"Cet état de stress, on l'a gardé pendant des mois" : durement atteint par le coronavirus, un Ehpad de la Meuse tente de retrouver une vie normale
Les séquelles de l'épidémie de coronavirus sont encore visibles dans de nombreux Ehpad, où les personnels étaient au bord de l'épuisement. Dans la Meuse, les résidents et personnels de la maison de retraite tentent de surmonter le traumatisme.
Depuis la mi-juin, les résidents de la maison de retraite Jacques Barat-Dupont, à Sommedieue, dans la Meuse, peuvent à nouveau se réunir dans le hall central. Ils y regardent la télévision, jouent aux mots fléchés, comme si de rien était. Pourtant, les séquelles de l’épidémie de Covid-19 sont toujours là. L'établissement a été très lourdement touché par le coronavirus : 22 résidents sur 83 sont décédés des suites du coronavirus. Au total, l'épidémie a fait 30 morts en l'espace de quelques mois.
Un traumatisme profond
Afin d'aider le personnel, une cellule psychologique de Verdun intervient dans l'établissement. Le traumatisme est multiple et profond. "Cet état de stress, d'hyper-vigilance, on l'a gardé pendant des mois, explique la psychologue Stéphanie Granger. C'est ça qui fait que c'est vraiment particulier. Et donc, ayant conscience de ça, la cellule d'urgence nous a bien précisé qu'on commençait les groupes maintenant, mais qu'on ne savait pas quand cela allait se terminer."
Preuve de la difficulté à surmonter cette étape : il y a un mois, le médecin coordonnateur a quitté la maison de retraite. "Il était là depuis quatre ans, témoigne Sandrine Lhotte Sidoli, la directrice de l'établissement. Il m'a dit 'je romps mon contrat, je ne peux plus, je ne peux pas revivre ça'. En tant que médecin, il avait l'impression d'avoir loupé des choses".
C'est une expérience qu'on ne veut pas revivre.
Sandrine Lhotte-Sidoli, directrice de l'établissementà franceinfo
La crainte et les souvenirs sont toujours là, même si le personnel doit tout faire pour ne pas le montrer aux nouveaux résidents qui sont accueillis. Pendant la crise, les yeux de Christelle Giraud, infirmière, trahissaient son anxiété. La voici reposée, mais toujours marquée : "On fait une nouvelle entrée, et malheureusement, lorsqu'on arrive dans la chambre, on se dit 'c'était telle personne qu'on a accompagnée ou qu'on n'a pas pu accompagner... Il y a toujours des choses qui nous font y repenser."
Une cérémonie pour braver le silence
Alors, pour tenter de soulager les équipes et les familles des résidents décédés, une cérémonie, financée par la Fondation de France, sera organisée au mois de septembre. Une façon de braver le silence. "L'absence de symbole dans la mort, l'absence de parole, c'était ça le plus difficile, confie la psychologue Stéphanie Granger. Quand on le prépare, on se dit qu'on n'a pas fini de pleurer. On sait que ce sera un temps où on sera obligé de s'arrêter et de parler, c'est important."
Un moment important aussi pour les résidents qui ont vu certains de leurs amis partir au fur et à mesure. Au deuxième étage, dans la chambre de Berthe Lombard, 95 ans, il y a des dizaines de photos de sa famille. "Cela m'a choquée quand même", confie la résidente.
Parmi les personnes avec qui je jouais, trois d'entre-elles sont décédées, alors ma foi, c'est malheureux. Espérons que ça ne revienne pas.
Berthe Lombard, résidenteà franceinfo
Dans les propos de ces personnes bientôt centenaires, il n'y a pas de peur, mais une peine retenue. Espérance Ciérpalkowski a 93 ans : "Je l'ai appris un peu tard, explique-t-il. Mes deux voisines, elles déjeunaient tous les jours avec moi, on avait fini par bien s'entendre... J'ai été très choqué. Chacun fait ce qu'il veut, mais moi, j'y pense, tous les jours." Les résidents et le personnel doivent désormais composer avec ce drame qui aura marqué l'histoire de cette maison de retraite.
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