Vote de confiance : "Je ne comprends pas ce coup de poker" du Premier ministre, réagit Raphaël Glucksmann, coprésident de Place publique
Invité des "4 Vérités" mercredi 27 août, l'eurodéputé et leader du mouvement Place publique, Raphaël Glucksmann, se dit perplexe quant au vote de confiance sollicité par François Bayrou le 8 septembre prochain, et au message envoyé par le Premier ministre.
Les réactions à la décision de François Bayrou de s'en remettre à un vote de confiance de l'Assemblée nationale le 8 septembre prochain, pleuvent depuis lundi. Alors que la gauche s'est prononcée dans son ensemble pour le vote contre, Raphaël Glucksmann, coprésident du parti Place publique et eurodéputé, s'exprime à son tour et affirme dans les "4V" ce mercredi matin ne pas comprendre la trajectoire du Premier ministre et son "coup de poker".
Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
Cyril Adriaens-Allemand : "Je me battrai comme un chien", a indiqué François Bayrou à nos confrères de l'Express. Il reste 12 jours avant le vote de confiance. Pour vous, le sort du Premier ministre est-il scellé ?
Raphaël Glucksmann : Il est scellé. Il est scellé depuis avant-hier. Vous savez, je ne comprends pas. Je ne comprends pas ce qu'a fait le Premier ministre. Je ne comprends pas ce coup de poker. Je lis, "coup de poker", "il joue son avenir"... Mais ce n'est pas un jeu. Il a présenté en juillet une copie pour le budget avec des pistes. Nous avons dit une chose très simple à Place publique, avec nos partenaires socialistes, que c'était inacceptable en l'état. On a eu des contacts en juillet et on a dit : nous aurons des exigences, des exigences de retrait de textes proposés, par exemple, les efforts absolument inacceptables sur les dépenses de santé qui vont percuter l'hôpital, et la suppression des jours fériés. On aura des propositions sur la taxation des plus hauts patrimoines, il y aura un rapport de force, une négociation. Depuis, plus rien. Pas de méthode, pas de contact, pas de négociation. Et tout d'un coup, une rentrée. Personne n'est au courant. Et on a un Premier ministre qui dit : "C'est tout ou rien, faites-moi confiance".
C'est une faute politique pour vous ?
Mais c'est un mal français. Vous savez, quand on est dans une situation où on n'a pas de majorité, ce dont on doit faire preuve, c'est d'humilité. On doit essayer d'avoir un budget en établissant un compromis, en fonction des rapports de force présents à l'Assemblée. Depuis le 7 juillet, depuis la dissolution insensée du 9 juin 2024 du président de la République, il n'y a pas de majorité en France. Il n'y a pas une majorité de gauche. On le sait, il n'y a pas non plus une majorité de droite, ni une majorité macroniste. Il n'y a pas de majorité. Et donc, dans ce cas-là, qu'est-ce que vous devez faire ? Eh bien, vous devez essayer, par la négociation, d'aboutir à quelque chose qui soit acceptable. Là, il savait que c'était inacceptable en l'état. Et donc, en réalité, ce qu'il fait, c'est qu'il préfère un geste glorieux, avoir des commentaires sur le courage personnel. Mais le courage, c'est d'essayer d'avoir un budget en faisant des comptes.
Un message contradictoire ?
Justement, à l'Assemblée hier, il a semblé faire des gestes à la CFDT. Il parle, "d'efforts spécifiques sur les plus hauts revenus", de niches fiscales qu'il veut corriger, de rééquilibrer des aides aux entreprises...
Vous y comprenez quelque chose ? Sérieusement, là je vous pose une question, je sais que ce n'est pas mon rôle, c'est le vôtre, mais, vous y comprenez quelque chose ? Vous avez un ton martial la veille, qui dit : "C'est comme ça. Et maintenant, vous allez devoir faire un chèque en blanc et vous prononcer avant même de discuter et d'engager un rapport de force et une négociation". Et là, tout d'un coup, il voit directement qu'il n'aura pas la confiance, et il commence à dire : "Mais en fait, finalement, on peut quand même parler", tout en disant que "le vote de confiance est déconnecté du budget". Je ne comprends même pas ce qu'il veut dire. Quand il dit que c'est déconnecté de tout ce dont on peut parler, ça signifie, "faites-moi confiance en général, et ensuite on pourra discuter". Mais il n'y a pas de majorité pour lui faire confiance.
Il faut choisir entre "la responsabilité et le chaos", dit-il. Vous êtes un artisan du chaos selon lui.
Vous savez, nous avons fait des efforts. On a refusé de voter la censure. Ça a fâché toute une partie de la gauche, qui voulait tout de suite faire tomber Bayrou à partir du moment où il a été nommé. Nous, on a négocié, on a obtenu des choses avec nos partenaires socialistes, et du coup, on n'a pas voté la première censure. On a fait passer le budget parce qu'on sait qu'il faut un budget. On sait que la situation est grave. On sait que la dette est un problème immense. Et donc, on est dans une posture où il faut négocier, où chacun est prêt à manger un peu de son chapeau pour que le pays soit géré. C'était le rôle de François Bayrou de faire ce qu'il avait fait la première fois et de ne pas croire qu'il était Premier ministre avec une majorité. Et malheureusement, ce qu'il se passe, c'est que dès que vous habitez dans un palais de la République, vous n'arrivez pas à comprendre que vous devez être humble. Vous savez ce que dit Montaigne ? "Même sur le plus haut trône du monde, vous n'êtes jamais assis que sur votre cul". Et donc, quand vous n'avez pas de majorité, vous devez comprendre une chose simple : c'est que votre job est ingrat et que la vraie noblesse, c'est d'accepter de sortir de son ethos vertical, de sa splendeur pour discuter, négocier et prendre en compte les rapports de force politique.
"Il n'y a pas une majorité de gauche à l'Assemblée nationale"
Si on prend votre phrase sur le trône et le reste, que fait-on à partir du 9 septembre ? Si François Bayrou tombe, arithmétiquement parlant, c'est quand même le plus probable...
Il va tomber. Et il aura décidé tout seul de le faire.
Et donc, à partir du 9 septembre, est-ce que vous appelez Emmanuel Macron à nommer une personnalité issue de la gauche pour former un nouveau gouvernement ?
Je préférerais que ce soit une personnalité issue de la gauche. Mais j'ai conscience, je l'ai dit dès le 7 juillet, qu'il n'y a pas une majorité de gauche à l'Assemblée nationale. Il n'y a pas de majorité. Et que donc ce qu'il faut, c'est une méthode. C'est de dire, en fait, le but, n'est pas de mener les grandes transformations que nous voulons pour le pays. Vous savez, ça fait un an que je travaille à un projet pour la France avec Place publique. Ce sera un projet qui proposera d'immenses transformations pour le pays, la manière dont il est gouverné, sur les politiques publiques, sur l'hôpital, sur l'éducation, sur la sécurité. Mais je sais très bien que je n'ai pas la majorité pour mettre en place ces grandes transformations. Ces grandes transformations, elles seront tranchées en 2027, au moment des élections nationales, qui doivent être le moment où les Français choisissent les grandes orientations pour leur pays.
Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
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