Affaire Le Scouarnec : le collectif de victimes, reçu mercredi par le ministre de la Santé, entend dénoncer les défaillances du système
Le collectif des victimes de l'ancien chirurgien a formulé en mai dernier "neuf mesures concrètes", dont l'accès au casier judiciaire pour les établissements de santé qui veulent recruter un soignant.
Le collectif de victimes de Joël Le Scouarnec est reçu mercredi 17 juin à 11 heures par Yannick Neuder, le ministre de la Santé, selon le communiqué du collectif consulté par franceinfo. Ce collectif entend, lors de ce rendez-vous, dénoncer à nouveau les défaillances qui ont permis à l'ancien chirurgien de sévir pendant près de 30 ans dans une dizaine d'hôpitaux sans jamais être arrêté. Sept membres du collectif seront reçus par Yannick Neuder, en présence de Sarah El Haïry, la haute-commissaire à l'Enfance, et de Mariel Garrigos, conseillère du ministre de la Justice. Ils seront accompagnés de leur avocat. Le collectif précise que "l’ensemble des victimes du procès n’a pas été convié" à ce rendez-vous.
Le procès de Joël Le Scouarnec, accusé de 300 viols et agressions sexuelles sur des patients, quasi tous mineurs, s'est achevé le 28 mai dernier. Mais les victimes souhaitent que leurs histoires servent à changer les choses. Pour le collectif, qui regroupe une soixantaine de victimes, l'affaire Le Scouarnec est un laboratoire à ciel ouvert des défaillances des institutions. Il estime que les hôpitaux, mais aussi l'Ordre des médecins et la justice, ont participé à l'impunité du chirurgien, pourtant condamné dès 2005 pour détention d'images pédopornographiques. Les débats qui ont eu lieu pendant le procès n'ont fait que renforcer les inquiétudes des victimes. À la barre, plusieurs responsables des instances hospitalières s'étaient renvoyé la balle en évoquant un "cas individuel". Tous avaient admis que rien n'avait été mis en place depuis pour éviter de nouvelles affaires Le Scouarnec.
"On a été abandonné tout le dossier"
Il y a eu des défaillances "judiciaires", pointe sur France Inter la porte-parole du collectif, Manon Lemoine, car Joël Le Scouarnec a été arrêté dès 2004 et condamné l'année suivante pour détention d'images pédopornographiques mais sans obligation de soin, ni interdiction d'exercer, "mais il y a aussi les défaillances dans l'institution médicale, au niveau de l'Agence régionale de Santé, de l'ordre des médecins, et enfin dans la protection de l'enfance".
"Des enfants ont parlé, mais ils n'ont pas été entendus, même par des professionnels de santé."
Manon Lemoine, porte-parole du collectif des victimes de Joël Le Scouarnecà France Inter
Le collectif pointe aussi les manquements dans l'accompagnement des victimes. "On a été abandonné tout le dossier", dénonce la porte-parole.
Le collectif des victimes de l'ancien chirurgien veut changer en profondeur le système. Le 15 mai dernier, il demandait l’ouverture d’une commission interministérielle sur les conséquences et les défaillances révélées par l’affaire Le Scouarnec, formulant "neuf mesures concrètes". Il préconise notamment une obligation pour les médecins de signaler tout soupçon de violence sexuelle sur les enfants et réclame l'accès au casier judiciaire pour les établissements de santé qui veulent recruter un soignant.
Il s'agit "d'expliquer aux enfants ce qu'un adulte a le droit de faire et ce qu'il n'a pas le droit de faire, mais aussi expliquer où l'enfant peut parler, comment il peut parler. Il y a des enfants qui ont parlé parmi nous. Il y en a qui ont vu des professionnels de santé, des psychiatres, des psychologues parce qu'ils avaient des souvenirs ou des choses qui étaient ancrées en eux. Mais ils n'ont pas été entendus", indique Manon Lemoine. Il s'agit donc de "travailler avec les professionnels de l'enfance pour être en capacité de comprendre les messages que disent les enfants".
"Un enfant ne vous dira pas 'j'ai été violé'. Il va utiliser d'autres mots et il faut pouvoir les entendre."
Manon Lemoineà France Inter
Figure aussi dans leurs propositions un volet judiciaire, "qui va de l'accompagnement des victimes aux peines et au traitement des peines". Le collectif demande aussi la création d'une commission interministérielle pour que "l'ensemble des trois institutions - le haut-commissariat à l'Enfance, le ministère de la Santé et le ministère de la Justice - se réunissent pour saisir une inspection générale de l'ensemble des institutions et des dispositifs mis en place pour remédier aux défaillances qui sont révélées dans notre dossier", explique la porte-parole. "Si on traite juste un endroit et pas l'autre, on met un bout de scotch d'un côté de la baignoire qui fuit, mais ça ne règle en rien le problème, puisque c'est quelque chose de global. Un enfant qui parle mais qu'on ne sait pas accompagner psychologiquement derrière va être un enfant détruit toute sa vie."
Le collectif regrette en ce sens l'absence du ministre de la Justice au rendez-vous au ministère de la Santé. Il rappelle que Gérald Darmanin avait affirmé le 27 mai à l'Assemblée nationale que "tous les moyens ont été mis en œuvre pour accompagner (...) les victimes, avant le procès, pendant le procès et demain, après le procès". Pourtant, selon le collectif, "sur le terrain, cet accompagnement de l’État est resté inexistant pour l’immense majorité des victimes". Il sera représenté par Mariel Garrigos, conseillère du ministre de la Justice. Manon Lemoine déplore une "méconnaissance" du dossier et un "manque de considération" par le gouvernement et espère que cette première réunion avec le ministre de la Santé et en présence de Sarah El Haïry, la haut-commissaire à l'Enfance, "aboutira à d'autres" rencontres.
Une audition du collectif en juillet à l'Assemblée
Le collectif des victimes de Joël Le Scouarnec sera par ailleurs auditionné le 1er juillet par la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale. Joël Le Scouarnec a été condamné le 28 mai à 20 ans de réclusion criminelle, dont deux tiers de peine de sûreté (mais sans rétention de sûreté), pour viols et agressions sexuelles sur 299 victimes sur une période de 25 ans.
Le collectif de victimes de Joël Le Scouarnec s'est formé au cours du procès qui s’est déroulé devant la cour criminelle de Vannes du 24 février au 28 mai 2025. Il représente une soixantaine de victimes de l’ex-chirurgien.
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