A quoi joue le "Boracay", ce navire de la "flotte fantôme" russe immobilisé au large de Saint-Nazaire ?
Ce pétrolier au passé trouble tourne en rond à la limite des eaux territoriales françaises depuis dimanche. Il est notamment suspecté d'avoir servi à lancer des drones vers le Danemark.
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Mais que fait le capitaine du Boracay aux frontières maritimes de la France ? Depuis dimanche 28 septembre, date à laquelle il a été repéré, ce pétrolier de 244 mètres de long fait du surplace dans l'océan l'Atlantique, au large de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Tout en prenant soin de rester à un peu plus de 12 miles nautiques des côtes, soit la limite des eaux territoriales françaises. Deux membres d'équipage ont été placés mardi en garde à vue, et cette mesure a été prolongée mercredi soir, a annoncé jeudi le procureur de la République de Brest, Stéphane Kellenberg.
Si ce bateau intrigue autant, c'est d'abord parce qu'il fait partie de la "flotte fantôme" russe, grâce à laquelle Moscou contourne les sanctions internationales pour vendre son pétrole. Mais aussi parce qu'il est suspecté d'avoir joué un rôle dans l'affaire des drones ayant survolé le Danemark le 22 septembre. Voici ce que l'on sait de ce navire surveillé jusqu'au plus haut niveau de l'Etat français.
Le navire tourne en rond depuis près de quatre jours
Parti le 20 septembre du port de Primorsk (ouest de la Russie, en mer Baltique), selon les données du site spécialisé Marine Traffic, le Boracay est arrivé dans le secteur samedi, rapporte ICI Loire Océan. Il effectue depuis des manœuvres très limitées, jetant parfois l'ancre, avant de remettre les moteurs pour effectuer des "ronds dans l'eau", expliquait mardi le journal Presse-Océan. Un descriptif confirmé par des images aériennes diffusées mercredi sur LCI.
Cet arrêt au large de la France interroge, alors que le Boracay devrait normalement faire route vers le port de Vadinar, en Inde, où il est attendu aux alentours du 20 octobre. "Au coût de fonctionnement de ces gros navires de la flotte marchande, on se demande bien quel peut être l'intérêt pour l'armateur d'immobiliser ainsi son bateau pendant plusieurs jours", se demande d'ailleurs Presse-Océan.
Pour en savoir plus, un patrouilleur français a été dépêché et le parquet de Brest (Finistère) a ouvert une enquête, a confirmé la marine nationale à ICI Loire Océan. Des membres de l'équipage ont été placés en garde à vue, a appris franceinfo de source proche du dossier, mercredi dans la soirée. Il s'agit de deux personnes se présentant comme le commandant du navire et son second, précise le procureur de Brest à franceinfo. Ils sont entendus par les enquêteurs de la section de recherche de la gendarmerie maritime saisie du dossier par le procureur de Brest.
Un peu plus tôt mercredi, une source militaire avait informé France Télévisions que le cargo avait été "arraisonné". Selon une source militaire à l'Élysée auprès de France Inter, l'arraisonnement a eu lieu samedi. Une "équipe de visite" est montée à bord, ont appris France Télévisions et France Inter.
Le "Boracay" est répertorié comme un bateau de la "flotte fantôme" de Moscou
La fiche de ce navire est pour le moins chargée. Comme le révèlent les registres de Marine Traffic, le Boracay est aussi connu sous le nom de Pushpa et Varuna dans certaines bases de données maritimes. Auparavant, il s'appelait Kiwala et avait d'ailleurs été immobilisé pour inspection par l'Estonie en avril. Pas moins de 40 infractions avaient alors été relevées, concernant notamment le pavillon du pétrolier : il a été déclaré comme émanant de Djibouti, alors que ce pays d'Afrique a radié le navire pour "activités illégales". Le Boracay arbore désormais le pavillon du Bénin.
Cet historique trouble va de pair avec des accusations d'appartenance à la "flotte fantôme" russe, qui rassemblerait près de 900 navires grâce auxquels la Russie, l'Iran et la Corée du Nord transportent du pétrole en contournant les sanctions internationales imposées à cause de l'invasion russe en Ukraine. Par l'intermédiaire de sociétés écrans, Moscou achète pour cela des pétroliers d'occasion et les fait naviguer sous des pavillons de complaisance. Et le Boracay, immatriculé 9332810 auprès de l'Organisation maritime internationale, figure bien sur la liste de ces navires sanctionnés par l'Union européenne et le Royaume-Uni.
Emmanuel Macron dénonce "des fautes très importantes" de l'équipage
Interrogé sur la présence de ce sulfureux pétrolier si près de la France, Emmanuel Macron a justifié mercredi la surveillance rapprochée du navire. "C'est ce qu'il faut faire", a-t-il déclaré à la presse en marge du sommet de Copenhague (Danemark), dénonçant "des fautes très importantes qui ont été commises par cet équipage, qui justifient d'ailleurs que la procédure soit judiciarisée aujourd'hui".
Le chef de l'Etat se dit toutefois "très prudent" concernant les autres accusations qui pèsent sur le Boracay, à savoir son rôle supposé de plateforme de lancement pour les drones qui ont récemment survolé l'aéroport de Copenhague. Le navire se trouvait en effet au large du Danemark lors de cette incursion, et se retrouve désormais visé par une enquête des autorités danoises.
De son côté, l'eurodéputée française Nathalie Loiseau a accusé frontalement la Russie d'utiliser des bateaux comme le Boracay pour "essayer d'intimider les Européens". "Ces navires sont aussi soupçonnés, par exemple, d'avoir sectionné des câbles internet sous-marins en mer Baltique à plusieurs reprises", a-t-elle rappelé mercredi sur franceinfo, tout en appelant les Européens à "hausser le ton" en abattant les drones suspects par exemple.
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