Manif pour tous : journée calme, rassemblement massif, soirée agitée
REPORTAGE | Les opposants au mariage pour tous étaient une nouvelle fois dans la rue dimanche. Entre 150.000 et un million de participants qui demandent le retrait de la loi Taubira et s'inquiètent de l'adoption ouverte aux homosexuels. Pas d'incident pendant la manif mais au moment de la dispersion, des groupes d'extrême droite sont venus en découdre avec les forces de l'ordre. Près de 300 personnes ont été interpellées.
Ils avaient choisi un jour
symbolique pour cette dernière manifestation de l'année : la fête des
mères. Les opposants au mariage pour tous se sont rassemblés en masse dimanche
pour demander le retrait de la loi. La Manif pour tous a attiré un million de
personnes selon les organisateurs, 150.000 selon la préfecture de police. Une
réussite pour le mouvement qui, selon ses estimations, rassemble pour la troisième fois un
million de Français, après la manif du 13 janvier et celle du 24 mars.
Un dispositif imposant de sécurité
avait été mis en place par le gouvernement. Il n'y a pas eu d'incidents pendant la manifestation, mais après la dispersion.
> A REVIVRE | Le live de
la journée de manifestation pour tous du 26 mai
Dans le cortège d'Austerlitz
Trois cortèges différents ont
défilé dimanche. Deux qui partaient de l'Ouest de Paris et un du centre. C'est
là que ce sont retrouvés beaucoup de manifestants venus de Lyon, Marseille, Tours ou Grenoble.
Avant de tomber
sur le point de ralliement, place Valhubert, de nombreux tee-shirts rouge et
jaune. Rouge pour la sécurité de la Manif pour tous. Jaune pour l'accueil.
Certains discutent, d'autres jouent à la corde à sauter. Nicolas est vêtu de
rouge. Il a fait toutes les Manifs pour tous en temps que bénévole et a été
formé pour cela. Il ne craint pas cette manifestation plus que les autres.
"J'ai, par malheur, un
enfant homosexuel" (Gérard)
Gérard a choisi un panneau,
parmi la dizaine proposée par les organisateurs. Celui qui parle de la fête des
mères. La dernière "avant liquidation ". Il "se moque du
mariage des homos ", qui n'est pour lui, "qu'un papier ". Lui, ce qui l'inquiète, c'est qu'un enfant élevé par deux pères, n'aura pas de
maman, qui est "essentielle " à la vie d'un être pour le Lyonnais.
Gérard
commence à vouloir en dire plus, mais s'interrompt. Il a un fils homosexuel, "par
malheur ", confie-t-il doucement. Un fils de 24 ans "qu'il aime
comme les autres ", qu'il a élevé "parce que sa mère est partie " mais un fils à qui il ne semble plus beaucoup parlé. Il n'en
dira pas plus.
"Y'a pas un droit qui a
été enlevé aux Français ?" (Jérôme)
Jérôme, tee-shirt vert de la
Manif pour tous sur les épaules, et drapeaux tricolores peints sur le visage,
souffle dans un sifflet blanc. Il vient de Tours avec sa femme et ses trois aînés.
Il n'a pas hésité à amener ses enfants malgré les recommandations du ministère
de l'Intérieur. "Manuel Valls est venu aux Manifs pour tous ? Moi je
les ai toutes faites. Au cœur du cortège, c'est très bon enfant ", lance
le Tourangeau, "j'aimerai que le ministre réponde aux vraies questions :
il y a des enfants qui ne pourront pas célébrer la fêtes des mères car ils n'auront
pas de maman. Y'a pas un droit qui a été enlevé aux Français ? ", s'interroge-t-il.
"Qu'il ne s'inquiète pas pour nos enfants dans les manifs, on s'en occupe ".
