Congrès du PS : quelles ambitions présidentielles pour Olivier Faure après sa courte victoire face à Nicolas Mayer-Rossignol ?

Le député de Seine-et-Marne a été élu pour la quatrième fois premier secrétaire du Parti socialiste, avec 50,9% des voix.

Article rédigé par Daïc Audouit
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, lors d'une rencontre à Matignon, à Paris, le 20 mai 2025. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS)
Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, lors d'une rencontre à Matignon, à Paris, le 20 mai 2025. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS)

Olivier Faure en route vers l'Elysée ? Après sa victoire pour la direction du PS par 50,9% des voix contre 49,1% à son concurrent Nicolas Mayer-Rossignol, selon des résultats encore provisoires publiés vendredi 6 juin, le premier secrétaire du Parti socialiste peut-il viser plus loin ?

La victoire, même courte, reste un succès crucial pour Olivier Faure. "C'est sa quatrième élection. Il sera parmi les premiers secrétaires avec le plus de longévité. Avec François Mitterrand, François Hollande et Lionel Jospin. Ça situe le niveau quand même", s'exclame auprès de franceinfo l'un de ses bras droits, le député européen Pierre Jouvet. "Il est chef du PS, réélu pour la quatrième fois. Bien sûr qu'il fait partie des figures de gauche présidentiables", prolonge Luc Carvounas, maire PS d'Alfortville, pour qui les partisans de Nicolas Mayer-Rossignol "n'avaient qu'un seul point commun, celui de gagner le congrès pour empêcher Olivier Faure de pouvoir être candidat en 2027".

"Olivier Faure change de dimension parce qu'on est dans un temps politique qui est décisif face aux échéances cruciales que sont les municipales en 2026 et la présidentielle", commente Dieynaba Diop, porte-parole du PS. Si une défaite lui aurait sans doute "fermé les portes de l'Elysée", selon un membre de l'équipe sortante, son entourage tente de garder la tête froide par rapport à l'échéance de 2027. "Considérer que la victoire à ce scrutin vaudrait une quasi-validation d'une candidature à la présidentielle, ce serait une grosse bêtise, tempère la même source. Vous pouvez faire 75% dans un vote militant, si vous êtes à 3% dans les sondages, ça ne sert pas à grand-chose."

Un premier secrétaire prudent sur une candidature à l'Elysée

Nicolas Mayer-Rossignol, de son côté, estime que cette victoire étriquée ne fait pas d'Olivier Faure le candidat le mieux placé pour 2027. "Sa légitimité pour une éventuelle candidature présidentielle n'est pas renforcée par le résultat d'hier. C'est le moins que l'on puisse dire", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse vendredi après-midi.

Olivier Faure lui-même reste ambigu sur ses ambitions personnelles dans les interviews qu'il a pu donner récemment. "Ce congrès n'a pas vocation à désigner quiconque (...) mais nous aurions tort de ne pas y penser. Je ne le dis pas pour moi ou quiconque, mais car c'est, dans notre République, l'échéance qui conditionne la vie politique pendant les cinq années qui suivent, il est donc capital de s'en préoccuper", avait-il déclaré au Parisien au lendemain du premier tour. En fin de campagne, son rival, le maire de Rouen, lui a demandé de dévoiler clairement ses intentions face aux militants. Sans réponse définitive. Le premier secrétaire ne balaie pas pour autant l'hypothèse d'une candidature. "Le moment venu, il faudra choisir le ou la meilleure pour rassembler les électeurs de gauche et vaincre l'extrême droite au second tour. Si je suis celui-là, je ne me déroberai pas", précisait-il au Nouvel Obs le 30 avril.

Bref, le député de Seine-et-Marne se prépare. Et afin d'être mieux connu des Français, il a publié un livre, Je reviens te chercher, paru fin avril, aux tonalités intimes et personnelles. Olivier Faure, fils d'une mère vietnamienne, y revient sur son identité métissée et sur le cheminement des convictions politiques de son père, au début intéressé par Charles Maurras, puis passé par la gauche et revenu à l'extrême droite sur la fin de sa vie. Un père aimé et admiré notamment pour son altruisme et son goût des autres. "Souvent, je me suis interrogé sur nos parcours respectifs. Je conserve cette admiration pour les héros du quotidien. Mais à sa différence, je veux le Pouvoir. Celui de changer le cours des choses", écrit le premier secrétaire du Parti socialiste.

