"Les familles disjonctent parfois" : une responsable d'agence raconte pourquoi elle refuse de placer des jeunes au pair en France
Hélène Garnier, à la tête de l'agence Au Pair Séjours, a arrêté d'envoyer de jeunes étrangers dans des familles françaises. Elle explique pourquoi à franceinfo.
"C'est l'image de la France qui est en jeu. Et ça ne se passe pas au bout du monde. C'est chez nous, et c'est grave." Responsable d'Au Pair Séjours, une petite agence située en Alsace, Hélène Garnier a décidé, en début d'année, de ne plus envoyer de jeunes étrangers au pair dans des familles françaises. Pourquoi ? Pour ne pas se rendre "complice d'un tel système", plaide-t-elle. Cette ancienne assistante marketing dans l'industrie pharmaceutique a ouvert son agence familiale en 2014. Depuis janvier, elle n'envoie plus que des Français à l'étranger via des partenaires fiables qui, dit-elle, s'assurent du suivi des jeunes, des cours de langues qu'ils reçoivent, et de la respectabilité de la famille.
En France justement, Hélène Garnier refuse de "fermer les yeux". L'année dernière, elle a recensé pas moins de 91 cas très problématiques. Des jeunes qui s'étaient inscrits via des plateformes en ligne et qui, maltraités dans leur famille d'accueil, sont venus la trouver. "Ils ont été roués de coups, jetés dehors, de nuit comme de jour, sans chaussures, affamés, laissés seuls sans nourriture alors que la famille d'accueil partait en vacances", énumère-t-elle.
Exploités et "terrorisés"
Ces jeunes étrangers sont "extrêmement vulnérables, handicapés par la barrière de la langue", constate Hélène Garnier, qui a également vu des cas de jeunes filles "harcelées sexuellement". Elle remarque aussi que ces "au pair" "ne bénéficient pas de couverture sociale, arrivent en France sans assurance, sont très mal rémunérés, entre 50 et 70 euros par semaine, pour 10 heures de travail par jour en moyenne, au lieu des 5 heures contractuellement prévues".
Plusieurs cas ont marqué la responsable d'agence. Il y a eu, par exemple, cette Italienne "rouée de coups" qui lui a montré son corps couvert de bleus. "Les familles disjonctent parfois", soupire Hélène Garnier.
J'ai eu le cas d'une Coréenne jetée dans la neige en pleine nuit parce qu'elle était trop lente à comprendre.
Hélène Garnierà franceinfo
Pourquoi autant d'abus et d'histoires de maltraitance ? Hélène Garnier relève déjà un premier problème : "Les attentes sont différentes entre jeunes et familles d'accueil. Quand les premiers pensent voyage linguistique et découverte, les secondes pensent garde d'enfant et femme de ménage à bon marché." Autre difficulté : porter plainte s'avère très compliqué. "Ces jeunes sont terrorisés, ils ont peur des représailles."
Une législation floue propice aux abus
En conséquence, "les familles ne sont pas inquiétées". Et même si les plateformes sur internet les bloquent, rien ne les empêche de changer d'adresse IP pour se réinscrire, fait remarquer Hélène Garnier. "Difficile pour nous d’accepter que ces faits se déroulent en France, tout comme il a été difficile pour nous de ne pas se laisser gagner par un sentiment de découragement lorsque nous avons été confrontés à l’impuissance des pouvoirs publics dans ce domaine", ajoute-t-elle.
Hélène Garnier veut maintenant "tirer la sonnette d'alarme". Et elle sait de quoi elle parle : il y a vingt ans, elle-même a vécu une très mauvaise expérience en tant que jeune fille au pair en Angleterre. Aujourd'hui, elle réclame une nouvelle législation sur le sujet.
Il est temps de définir un vrai statut unique pour les "au pair" en France, donnant lieu à un seul et unique contrat.
Hélène Garnierà franceinfo
En attendant, Hélène Garnier compile tous les témoignages qu'elle a reçus afin de saisir la préfecture sur le sujet. "On va s'attaquer à ce problème. Il est temps de stopper les abus en informant."
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