Violences envers les médecins : "Ma secrétaire reçoit des crachats", témoigne le docteur Marc Rozenblat, médecin généraliste
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Lundi 29 septembre, le docteur Marc Rozenblat, médecin et secrétaire général adjoint du syndicat des médecins libéraux, était l'invité du 11/13. Il raconte son quotidien en tant que soignant en 2025, alors que le Conseil national de l’Ordre des médecins a publié, lundi 29 septembre, son Observatoire annuel de la sécurité des médecins. Les résultats de 2024 sont préoccupants : les actes de violence envers les médecins ont augmenté de 26 % par rapport à 2023.
Ce texte correspond à la retranscription d'une partie de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
Lucie Chaumette : Dans votre pratique quotidienne, est-ce que vous avez vous-même été parfois agressé verbalement ou physiquement ?
Marc Rozenblat : Vous avez vu mon gabarit. Physiquement, c'était peut-être un peu compliqué. Malgré tout, une fois dans ma carrière (ça fait 35 ans que j'exerce) j'ai été agressé physiquement. Ça a été jusqu'à une plainte auprès de la police. Et sinon verbalement, c'est au quotidien. Sur une trentaine de patients que je vois par jour, j'ai à peu près deux ou trois agressions verbales.
Et c'est quoi ces agressions verbales ? Ce sont des insultes, c'est autre chose ?
C'est parce qu'on a trois minutes de retard, c'est parce qu'on n'a pas fait les papiers qui convenaient à la demande du patient, à son motif... Le plus important, ce n'est pas trop moi, mais c'est surtout mon secrétariat. Nous avons même été obligés de mettre une vitre transparente pour éviter que ma secrétaire ne reçoive en permanence des crachats. Et donc des insultes, elle en a tous les jours, mais maintenant c'est de pire en pire.
Donc vous voyez vraiment cette situation s'aggraver ?
Totalement, oui. Comme vous voyez les chiffres, ça a augmenté d'un quart quand même par rapport à l'année précédente. C'est à cause de l'exigence de la part de notre patientèle. Pas pour tous, bien sûr, mais pour certains. Notamment des gens qu'on ne connaît pas, qui nous sont adressés comme médecins correspondants et qu'on voit pour la première fois, et qui ont beaucoup d'exigences.
Est-ce que vous avez l'impression que la situation générale dans votre pratique a changé, qu'elle pourrait justifier que certains s'énervent plus ou dépassent les bornes ? Ou finalement, ça fonctionne comme avant et vous avez du mal à vous expliquer que certains aillent si loin dans l'agression physique ou verbale ?
C'est notre mode d'exercice qui est un peu particulier. Comme vous le savez, lorsqu'on exerce, notamment en libéral, il n'y a uniquement deux actes dans une consultation qui sont pris en charge par l'assurance-maladie. Donc, quand les gens viennent, par exemple, pour cinq ou six motifs de consultation, on leur explique que ça va être compliqué de tout gérer, qu'il y a d'autres personnes et qu'il faudra probablement les revoir. Donc déjà, ça met un malaise dans le colloque singulier qu'on peut avoir avec notre patient. Donc il va falloir faire un choix de priorités lorsqu'ils viennent avec plusieurs motifs de consultation. Bien évidemment, on essaie de faire au maximum, mais l'assurance-maladie ne rembourse qu'un seul acte à taux plein. Le deuxième acte est remboursé à 50 %. Quand vous allez dans une boulangerie et que vous demandez un petit pain au chocolat et un croissant, vous payez le plein pot pour les deux. En médecine, ce n'est pas comme ça.
Vous, vous êtes limité par ça et ça donne le sentiment à vos patients d'un refus de soins presque ?
Presque. Et que les motifs autres pour lesquels ils venaient, on ne veut pas s'en occuper alors qu'on veut bien les prendre en charge. Mais c'est un problème de temps aussi. Beaucoup de gens réclament et essayent de trouver des médecins. On essaie d'en voir le maximum. Je ne dis pas qu'on fait de l'abattage, mais il faut aussi répondre à la demande de tout le monde. Et lorsqu'on est au-delà de deux motifs de consultation, on leur dit : revenez pour autre chose.
C'est quoi la solution à ça, d'après vous ?
Il n'y a pas de solution magique, mais il faudrait qu'on puisse avoir du temps à consacrer à chacun des patients pour tous les problèmes pour lesquels ils viennent nous voir. Et pour cela, forcément, en contrepartie du temps, c'est de l'argent. Comme vous le savez, la consultation médicale en France est une des plus basses d'Europe, même si ça a augmenté ces dernières années de manière importante. 30 euros, je crois qu'on est les avant-derniers avant l'Albanie. D'autres pays sont largement au-dessus de 50 euros, mais encore faut-il que notre système puisse amortir ça. Et puis il y a aussi les complémentaires santé. Mais il n'y a pas que le problème d'argent, c'est un problème de temps.
Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
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