Un passage par la case primaire ?

En vue de la prochaine élection présidentielle, Olivier Faure n'est pas hostile à l'organisation d'une primaire pour désigner le candidat unique d'une gauche qui irait de François Ruffin à Raphaël Glucksmann mais qui exclurait La France insoumise, considérant que Jean-Luc Mélenchon sera de toute façon candidat. "Pour moi, la ligne politique sur la nécessité du rassemblement de la gauche a été tranchée par ce vote", juge Pierre Jouvet. Après le congrès du PS de Nancy qui se tiendra du 13 au 15 juin, l'un des premiers déplacements du premier secrétaire réélu sera de répondre à l'invitation de Lucie Castets, qui souhaite réunir le 2 juillet les partis de gauche pour réfléchir à une candidature commune.

De ce côté-là de l'échiquier, la victoire d'Olivier Faure est saluée chaleureusement. "C'est une bonne nouvelle pour nous. Ce socialisme-là est un socialisme avec lequel il y a des ramifications communes", commente un soutien de la primaire à gauche. "Je félicite Olivier Faure et je me félicite qu'on ait un Parti socialiste qui s'ancre à gauche", a réagi François Ruffin vendredi matin sur BFMTV. Clémentine Autain, autre figure de cette mouvance, a lu avec attention le livre du premier secrétaire. "Ce qui touche, c'est la partie intime, la façon dont il s'est construit politiquement contre l'extrême droite. Et ce qui est très intéressant, c'est qu'il prend vraiment ses distances avec le bilan de François Hollande", juge la députée de Seine-Saint-Denis, qui siège dans le groupe Ecologiste et Social.

Boris Vallaud en embuscade

Qui va voter ? Comment ? A quelle date ? Qui pourra participer ? Les conditions de l'organisation d'une primaire restent à définir. Le processus n'en est qu'à ses tout débuts. "Les chefs de parti ont vocation à se présenter, mais n'avoir que des chefs de parti comme candidat, cela réduirait la portée d'une primaire", estime un proche de Lucie Castets. Cela ouvre la porte à d'autres candidats qui souhaiteraient représenter le PS à cette primaire. "Force est de reconnaître que dans le jeu de la gauche et du PS, il n'y a personne qui tue le match. Tout reste ouvert. Monsieur et madame 'pourquoi pas moi ?' ne vont pas raccrocher", ironise un membre de l'équipe sortante. "Carole Delga en rêve", persifle un autre pilier de l'équipe. François Hollande peut lui aussi nourrir des desseins élyséens. 

Olivier Faure devra-t-il surveiller les ambitions de Boris Vallaud ? Malgré sa troisième place, il s'est placé en arbitre du second tour, apportant son soutien personnel à Olivier Faure mais laissant liberté de vote à ses partisans. Le député des Landes a lui aussi écrit un livre (En permanence) et la présidence du groupe PS à l'Assemblée nationale lui offre une envergure politique et médiatique. "Boris a toute sa place. Boris et Olivier sont deux talents du parti. Que le meilleur gagne, même si j'estime qu'Olivier est le mieux placé", lance un député socialiste.

Et il va avoir son "courant" au sein du Conseil national, le Parlement du parti. Olivier Faure devra en tenir compte. "Composer avec Boris Vallaud, avec qui on a l'habitude de travailler au quotidien et avec qui on partage une ligne politique, ne nous inquiète guère", rétorque Pierre Jouvet, qui, en tant que "monsieur élections" au PS, promet de reprendre "dès lundi matin la préparation des élections municipales". "Car il faut gagner ces élections. C'est la première marche d'une hypothétique reconquête du pouvoir en 2027", martèle Luc Carvounas. C'est donc dès mars 2026 que le destin élyséen d'Olivier Faure pourrait se jouer.

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