: Document franceinfo Dans une lettre poignante, une victime de Joël Le Scouarnec témoigne : "Il ne m'a pas seulement violée, il a volé ma mémoire"
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Olympe, 36 ans, a été violée par l'ex-chirurgien alors qu'elle était sous anesthésie générale. Dans son texte lu à l'audience, et reproduit en intégralité par franceinfo, elle relate des années de souffrances, conséquences d'un traumatisme dont elle "ignorait la teneur".
Quand elle s'avance face à la cour criminelle du Morbihan, mercredi 12 mars, Olympe* est décidée à ne pas craquer. Derrière ses grandes lunettes à monture dorée, ses yeux bleus se sont parfois embués. Mais elle n'a pas pleuré. Cette jeune femme blonde de 36 ans, vêtue d'un perfecto noir et d'un haut blanc, a lu d'un trait son témoignage, écrit en une soirée, sur trois feuilles de papier. Elle voulait que chacun entende les souffrances incommensurables qui ont découlé du viol confessé par Joël Le Scouarnec dans ses carnets. Interrogé par la présidente Aude Buresi, l'ex-chirurgien de 74 ans a reconnu avoir violé Olympe par pénétration digitale, alors qu'elle était hospitalisée à la polyclinique du Sacré-Cœur à Vannes, à l'âge de 13 ans. "J'avais besoin de me réapproprier mon histoire", a expliqué la jeune femme à l'issue de sa déposition. Franceinfo retranscrit sa lettre in extenso, avec l'accord de son autrice.
"Madame la présidente,
J'ai été admise à la clinique du Sacré-Cœur de Vannes le 30 août 2002 pour une opération d'un ongle incarné sous anesthésie générale. J'avais 13 ans. Petit à petit, je plonge dans un profond mal-être inexplicable, je me déteste, je déteste ce corps dans lequel je vis, je ne comprends pas ce qu'il se passe. Je suis en échec scolaire et en rupture familiale et sociale. Je plonge dans l'anorexie. Je déverse toute ma haine sur mes parents et les tiens responsables de mon état.
En 2004, je suis hospitalisée en pédiatrie, je ne me nourris plus. Je suis alimentée exclusivement par une sonde, je me laisse mourir et j'enchaîne les tentatives de suicide.
Olympedans sa lettre
J'ai 16 ans et je suis une jeune fille complexée, vide, en rejet total de mon corps. J'intériorise et me replie. Les troubles alimentaires sont omniprésents. Je suis toujours suivie sur le plan médical et psy. Ma dépression continue de s'intensifier. Je prends quatorze médicaments par jour pour tenter de survivre. Je fais beaucoup de cauchemars, toujours les mêmes. Je suis placée en foyer, car je mets ma sécurité en danger et c'est trop lourd pour mes parents. Je sombre dans la drogue. J'ai une peur viscérale du noir, je suis également claustrophobe et émétophobe. Ces phobies font encore partie de mon quotidien aujourd'hui.
Lors de ma première relation sexuelle avec mon petit ami de l'époque, je me mets à vomir et je fais un malaise. Ce dernier me reproche de lui avoir menti quand je lui ai dit que j'étais vierge. Dans ma tête, tout se chamboule, j'ai le sentiment d'être faible, je n'ai pas confiance en moi et je n'ai aucune estime de moi.
J'ai l'intime conviction d'avoir subi des sévices sexuels mais je n'ai aucun souvenirs concrets.
Olympedans sa lettre
Je n'arrive pas à me regarder dans un miroir. J'évite toute proximité avec les gens. Je déteste qu'on me touche. Je n'ai confiance en personne. Je suis en hypervigilance en permanence. Je sais que j'ai quelque chose d'enfoui en moi dont j'ignore la teneur. J'ai l'impression de vivre dans un corps que je ne connais pas. J'entame des séances d'hypnose mais impossible, mon cerveau bloque absolument toute intrusion dans ma conscience.
Le 20 juillet 2019, j'apprends par la gendarmerie que des carnets ont été retrouvés chez un chirurgien à Jonzac, que dans ces carnets mon nom apparaît. Je lis le passage sordide me concernant. Je ne me souviens de rien car j'étais au bloc opératoire endormie sous anesthésie générale, mais je reconnais son visage, car c'est celui de mes cauchemars depuis quinze ans. J'éprouve une délivrance, je ne suis pas surprise. Maintenant, je sais que je ne suis pas folle.
Pendant longtemps, j'ai eu du mal à mettre des mots sur ce que j'ai subi, mais je ressens aujourd'hui le besoin urgent de faire entendre ma voix et de demander justice.
Olympedans sa lettre
Les souffrances que j'ai endurées ont eu un impact profond sur ma vie et je souhaite que ces actes ne restent pas impunis. J'apprends aujourd'hui à me pardonner et à m'aimer. Je suis toujours pleine d'angoisses, de phobies et de rage. J'attends de ce procès que Monsieur Le Scouarnec comprenne le traumatisme qu'il a créé par ses gestes qu'il qualifie de "furtifs" et qu'il prenne conscience des vies brisées par son instrumentalisation qu'il fait des enfants.
Je voudrais qu'il me rende ma liberté, je voudrais m'apaiser.
Il ne m'a pas seulement violée, il a brisé ma jeunesse, volé ma mémoire et entaché ma dignité."
*Le prénom a été modifié
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