"On n'aura pas un prof devant chaque classe" : avant la rentrée scolaire, syndicats et parents d'élèves inquiets du manque de moyens annoncé

Le Snes-FSU, principal syndicat du second degré, a listé "près d'un millier de petites annonces" sur le site du ministère pour recruter des professeurs contractuels. Syndicats et parents dénoncent une crise "devenue structurelle".

Article rédigé par franceinfo
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Les trois quarts de collèges et lycées français (73%) ont fait leur rentrée scolaire cette semaine avec une équipe incomplète, selon l'enquête du Snes-FSU publiée le jeudi 4 septembre 2025. (VICTOR VASSEUR / RADIO FRANCE / FRANCEINFO)
Les trois quarts de collèges et lycées français (73%) ont fait leur rentrée scolaire cette semaine avec une équipe incomplète, selon l'enquête du Snes-FSU publiée le jeudi 4 septembre 2025. (VICTOR VASSEUR / RADIO FRANCE / FRANCEINFO)

À l'approche de la rentrée scolaire, des syndicats de l'enseignement et des représentants de parents d'élèves s'inquiètent du manque de moyens de l'Éducation nationale. "On va encore une fois bricoler", déplore jeudi 21 août sur France Inter Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré, dénonçant un manque de moyens.

"L'école est aujourd'hui à un point de bascule et il va vraiment falloir des mesures politiques très fortes, notamment en matière budgétaire, pour nous aider", alerte la professeure. "Il est hors de question, pour nous au Snes-FSU, qu'il y ait des suppressions de postes sur le budget 2026. S'il y en a, bien évidemment qu'on se mobilisera", avertit-elle.

"Les concours de recrutement n'ont pas fait le plein"

L'un des points noirs de l'Éducation nationale depuis quelques années est la difficulté de recrutement d'enseignants. "On n'aura vraisemblablement pas un prof devant chaque classe à la rentrée et tout au long de l'année", regrette Sophie Vénétitay. "On sait que les concours de recrutement n'ont pas fait le plein", rappelle-t-elle, disant avoir encore listé mercredi soir "près d'un millier de petites annonces" sur le site du ministère pour recruter des professeurs contractuels.

"Il y a évidemment beaucoup d'inquiétudes pour les parents d'élèves et les professionnels que nous sommes", relève Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du Syndicat national des personnels de direction de l'Éducation nationale (SNPDEN-Unsa). "Ça vient perturber les apprentissages, la vie de la classe, les repères des élèves", explique Grégoire Ensel, vice-président de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE). "Les parents voient bien qu'il y a un manquement important dans la continuité de l'éducation qui est offerte à leurs enfants."

"Nous voulons des pédagogues, enseigner, c'est un métier"

Grégoire Ensel pointe aussi du doigt une baisse de la qualité de l'enseignement en raison de ces remplacements par des personnels contractuels peu formés : "Il y a beaucoup de recrutements de personnels contractuels au fil de l'eau pour pallier les absences", regrette-t-il.

"On est en train de glisser petit à petit d'un enseignant devant chaque classe à un adulte devant chaque classe."

Grégoire Ensel, vice-président de la FCPE

sur France Inter

"Or, nous, nous voulons des pédagogues, nous voulons des personnes en capacité d'enseigner, d'évaluer, d'accompagner les élèves, de tenir une classe. Parce qu'enseigner, c'est un métier", insiste-t-il.

"Ce n'est pas par des recrutements de contractuels qu'on va répondre à la crise de recrutement", abonde Sophie Vénétitay. "Cette crise est devenue structurelle. Elle est profondément ancrée dans notre pays. Ça fait quinze ans que l'Éducation nationale n'arrive pas à pourvoir tous les postes aux concours de recrutement", rappelle-t-elle. "C'est un serpent de mer", confirme Bruno Bobkiewicz.

Profiter de la baisse démographique pour améliorer, pas dégrader

Il y a derrière ces problèmes de recrutement "une multitude de facteurs", selon eux, à commencer par la question salariale. "Nos métiers sont encore très mal payés", souligne Sophie Vénétitay. Elle dénonce aussi les "conditions de travail, la question de la considération, la question de la place sociale. Ce sont des choses qui ont été profondément dégradées ces dernières années et sur lesquelles il est urgent qu'il y ait plus qu'un signal politique. Il faut qu'il y ait des décisions fortes en matière de salaires, de conditions de travail, pour qu'enfin l'école occupe une vraie place dans ce pays."

Ce déficit d'attractivité du métier ne concerne pas que les enseignants mais tous les personnels de l'enseignement, souligne Bruno Bobkiewicz : "On souffre aussi beaucoup d'absences de personnels en dehors des enseignants". C'est le cas notamment des AESH, ces professionnels qui accompagnent les élèves en situation de handicap. "On a aujourd'hui un manque de moyens criant pour l'école inclusive", déplore Grégoire Ensel. "N'oublions pas que c'est le droit à l'éducation de l'enfant. C'est un droit fondamental qui se joue là. Et aujourd'hui des parents nous témoignent de la difficulté à pouvoir intégrer leurs enfants et à faire valoir ce droit".

Pour ces représentants syndicaux et parents d'élèves, il faut profiter de la baisse démographique en France non pas pour réduire le nombre de personnels mais pour avoir des classes moins chargées et ainsi un meilleur encadrement.

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