"Je suis descendue au niveau d'un enfant de 4 ans" : le combat d'une fulgurée après avoir survécu à la foudre

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Article rédigé par France 2 - L. Nahon, E. Martin, J. Raharison, J. Cohen. Édité par l'agence 6Médias
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Deux cents personnes sont frappées par la foudre chaque année en France. Raphaëlle Menso, une maîtresse d'école, a vu sa vie basculer du jour au lendemain quand la foudre l'a frappée violemment il y a huit ans. Un combat difficile pour retrouver une vie normale.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour le regarder en intégralité.

Raphaëlle Manceau est une fulgurée. Ce mot, elle ne le connaissait pas il y a encore huit ans avant d'être frappée par la foudre : "Un fulguré, il vit avec ses séquelles ; et un foudroyé, malheureusement, ne survit pas."

Fulgurée, et miraculée. En septembre 2017, en marge d'un festival de musique, Raphaël Manceau s'abrite de la pluie sous une tente. Un éclair s'abat sur la toile, 14 personnes sont blessées. Raphaëlle, elle, est touchée à la tête et perd connaissance. "Je me réveille 6 mètres et demi plus loin, donc avec une incompréhension. Je suis assise par terre sous la pluie battante, couverte de boue. C'est une scène de chaos, c'est une odeur de chair brûlée qui prend à la gorge. Il y a des cris, il y a des pleurs et je suis là. Je ne sais pas qui je suis, en fait", raconte-t-elle.

"J'ai perdu la parole, puis l'écriture"

Cette marque est le point d'entrée de la foudre dans son corps, rare trace visible de cette soirée de 2017. Mais un mois après l'accident, Raphaëlle connaît une lente descente aux enfers. "J'ai commencé à perdre la parole et après, j'ai commencé à perdre l'écriture. Avant que ça disparaisse complètement, j'ai laissé une trace. Je m'appelle Raphaëlle Manceau. Je suis une fille. Je suis descendue intellectuellement. C'est dur de le dire. Je suis descendue au niveau d'un enfant de 4 ans", poursuit la fulgurée.

Maîtresse d'école de profession, elle doit réapprendre à parler, lire, écrire, compter. "Vous êtes piégée dans votre corps qui est douloureux sans pouvoir communiquer. Enfin, vous n'existez plus", confie Raphaëlle.

Huit ans après sa fulguration, Raphaëlle Manceau a toujours besoin de rééduquer son cerveau et son corps en douleur. "C'est comme si on vous enfilait des aiguilles dans les nerfs et là, vous avez des décharges électriques. Sur une échelle de douleur entre 0 et 10, moi, je suis à 6 tout le temps, mais je ne vais pas me laisser abattre. C'est moi qui vais gagner", assure-t-elle.

Au moins 200 victimes de la foudre chaque année

Comme Raphaëlle Manceau, au moins 200 Français sont victimes chaque année de la foudre. En 2024, plus de 500 000 impacts ont été enregistrés. La France compte seulement quatre médecins kéraunologues, les spécialistes de la foudre. Le docteur Rémi Foussat est l'un d'entre eux. Il suit des patients de la France entière, comme une femme en Guadeloupe.

Depuis son accident il y a un an, elle était en errance médicale. "L'idée de la foudre, c'est sa quantité énergétique, c'est de l'ordre du million de volts que l'on reçoit sur le corps humain. Pour vous donner une comparaison, une ligne haute tension, c'est entre 200 et 300 000 volts. C'est 30 000 degrés, un coup de foudre", explique Rémi Foussat.

La fulguration ne laisse presque aucune trace, même à l'IRM. Et la médecine sait encore peu de choses sur le phénomène. Pourtant, tout le corps est touché. "Ça va des problèmes ophtalmologiques, des problèmes ORL, des problèmes cardiaques, pulmonaires et essentiellement neurologiques", détaille le médecin.

Se mettre à couvert

Les experts de Météorage suivent quotidiennement les impacts de foudre. Ils ont aussi étudié tous les cas de fulguration des dix dernières années, et en ont tiré la meilleure prévention possible : la voiture est une très bonne protection. À l'extérieur, il ne faut pas se réfugier sous un arbre ou dans un abri de fortune. "En dernier recours, lorsqu'il n'y a aucune autre solution, ça va consister à vous protéger en vous mettant tout simplement à couvert", explique Stéphane Schmitt, de Météorage Pau (Pyrénées-Atlantiques).

Et même protégé à l'intérieur d'une maison, il faut rester vigilant. "On évite d'utiliser l'électricité, c'est-à-dire pas votre console de jeu, regarder la télé, brancher votre téléphone, par exemple. Et on évite également de prendre une douche, d'utiliser l'eau, parce que la foudre peut remonter à travers les canalisations", poursuit Stéphane Schmitt.

Les périodes d'orage sont de plus en plus longues et de plus en plus violentes, ce qui laisse craindre que les fulgurés soient à l'avenir plus nombreux.

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