Cyclisme : 10 victoires en 2025 à 21 ans... Paul Magnier, la nouvelle perle du sprint français qui monte et rêve des classiques

Sans être un pur sprinteur, l'Isérois est de loin le coureur français ayant décroché le plus de succès cette saison.

Article rédigé par Andréa La Perna
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Paul Magnier fête sa victoire sur le Grand Prix de Fourmies, le 14 septembre 2025. (MAXPPP)
Paul Magnier fête sa victoire sur le Grand Prix de Fourmies, le 14 septembre 2025. (MAXPPP)

Brillant sur le Tour de Slovaquie qui s'est terminé dimanche 21 septembre et dont il a remporté les quatre premières étapes, Paul Magnier a porté son total à dix victoires en 2025. Aucun coureur français n'avait réalisé cette performance sur une même saison depuis Arnaud Démare en 2020. Cette année, seuls six coureurs ont fait mieux que lui : Tadej Pogacar (16 victoires), Mads Pedersen (14), Tim Merlier (14), Isaac Del Toro (13), Matthew Brennan (12) et Olav Kooij (11).

Le natif de Laredo aux Etats-Unis (Texas), mais qui a grandi à proximité de Grenoble, est en train de se faire un nom dans le peloton à seulement 21 ans. Sous les couleurs de la formation belge Soudal Quick-Step, l'une des meilleures au monde, il a surtout brillé dans des sprints massifs lorsque le plateau était assez accessible. On l'a vu lever les bras pour la première fois en World Tour sur le Tour de Pologne cet été, et il n'est pas passé loin de la victoire sur le Tour d'Italie (3e à Naples) et sur la première classique flandrienne de la saison, le Het Nieuwsblad (2e).

Comparé à Tom Boonen et Julian Alaphilippe

"90% des coureurs n'atteignent pas les 10 victoires en carrière. Lui en a déjà 15 en deux ans. C'est un sniper le gars", relève Lilian Calmejane, consultant cyclisme pour France Télévisions. Aux côtés d'un autre Paul (Seixas) déjà en pleine lumière médiatique, Magnier incarne la relève du cyclisme français. De là à devenir le nouveau grand sprinteur tricolore et le successeur tant attendu de la génération Démare-Bouhanni-Coquard (nés entre 1990 et 1992) ? Pas vraiment. Paul Magnier lui-même ne se voit pas faire une carrière de pur sprinteur. "Gagner au sprint, c'est un avantage, mais les classiques me font plus rêver", a-t-il insisté dans L'Equipe [article payant], lundi.

Cela tombe bien, son équipe, Soudal Quick-Step, est sur la même longueur d'ondes. "On verra quel futur il aura. Je pense qu'il ne sera pas vraiment un sprinteur. Il est un peu comme Tom Boonen. Il va très vite, peut battre les meilleurs sprinteurs, mais il est pour les classiques avec des petites bosses. C'est quelqu'un qui veut faire la course, qui peut être dans le groupe de tête et jouer, plutôt que d'attendre pour faire le sprint", explique à franceinfo: sport son coach dans l'équipe belge, Frederik Broché. En 2026, Paul Magnier se verra confier de plus grandes responsabilités et les classiques flandriennes du printemps feront partie de son programme.

"Il va évoluer dans la hiérarchie, mais on ne dira pas dans les journaux qu'il va gagner le Tour des Flandres. Je ne pense pas que ce soit possible aujourd'hui, mais pourquoi pas une semi-classique", précise Frederick Broché, pour qui il est important d'être "prudent" avec le développement du jeune Français. L'an prochain, Soudal Quick-Step opérera un virage prononcé et recollera à son identité originelle, celle d'une meute redoutable sur les Classiques, une fois que Remco Evenepoel aura quitté le navire. Jasper Stuyven et Dylan van Baarle, deux vainqueurs de Monuments expérimentés, vont renforcer la formation belge dont le sprinteur n°1 restera le Belge Tim Merlier, en vue sur le dernier Tour de France avec deux victoires d'étapes.

"C'est quelqu'un de très souriant, de décontracté. Ce n'est pas le sprinteur qui a besoin de se mettre dans sa bulle avec les écouteurs avant une course à la Nacer Bouhanni".

Lilian Calmejane, ex-coureur professionnel

à franceinfo: sport

"Il y aura des attentes. Il va devoir franchir un cap et montrer ses aptitudes au plus haut niveau. Il les a déjà montrées, mais sur des courses d'un niveau un peu inférieur, note notre consultant Lilian Calmejane. Pour le moment, c'est un peu du vélo plaisir. Il ne sent pas forcément trop la pression. Il est frais". Cette fraîcheur, l'équipe Soudal Quick-Step compte bien la protéger. Les carrières des coureurs professionnels démarrent de plus en plus tôt et la perte de plaisir sur un vélo devient un symptôme de plus en plus courant dans le peloton, en témoignent les sorties de Tadej Pogacar en fin de Tour de France.

Une fraîcheur à protéger

"L'aspect d'avoir du fun dans les courses, c'est très important pour lui. On doit respecter ça, assume Frederik Broché. On peut alléger son calendrier. Il a besoin d'espace pour faire du VTT. On peut le comparer à Van der Poel, qui ne veut pas faire que la route". Cette année, Paul Magnier a participé à une manche de Gran Fondo (une forme de cyclosportive longue distance) pour le plaisir et l'a remportée. "C'est un mordu de vélo", confie Damien Sigaud, son directeur sportif lors de son passage chez les juniors au Charvieu-Chavagneux Isère Cyclisme entre 2021 et 2022.

Paul Magnier a accompagné en sortie son père Laurent dès le plus jeune âge. Après avoir touché à un peu tous les sports, dont l'athlétisme, le ski et le tennis, il ne s'est tourné vers le cyclisme sur route qu'assez tard. C'est un vététiste avant tout. "Les spécialités du VTT lui ont beaucoup servi dans la gestion des trajectoires et le fait de savoir frotter dans un peloton. C'était un gamin bourré de talent. A chaque fois qu'on l'emmenait sur une compétition, on savait qu'on allait faire un résultat. Pour sa première course en juniors deuxième année, il gagne au mois de mars une 'toute catégorie' au milieu des élites alors qu'il n'avait que 17 ans. A l'époque, il avait vraiment un autre profil, plus longiligne, plus grimpeur. Il était aussi très bon en contre-la-montre", se souvient Damien Sigaud.

Le directeur sportif du CCIC38 voit quelques similitudes avec Julian Alaphilippe, qui partage avec Paul Magnier une grande explosivité et la capacité à accomplir des objectifs clairs. Le jeune talent tricolore rêve d'être un jour champion du monde comme son aîné, qui l'a pris sous son aile à son premier stage chez Soudal Quick-Step en 2023. Le Tour des Flandres - que Magnier a découvert en 2025 (62e) -et Paris-Roubaix font aussi partie de la liste.

Avant de basculer dans la cour des grands, il doit déjà boucler cette saison avec deux courses de deuxième zone, le Tour de Croatie et celui de Guangxi en Chine, qui pourraient lui permettre de gonfler son total de victoires et sa confiance avant une année charnière.

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