Procès de Frédéric Péchier : l'anesthésiste affirme que la première des 30 victimes a été empoisonnée, mais pas par lui

L'accusé de 53 ans, jugé depuis trois semaines, a évolué dans son discours, mais persiste à clamer son innocence.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
L'ancien anesthésiste-réanimateur Frédéric Péchier arrive au tribunal de Besançon (Doubs) pour son procès, le 19 septembre 2025. (SEBASTIEN BOZON / AFP)
L'ancien anesthésiste-réanimateur Frédéric Péchier arrive au tribunal de Besançon (Doubs) pour son procès, le 19 septembre 2025. (SEBASTIEN BOZON / AFP)

Un "oui mais". L'ex-anesthésiste Frédéric Péchier, jugé depuis trois semaines pour 30 empoisonnements de patients, dont 12 mortels, a admis pour la première fois, lundi 30 septembre devant la cour d'assises du Doubs, que la première des victimes qui lui sont imputées avait bien été empoisonnée. Mais il a continué à nier en être à l'origine.

Damien Iehlen, 53 ans, est mort le 10 octobre 2008 à la clinique Saint-Vincent de Besançon, où il était venu se faire opérer d'un rein. Son autopsie a permis de relever dans son sang un taux très élevé de lidocaïne, un anesthésique local, "cinq fois la dose létale". Selon les experts, le produit a été introduit préalablement dans une poche de perfusion utilisée pour son endormissement.

"Ce n'est pas moi"

"C'est bien une dose mortelle de lidocaïne qui a été injectée au patient ?", lance la présidente, Delphine Thibierge. "Oui, tout à fait", a répondu calmement l'accusé, qui avait jusqu'à présent toujours contesté cette hypothèse, préférant celle d'une possible erreur médicale de sa collègue chargée de l'anesthésie. Pourquoi un tel revirement ? "J'ai mis du temps" à le reconnaître, "car je ne peux pas considérer qu'on empoisonne des patients", a avancé Frédéric Péchier, finalement convaincu par un expert entendu vendredi. "Quelqu'un a mis les flacons de lidocaïne dans la poche. Et ce n'est pas moi", a-t-il soutenu.

L'ancien anesthésiste-star de Besançon a, en revanche, contesté l'hypothèse d'un empoisonnement pour Suzanne Ziegler, morte cinq jours seulement après Damien Iehlen. Deux experts entendus lundi ont privilégié, là aussi, l'hypothèse d'une intoxication à la lidocaïne. Cette femme de 74 ans a-t-elle été empoisonnée ? "Je ne pense pas. Je pense qu'il y a eu une pathologie cardiaque sous-jacente" et "que cette patiente a été sous-estimée sur le plan cardiaque", a observé Frédéric Péchier à la barre.

"De toute façon, vous aurez toujours tort"

L'une des deux avocates générales, Thérèse Brunisso, a souligné les similitudes entre ces "évènements indésirables graves" (EIG dans le jargon médical) : "Même temporalité dans l'apparition des troubles médicaux, cinq minutes après l'induction, même troubles cliniques, même lidocaïne retrouvée dans les séquestres, à quatre jours d'intervalle."

Lors de cet interrogatoire tendu, le docteur Péchier a tenu bon, trébuchant parfois sur ses explications parfois alambiquées et ses "revirements" décriés par les victimes. La défense a volé à son secours. "Quoi que vous disiez, on s'en fout, on regarde le coupable" décrit par l'accusation et les enquêteurs, "quoi que vous disiez, de toute façon, vous aurez toujours tort", a asséné son avocat Randall Schwerdorffer, dénonçant à nouveau "l'absence de preuve".

"On a un accusé acculé, dans les cordes, qui est prêt à s'effondrer, la question c'est : à quand les aveux complets ?", a estimé devant la presse Stéphane Giuranna, avocat des parties civiles. "Il serait temps de reconnaître les faits, ce serait réparateur pour les parties civiles et pour sa ligne de défense un grand pas en avant", a-t-il ajouté. Le verdict est attendu le 19 décembre.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.