"S’il y a eu la fin de l'esclavage, c'est qu'il y a eu des hommes et des femmes qui se sont levés contre ces injustices", rappelle Lilian Thuram
Le 10 mai est la journée internationale des mémoires de la traite, de l'esclavage et de leur abolition.
"S’il y a eu la fin de l'esclavage, c'est qu'il y a eu des hommes et des femmes qui se sont levés contre ces injustices", a rappelé lundi 10 mai sur franceinfo l'ancien footballeur Lilian Thuram, aujourd’hui président de la Fondation éducation contre le racisme. À l’occasion de la journée commémorant l'abolition de l'esclavage, Emmanuel Macron préside une cérémonie marquée par les 20 ans de la loi Taubira, qui reconnut comme crime contre l'humanité la traite et l'esclavage.
franceinfo : Parle-t-on assez aujourd’hui de l’esclavage ?
Lilian Thuram : On en parle mal, parce que très souvent lorsqu'on parle de l'esclavage, on a tendance à laisser croire que c'est une confrontation entre personnes de couleurs différentes, alors que l'esclavage est un système économique. Donc il faut l'analyser et essayer de comprendre comment une minorité de personnes cupides ont construit l'idée qu'il y aurait des êtres inférieurs et qui ont légitimé à travers des lois l'infériorité de certains et la supériorité d'autres.
Pour certaines personnes, cela reste encore difficile, parce que nous sommes enfermés dans l'idée que l'esclavage est une confrontation entre personnes de couleurs différentes. Il faut sortir de cette réflexion. L’esclavage est vraiment une invention économique et une idéologie politique. S’il y a eu la fin de l'esclavage, c'est qu'il y a eu des hommes et des femmes qui se sont levés contre ces injustices pour nous permettre de vivre une société plus égalitaire.
Qu’est-ce qui a changé depuis la loi Taubira en 2001 ?
Je pense qu'effectivement, aujourd'hui, il y a des professeurs qui travaillent sur ces sujets, il y a des recherches. Aujourd'hui, il y a une fondation pour la mémoire de l'esclavage. En Guadeloupe, il y a un musée qui traite de l'esclavage. Donc les choses avancent, bien évidemment. Je fais partie des personnes qui voudraient que les choses avancent plus rapidement, parce que je reste persuadé que cette période historique nous permet de comprendre la société dans laquelle nous vivons et le monde dans lequel nous vivons. Si vous voulez comprendre le monde dans lequel nous vivons, il est bien évident qu'il faut connaître l'histoire et connaître l'histoire, encore une fois, c'est l'analyser pour essayer de grandir ensemble.
Avez-vous été choqué de la manière dont on a commémoré les 200 ans de la mort de Napoléon, qui a été celui qui a rétabli l'esclavage en 1802 ?
Ce qui est très récent, c’est qu’il y a quelques années, peut-être que vous n'auriez pas signifié qu'il avait rétabli l'esclavage. Lorsque j'étais jeune adulte et que je parlais de Napoléon en disant que ce n'est pas quelqu'un qui pouvait représenter la société française, les gens me regardaient bizarrement. Je pense qu'aujourd'hui, il y a de plus en plus de personnes qui font le lien entre Napoléon et l'esclavage et qui se posent la question de savoir si on peut commémorer quelqu'un qui a rétabli l’esclavage en 1802.
Le gouvernement va créer une plateforme antidiscrimination et un conseil citoyen. Saluez-vous ces initiatives ?
Ce sont des avancées. Dans une société, il y a toujours aussi des personnes qui ne veulent pas de changement. Donc, tout changement va être questionné, va être refusé parfois. Je pense qu'il y a des personnes de bonne volonté. Nous devons faire en sorte que nous puissions grandir ensemble. Pour grandir ensemble, il faut construire des connaissances, partager des connaissances, partager une vision. La fin de l'esclavage c’est aussi pour mettre en avant liberté, égalité, fraternité, parce que s'il y a eu la fin de l'esclavage en 1794, c'est parce qu'il y a eu la Révolution française.
Cela veut dire aussi éviter les tensions qui traversent la société française ?
Participer, c'est comprendre. Si vous voulez comprendre les discriminations, c'est une évidence, il faut connaître l'esclavage. Si vous connaissez l'esclavage, vous allez tomber sur un texte, par exemple, le Code noir. Le Code noir va vous expliquer pas mal de choses. Après, vous allez tomber peut-être sur des livres scolaires qui datent de 1950, où on apprenait aux enfants en France qu'il y avait une race supérieure qui était la race blanche. Avec l'éducation, la compréhension, vous regardez les choses différemment et vous finissez par vous dire tout cela est absurde.
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