Blocage des sites de streaming : utopie ou réalité ?
Le tribunal de grande instance de Paris a ordonné jeudi soir aux fournisseurs d'accès à Internet et aux moteurs de recherche de bloquer l'accès à 16 sites de streaming de la galaxie Allostreaming, à la demande d'organisations professionnelles de cinéma. Le résultat d'une longue procédure, mais surtout une première dans le monde. Pour autant, est-ce réellement possible ? L'expérience montre plutôt le contraire.
L'annonce jeudi soir du blocage de seize sites de streaming (voir la liste ci-dessous), bien connus des internautes, a été vécue comme une victoire par les associations qui avaient introduit une plainte devant le tribunal de grande instance de Paris. L'Association des producteurs de cinéma, la Fédération nationale des distributeurs de films et le Syndicat des éditeurs de vidéo numérique ont salué dans un communiqué "une étape décisive dans la lutte contre le piratage des films sur Internet ".
[null,null] Décision TGI affaire Allostreaming publié par Clubic.comLes sites visés par le blocage sont : dpstream.tv , fifostream.tv , allostreaming.com , alloshowtv.com , allomovies.com , alloshare.com , allomegavideo.com , alloseven.com , allourls.com , fifostream.com , fifostream.net , fifostream.org , fifostreaming.com , fifostreaming.net , fifostreaming.org , fifostreaming.tv .
Google, Yahoo! et Microsoft pour les moteurs de recherche, SFR, Orange, Free, Bouygues Telecom, Numericable et Darty Telecom du côté des fournisseurs d'accès à Internet (FAI) ont désormais quinze jours pour se mettre en conformité avec la décision, et ce pour une durée d'un an.
Réactions contrastées
La plupart des FAI et des moteurs de recherche ont refusé de commenter la décision de justice ce vendredi. C'est la règle. Google France a produit un communiqué de quelques lignes à peine : "Nous sommes déçus par la décision du tribunal. Nous demeurons engagés aux côtés des ayant-droits pour les aider à combattre le piratage sur l'ensemble des outils Google [...] ".
Seul Orange a pris la parole. Paradoxalement, le directeur des contenus, David Grosz, a reconnu que le rôle du groupe n'est pas de "faire la police du Net ". Mais il s'est dit satisfait du "rôle central " du juge dans cette affaire, qui pourra ultérieurement étendre le blocage au-delà des 16 sites visés pour l'instant.
Une censure dénoncée
La réaction est sensiblement différente du côté de la Quadrature du Net. L'organisation lutte pour les droits des internautes. Son fondateur Jérémie Zimmermann parle d'une "censure ".
Selon la décision de justice, précisons néanmoins que les frais mis en oeuvre pour parvenir à ce blocage, y compris dans la suppression des résultats faisant apparaître un site appartenant à Allostreaming dans les moteurs de recherche, ne peuvent être supportés par ces derniers, comme par les FAI.
Des moyens de contourner le blocage
L'une des raisons de la fraîcheur des réactions tient évidemment à un état de fait : pour un internaute averti, le blocage peut être contourné, plus ou moins aisément. Plusieurs exemples existent, détaillés par Antoine Duvauchelle, journaliste sur le site spécialisé ZDnet.fr :
L'utilisation d'un VPN pour maquiller son adresse IP, et "faire croire" qu'on accède à Internet depuis l'étrangerL'utilisation d'un serveur DNS alternatifLe plus compliqué : utiliser le logiciel de routage Tor, sachant que beaucoup de sites ne le reconnaissent pas Les sites visés par la décision de justice eux-mêmes ont déjà réagi au blocage programmé, en changeant leur nom de domaine, tout simplement. Où apparaît aussi le concept de "site-miroir", comme l'explique Antoine Duvauchelle.
Des solutions existent du côté des FAI pour dénoncer de tels sites-miroirs, mais il faudra quoi qu'il arrive recourir une nouvelle fois à la justice. Sachant que la procédure qui vient d'aboutir aura duré près de deux ans.
Rendre l'illégal... légal
Alors finalement, puisque chacun s'accorde à dire que le blocage des sites de streaming n'est pas la solution idoine, en existe-t-il vraiment une ? Comme pour la musique, halte au "jeu du chat et de la souris", place aux plate-formes de streaming légales, via un système de licence globale - l'abonné paie une taxe, par exemple, sur son abonnement - ou en redistribuant de l'argent aux ayant-droits, éditeurs de séries ou de cinéma.
C'est d'ailleurs tout le sens de la mission menée actuellement par la Hadopi, qui s'intéresse plus que jamais aux modes d'accès aux productions cinématographiques, ou aux séries, de façon légale sur le Web.
En attendant, ceux qui regardaient des séries ou des films en streaming de façon illégale avant la décision du TGI jeudi soir, continueront un certain temps à le faire, par quelque moyen que ce soit. La justice, qui a finalement rappelé le droit et sa stratégie de lutte contre le piratage, ne peut pas aller aussi vite qu'Internet.
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