un million de salariés qui rentrent dans la ville et 2 ou 3 millions d'autres personnes. Le périphérique, il est entre tout ça. Donc, essayer, pourquoi pas, mais la vraie question c'est : est-ce qu'on a envie de covoiturer sur des trajets du quotidien ? Quand c'est tous les jours, c'est autre chose, parce qu’on rentre dans l'intimité d'un quotidien et est-ce qu'on a envie de se voir tous les jours avec un voisin de palier ? Ce n'est pas sûr du tout.
Il y a aussi la question des contrôles. Comment vérifie-t-on le fait qu'il y ait au moins deux personnes dans un véhicule ?
Alors ailleurs, il n'y a pas vraiment de contrôle. Exceptionnellement, il y a un policier sur un pont, mais en réalité il n'y a pas vraiment de contrôle. Par contre à Paris, ils ont mis des caméras, ils ont fait des efforts technologiques pour essayer de contrôler. Après, ça renvoie toujours à la même question de cette société où on vous contrôle partout, où on met des radars et cetera. Jusqu'à quel point c'est le rôle de l'État ? Je trouve que c'est très compliqué, parce que ce sont des décisions au fond où on n'a pas vraiment débat. La France, là-dessus, est un pays extrêmement réglementaire, extrêmement contrôlé. Si c'est efficace, pourquoi pas, mais ça aurait pu faire un peu peut-être un peu plus sujet à discussion.
Est-ce qu'on ne risque pas aussi de complexifier l'usage de la route ?
La voiture a eu le pouvoir sur la ville au fur et à mesure qu'on a inventé les voitures. Petit à petit, la ville c'était un parking à voitures. Aujourd'hui, la voiture recule et on se bat pour le vélo, les transports collectifs et cetera. Il faut que la ville se décongestionne parce qu’il n'y a pas que la pollution. La principale souffrance des gens, c'est le bruit. Voilà, c'est tous ces éléments qu'il faut avoir en main. Essayons, à chaque fois qu'on a une innovation, 6 mois après ou 2 ans après, de vraiment l'estimer sérieusement et d'être capable de revenir en arrière et de ne pas garder définitivement quelque chose de peu efficace.
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