Santé : comment des médicaments indiqués pour une maladie sont "réutilisés" pour traiter d'autres pathologies
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Plusieurs médicaments ont des effets bénéfiques sur des pathologies différentes de celles pour lesquelles ils ont été conçus. Ce procédé est régulièrement testé par des laboratoires et des chercheurs, car il permet notamment d'accélérer la mise en place d'un traitement et de réduire les coûts.
Certains effets secondaires d'un médicament peuvent-ils être bénéfiques pour traiter d'autres maladies ? Citons par exemple l'aspirine, le baclofène ou encore le Viagra (sildénafil). C'est parfois le fruit d'une découverte fortuite ou de séries de tests sur une molécule pour en tirer d'autres effets thérapeutiques.
On parle alors de "réutilisation" ou de "repositionnement" de médicaments, un procédé largement utilisé par les laboratoires pharmaceutiques, pour gagner du temps et réduire les coûts. Plusieurs traitements ont vu le jour par ce biais, et les regards se tournent vers des maladies plus difficiles à traiter, notamment neurodégénératives, comme Parkinson ou Alzheimer.
Le développement d'un médicament est un processus assez complexe, il consiste en partie à synthétiser une molécule. Et il existe plusieurs stratégies. Un laboratoire va par exemple "développer une molécule qui a pour but de cibler un récepteur. Le récepteur, c'est ce qui va en quelque sorte soigner la maladie, c'est la cible, explique Sonia Khier, docteure en pharmacie et maîtresse de conférences à l'université de Montpellier. Et au cours des essais cliniques, on peut se rendre compte qu'il y a d'autres effets, qu'on appelle les effets secondaires, les effets inattendus."
Retravailler chimiquement la molécule
Ces effets sont souvent indésirables, ils ne soignent pas la maladie. Mais pendant le développement du médicament, les chercheurs peuvent constater que les effets indésirables chez le patient peuvent être bénéfiques dans une autre situation. Ce procédé est testé pour tout un tas de pathologies, des maladies génétiques aux maladies orphelines. "Je travaille sur une maladie orpheline sur les enfants, qui provoque des gros hématomes vasculaires et des déformations. C'est une maladie génétique difficile à soigner, il n'y a pas de traitement spécifique", explique Sonia Khier.
"Pour traiter les symptômes, on se sert d'autres médicaments utilisés par exemple en cardiologie, qui ont d'autres visées thérapeutiques, mais qui ont aussi des effets vasculaires. Et dans le cas de cette maladie orpheline, leurs effets secondaires sont bénéfiques."
Sonia Khier, docteure en pharmacieà franceinfo
Cela peut également être une stratégie à part entière. Dans le cas, par exemple, où l'effet d'un médicament est intéressant, le médicament peut être retravaillé avec une autre posologie, car il y a une question de dose à adapter. "C'est arrivé en cardiologie, pour certains médicaments, dont un effet secondaire était l'hypotension, poursuit la chercheuse. Cela peut être embêtant si vous prenez un médicament pour renforcer les battements cardiaques, parce que vous pouvez avoir des vertiges. Sauf que l'hypotension peut être un effet intéressant pour les personnes qui ont une hypertension. On va donc retravailler la dose pour améliorer l'effet thérapeutiquement attendu."
Autre piste : retravailler chimiquement la molécule, avec de légères modifications de structure, pour tenter d'intensifier l'effet secondaire inattendu que l'on voudrait utiliser dans la nouvelle application, et diminuer le reste. Des essais cliniques sont ensuite évidemment nécessaires, dont des essais in vitro (en milieu artificiel).
"On part avec une connaissance"
Le repositionnement de médicaments existants présente certains avantages. "On n'a pas à remonter tout un dossier complexe avec des essais de tolérance qui sont très coûteux, précise Patrick Couvreur, professeur émérite en biopharmacie à l'université Paris-Saclay. On part avec une connaissance de la tolérance et de la toxicologie du médicament. Cela rassure les agences sanitaires. Il y a plus de chances de mettre un médicament pour cette indication sur le marché que de faire la découverte d'un nouveau médicament."
"Il y a un grand avantage en termes de rapidité quand on se trouve dans une situation où il y a un besoin urgent pour les patients."
Patrick Couvreur, professeur émérite en biopharmacieà franceinfo
Mais agir dans l'urgence comporte son lot de risques. La crise sanitaire du Covid-19 en est une illustration récente. "On a essayé de trouver des antiviraux avec de vieilles molécules pour pouvoir aller très vite, et on a vu fleurir un nombre de propositions absolument incroyables, avec des tests tous azimuts, sans base scientifique très cohérente", rappelle ce professeur. "Parfois, ce sont des start-ups qui se lancent dans un projet en n'ayant pas suffisamment de données fondamentales objectivables."
Des projets de repositionnement qui continuent néanmoins à voir le jour, comme récemment la piste d'une combinaison de médicaments contre le diabète pour ralentir, voire inverser les effets de la maladie de Parkinson. Des chercheurs de l'hôpital Necker de Paris ont, eux, découvert qu'un médicament utilisé contre le cancer du sein pouvait être efficace contre le syndrome de Cloves, une maladie provoquant des déformations du corps.
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