Crise de l'hôpital : "On manque d'un projet cohérent pour financer notre système de santé", estime un infectiologue
"C'est un système qui n'est pas bon, qui est inflationniste, qui coûte très cher et donc il faut le changer", juge Benjamin Rossi, en pleine journée de mobilisation des soignants.
"On manque d'un projet cohérent pour financer notre système de santé aujourd'hui", a affirmé mardi 7 juin sur franceinfo Benjamin Rossi, infectiologue à l'hôpital Robert-Ballanger d'Aulnay-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, alors que neuf syndicats et collectifs hospitaliers organisent une journée de mobilisation ce mardi pour réclamer des hausses de salaires et d'effectifs sans attendre le résultat de la "mission flash" commandée par Emmanuel Macron.
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Benjamin Rossi pointe le paiement à l'acte qui a eu pour conséquence d'avoir "un hôpital endetté". Il faut, selon lui, "changer" le système pour "retrouver un souffle", sans quoi il alerte : "Le jour où le système va s'effondrer, la santé va coûter cher pour tout le monde."
franceinfo : comment va votre hôpital ?
Benjamin Rossi : il ne va pas très bien, un peu comme tous les hôpitaux. Nos urgences ont été fermées pendant les dernières vacances par manque de soignants. On a des fermetures de services. Dans le service des maladies infectieuses, on a un tiers des lits qui sont fermés depuis plus d'un an dans le silence général. Il y a les services de chirurgie qui ferment. On privatise la radiologie. Puisque cela rapporte de l'argent, des fonds d'investissement se mettent dedans et récupèrent tous les secteurs qui gagnent de l'argent. Donc ce sont des solutions court-termistes puisque cela va endetter encore plus l'hôpital à long terme. On ne peut pas dire que cela va bien.
De quoi manquez-vous aujourd'hui dans votre hôpital ?
On manque d'un projet cohérent pour financer notre système de santé. On se rend compte que l'on paie très cher des gens qui font de la médecine beaucoup moins importante, pour des patients qui ne sont pas hospitalisés, qui vont surcoter leurs actes et tout cela est remboursé par la sécurité sociale. Mais ce qui est primordial n'est pas valorisé. En conséquence, l'hôpital se retrouve endetté. On dit que l'on ne peut pas augmenter les salaires, que l'on ne peut pas rivaliser avec les prix proposés pour les médecins dans le privé, en fait il faut un système cohérent où il y a une égalité entre les spécialistes. Ce n'est pas normal que certaines spécialités comme la psychiatrie, la pédiatrie, ne fonctionnent pas parce qu'elles sont sous dotées puisque c'est de la consultation et que l'on paie très cher d'argent public des radiologues. Il faut retrouver un souffle. Pour la solution pour les urgences, je propose de prendre tout l'argent qui est donné aux vacataires, puisque ce sont des milliers d'euros pour une journée de travail, versus 250 euros pour les temps plein, et de le redistribuer aux équipes qui sont en place. C'est une solution à court terme qui permettrait déjà de stimuler, de réembaucher à l'hôpital.
Est-ce qu'il faut tout revoir à l'hôpital, tout réformer ?
Bien sûr. Depuis qu'il y a cette cotation à l'activité qui a été mise en place en 2008, tout le monde dit que cela ne marche pas, cela ne peut pas fonctionner. Ce système est un système inflationniste. Les gens qui font des actes vont faire plein d'actes même s'ils ne sont pas nécessaires, puisque ce sont eux qui décident de les faire ou non, et ils vont faire un maximum d'argent. Et là où c'est primordial de faire des actes, ils sont en compétition avec des gens qui font des actes pas nécessaires. Donc on ne fait qu'appauvrir les gens qui le font raisonnablement. C'est un système qui n'est pas bon, qui est inflationniste, qui coûte très cher et donc il faut le changer. On ne nous écoute pas parce que je pense que des gens ne savent pas comment aborder le problème.
"Nos hommes politiques ne comprennent pas comment fonctionne notre système de santé. C'est ça qui est inquiétant."
Benjamin Rossi, infectiologue à l'hôpital Robert-Ballanger d'Aulnay-sous-Bois en Seine-Saint-Denisà franceinfo
Attendez-vous quelque chose de la mission "flash" lancée par Emmanuel Macron ?
S'il faut faire des missions flash pour comprendre la base, c'est-à-dire comment on fait pour rééquilibrer, pour passer l'été… Je n'attends pas grand-chose de cette mission. A un moment ou un autre, il faut prendre des décisions et prendre des décisions, c'est faire des paris. Je crois qu'il faut faire le pari de la confiance dans les soignants. Aujourd'hui, on a un système administratif qui est tellement compliqué, qui coûte tellement cher, qu'il faudrait peut-être l'alléger un petit peu. C'est aussi le pari du système public, parce que je crois que c'est un bien commun et qu'on a tous intérêt à ce que cela fonctionne. Le jour où il va s'effondrer, la santé va coûter cher pour tout le monde, beaucoup plus cher. Donc, il faut vraiment trouver un système. C'est vraiment dans l'intérêt de tous les Français.
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