Reportage "C'est 50 euros tous les 15 jours" : quand des étudiants précaires se font payer leurs courses par des inconnus

Pour aider les étudiants les plus précaires à subvenir à leurs besoins, l'association "Un cabas pour un étudiant" met en place des duos de parrainage.

Article rédigé par Agathe Mahuet
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Yurii et sa marraine Marina participent à l'opération "un cabas pour un étudiant", en septembre 2025. (AGATHE MAHUET / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Yurii et sa marraine Marina participent à l'opération "un cabas pour un étudiant", en septembre 2025. (AGATHE MAHUET / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

La rentrée étudiante coûte cher. Les étudiants auront 800 euros de plus à débourser cette année pour couvrir les frais liés à l'enseignement supérieur d'après le syndicat étudiant l'Unef. Ça comprend aussi bien le logement que l'alimentation. Alors pour aider ceux qui sont le plus en difficulté à payer leurs courses, l'association "Un cabas pour un étudiant" met en place des duos de parrainage dans toute la France. Franceinfo en a rencontré un à Paris.

Yurii et Marina forment l'un de ces duos, à Paris. Le jeune ukrainien de 24 ans étudie les sciences politiques à la Sorbonne. Marina travaille dans le social et vit dans un bel appartement près du Moulin rouge. "On se connaît depuis un an et ça se passe très bien", résume la marraine.

Ils se fixent des rendez-vous réguliers pour faire les courses. "On se retrouve une fois tous les 15 jours à Barbès. On fait le plein avec lui dans un supermarché." Yurii remplit donc son panier, et Marina sort le porte-monnaie à la caisse. "C'est 50 euros tous les 15 jours. C'est un bon coup de pouce", estime Marina. "Oui, ça aide beaucoup", se réjouit Yurii.

La bourse du Crous n'a pas évolué avec l'inflation

100 euros de moins à dépenser chaque mois, c'est une somme non négligeable pour Yurii. Il touche aussi une aide du Crous, mais qui n'a pas évolué malgré l'inflation. "La bourse est la même depuis 2022. Si je compare les prix de 2022 et de 2025, la différence est vraiment totale", regrette-t-il.

Le jeune homme a quitté l'Ukraine quelques semaines avant l'invasion russe, il y a bientôt quatre ans, pour étudier en France. Ce n'est pas simple tous les jours. Alors Marina se sent utile."Je sais pourquoi je le fais. J'aide Yurii, je suis contente de le voir évoluer dans ses études. Il fait aussi beaucoup d'efforts pour gagner de l'argent de son côté puisqu'il donne des cours de français à des Ukrainiens du monde entier, par visioconférence. Ça lui fait un appoint et avec ça il s'en sort."

Un accompagnement moral également

Un accompagnement financier, mais aussi moral. "Ma mère est très contente que j'aie quelqu'un qui m'aide. Ça complète un peu le côté familial que je rate en étant loin de ma famille." Mais Marina voudrait faire encore plus. "Moi je suis seule, donc c'est un peu plus difficile. Je ne peux pas lui apporter le réconfort, la chaleur d'une famille dans laquelle il pourrait se sentir bien, mettre ses pieds sous la table et venir quand il veut le soir. Mais on fait avec ce qu'on a et c'est déjà bien comme ça", se satisfait-elle.

Yurii sait que s'il rentre en Ukraine, ce sera un aller sans retour. "Je veux avoir un avenir. Et je pense qu'ici, il sera plus clair." Un avenir un peu plus dégagé en France qu'en Ukraine. Yurii cherche un stage, en communication politique, et souhaite rester travailler ici l'année prochaine.

Quand des étudiants précaires se font payer leurs courses par des inconnus. Reportage d'Agathe Mahuet