Comme beaucoup de
manifestants, Jérôme refuse la généralisation de la procréation médicalement
assistée (PMA), dont un texte doit être débattu d'ici "la fin de l'année"
selon Jean-Marc Ayrault. "La PMA ",
explique Jérôme, "si on la permet alors qu'il n'y a pas d'infertilité, on
justifie toutes les procréations des gens célibataires qui ont envie d'un enfant.
Se pose aussi la question de sélection des embryons ". François, de Lyon, le rejoint sans le connaître sur la question et s'indigne, "on va arriver
à acheter des enfants dans les supermarchés ".
"Je manifeste pour qu'on
aille pas plus loin" (Fanny)
Sur la poussette de Jean,
quelques mois à peine, une affiche : "Les enfants ne sont pas des
cobayes ". Fanny, la maman, explique que "cela représente la théorie
du genre ", qui est, selon elle et de nombreux manifestants, "la
finalité de cette réforme ". Elle met délicatement du coton sur les
oreilles de son fils pour éviter que le bruit ne le gêne trop et explique :
"Cette théorie, c'est l'idée qu'on naît avec un sexe mais que c'est à
nous de choisir si on est un homme ou une femme ". Une perspective qui est
"extrêmement perverse " car, pour Fanny, "le fait d'accepter d'être
un homme ou une femme est la source du bonheur ".
"On ne lâchera rien" (BenoÎt et Hélène)
Probablement le slogan le plus répété dimanche. "Ne rien lâcher, jamais ",
même si la loi est promulguée. Benoît est venu avec sa femme Hélène. "Nous
ne lâcherons jamais car nous sommes face à une problématique qui touche la
société dans son entier. Cette loi a été votée mais porte en elle un germe qui
n'est pas bon ", dit Benoît. Sa femme acquiesce. "Je suis tout à
fait d'accord ", reprend-elle au micro, pendant que son mari montre fièrement
la médaille qu'elle porte à son pull. "C'est un médaille d'or de la
famille française. Je l'ai reçu car j'ai eu huit enfants ".
Et dans cette
lutte contre l'adoption pour tous, ce sont les enfants qu'Hélène veut tout d'abord
défendre, "on ne prend pas assez en compte l'intérêt des enfants avec
cette loi, on va délibérément leur mentir en disant qu'ils ont deux pères ou
deux mères alors que la biologie ne le permet pas ".
Benoît et Hélène
promettent de soutenir "toutes les initiatives qui auront encore lieu "
contre la loi Taubira dans l'avenir. Les organisateurs ont d'ailleurs fini leur
discours par un "merci " et "à la rentrée ".
Près de 300 interpellations
Le mouvement ne s'est donc pas essoufflé,
malgré la promulgation de la loi Taubira et malgré les appels à la vigilance de Manuel Valls qui craignait des
débordements. Des débordements, il y
en a eu. A la fin, quand il ne restait plus que quelques manifestants sur la
pelouse des Invalides. Des groupes d'extrême droite sont venus provoquer les
forces de l'ordre.
Quelques centaines de personnes s'en sont pris à des policiers rue de l'université.
Coups de jets et de bouteilles, de pavés, de barres de fer, de fumigènes. Les fauteurs de troubles s'en
sont également pris aux journalistes. Six personnes ont été légèrement blessées :
quatre policiers et un photographe.
Dans un communiqué Manuel Valls a indiqué
que "ces incidents ont été provoqués par plusieurs centaines
d'individus, pour la plupart issus de l'extrême droite et de la mouvance
identitaire ". Il a également "condamné avec forces " ces
heurts.
Les
affrontements ont duré environ trois heures, de 20h à 23h. La police a
interpellé 293 personnes, dont 231 devraient se voir notifier une garde à vue.
Avant ces interpellations, une trentaine de personnes avait été placée en
garde à vue. Des activistes d'extrême droite de groupes comme Jeunesses
nationalistes ou les Identitaires. Une quinzaine de jeunes était même montée
sur le toit du siège du PS, rue de Solférino. Ils ont déployé une banderole "Hollande
démission ".
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