Traitement du cancer du pancréas : "2025 sera peut-être l'année d'un réel espoir" selon le professeur Pascal Hammel

Article rédigé par Solenne Le Hen
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Le professeur Cindy Neuzillet présente son étude sur un vaccin contre le cancer du pancréas, lors du Congrès mondial sur le cancer, à Chicago, le 2 juin 2025. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Le professeur Cindy Neuzillet présente son étude sur un vaccin contre le cancer du pancréas, lors du Congrès mondial sur le cancer, à Chicago, le 2 juin 2025. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Plusieurs traitements sont à l'étude actuellement, pour lutter contre l'un des cancers les plus graves, celui du pancréas. Entre autres, un vaccin thérapeutique, testé à l'Institut Curie à Paris et présenté lundi au Congrès mondial sur le cancer, à Chicago, et un traitement sous forme de comprimés à l'hôpital Paul-Brousse de Villejuif.

Le cancer du pancréas se soigne toujours très mal : 16 000 nouveaux cas par an en France, 12 000 morts. Plusieurs études ont été présentées sur ce sujet lundi 2 juin lors du congrès annuel de la Société américaine d’oncologie clinique (ASCO), à Chicago. Le professeur Cindy Neuzillet, de l'Institut Curie à Paris, a détaillé les premiers résultats d'un vaccin thérapeutique français.

Ici, on voit grand, les présentations ne se déroulent pas dans de simples salles mais dans ce qui ressemble plutôt à des hangars. Celui-ci est à peu près de la même taille qu'un terrain de football. Le professeur Cindy Neuzillet présente les premiers résultats d'un vaccin thérapeutique français, qui cible différents antigènes, des protéines qui peuvent être détectées par le système immunitaire et qui sont présentes dans les cellules tumorales. "Ce vaccin avait déjà montré des résultats positifs pour soigner le cancer du poumon et on a voulu le tester pour le cancer du pancréas".

Une centaine de malades partout en France, à un stade avancé de la maladie, ont eu accès à ce traitement. Les résultats sont mitigés. D'un côté ils sont bons, car plus de la moitié des patients sont encore vivants un an après. Mais, étonnamment, les chiffres sont également bons dans le groupe "contrôle", celui des malades qui n'ont pas reçu ce vaccin. "Le bénéfice potentiel du vaccin est donc à tempérer. On se dit qu'il faut attendre d'avoir un peu plus de maturité pour pouvoir identifier un signal un peu plus tardif en termes d'efficacité", explique le professeur Cindy Neuzillet.

Plusieurs types de vaccins sont ainsi à l'essai pour vaincre le cancer du pancréas. Il est l'un des plus difficiles à combattre car il est très adaptable qui résiste à la plupart des traitements qui fonctionnent pour d'autres cancers.

Un essai clinique prometteur

D'autres pistes sont testées, notamment une thérapie ciblée. Le professeur Pascal Hammel, à l'hôpital Paul-Brousse de Villejuif, dirige cet essai clinique sur un médicament qui contrecarre le gène KRAS, présent chez la plupart des malades et qui est le moteur du cancer. Les premiers résultats sont prometteurs, et les médecins espèrent que ce médicament réussisse à bloquer la progression du cancer et à faire mieux que la chimiothérapie actuellement utilisée. "Il faut évidemment que l'étude se termine et qu'on attende les résultats, tout ça prend un peu de temps, nuance le professeur Hammel. Mais c'est un vrai espoir dans le cancer du pancréas : voilà plus de trente ans que je m'occupe de cette maladie et c'est la première fois que j'ose le dire et que j'ai osé l'écrire, parce que je l'ai vu de mes propres yeux, avec nos collègues américains. Tout n'est pas parfait mais c'est quand même, à mon avis, la source de progrès dans le futur contre cette maladie. C'est l'une des plus graves en termes de cancer, ce sera la deuxième cause de mortalité par cancer en 2040. Et c'est l'une de celles contre lesquelles la recherche a progressé le moins vite."

"Il se passe réellement quelque chose"

Ce nouveau médicament est testé notamment par des patients français, dont Nathalie. Diagnostiquée fin janvier d'un cancer du pancréas métastasé, elle avale tous les jours ces trois comprimés bleus. Il est trop tôt pour dire si ce traitement fonctionne sur elle, mais elle est en tout cas très heureuse de pouvoir le tester. "C'est une très grande chance surtout quand on a une pathologie comme la mienne, reconnaît Nathalie.

Dans le cadre d'un essai clinique, Nathalie, atteinte d'un cancer du pancréas, prend tous les jours trois de ces comprimés. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Dans le cadre d'un essai clinique, Nathalie, atteinte d'un cancer du pancréas, prend tous les jours trois de ces comprimés. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"Aujourd'hui, les chances de survie ne sont pas extraordinaires avec ce cancer et en tout cas pas très longues, dit Nathalie. Quand j'ai appris que j'étais malade, je commençais à me préparer à l'idée de ne plus avoir énormément de temps devant moi et ma famille s'y préparait difficilement aussi. Ce médicament, ça a été l'ouverture d'une perspective infiniment plus plaisante."

"J'ai bien conscience que c'est un essai, qu'il y a un certain nombre de choses qu'on ne maîtrise pas encore. Mais, pour moi, c'est de l'espoir et la capacité à refaire des projets aussi."

Nathalie, patiente atteinte d'un cancer du pancréas

à franceinfo

"Je ne sais pas si je peux le dire comme ça, c'est peut-être un petit peu naïf et un petit peu optimiste mais j'avais l'impression d'avoir un mur devant moi et plus aucune possibilité de faire des projets, poursuit Nathalie. Là, depuis que j'ai repris ce médicament, je commence à prévoir à nouveau un certain nombre de choses, comme préparer mes vacances d'été."

De nombreuses autres pistes sont à l'étude en France et dans le monde. "Il y a encore du travail mais c'est vrai que 2025 sera peut-être l'année d'un réel espoir, lance le professeur Pascal Hammel. Le mot 'espoir', le mot 'prometteur', on les utilise depuis trente ans dans le cancer du pancréas. Là, je peux vous dire qu'il se passe réellement quelque chose." Mais il faudra faire preuve de patience, le temps de confirmer ces premiers espoirs, tempère le professeur Cindy Neuzillet. "Il faudra du temps pour pouvoir aboutir à des stratégies thérapeutiques clé en main, qui pourront être utilisées auprès des patients. Mais ça bouge et il faut rester sur ce message d'espoir."

Traitement du cancer du pancréas : "2025 sera peut-être l'année d'un réel espoir". Reportage de Solenne Le Hen

 

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