Assassinat de Charlie Kirk : "Il y a une tradition extrêmement violente aux États-Unis", affirme Jean-Claude Beaujour, avocat et spécialiste

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Article rédigé par franceinfo - J.B. Marteau
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Mardi 16 septembre, Jean-Claude Beaujour, avocat et spécialiste des États-Unis, est l'invité de la Matinale de franceinfo. Accompagné en plateau par François Beaudonnet, éditorialiste international franceinfo TV, il revient sur la montée de la violence politique aux États-Unis et la polarisation de plus en plus prononcée entre républicains et démocrates.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.

Jean-Baptiste Marteau : Tyler Robinson va être officiellement inculpée dans la journée. Mais on voit que l'assassinat de Charlie Kirk, cet influenceur conservateur qui avait énormément d'influence sur la vie politique américaine, très fan de Donald Trump, est tout de même un symbole de cette violence politique aux États-Unis qui est en train de prendre un nouveau tournant ?

Jean-Claude Beaujour : Cela traduit évidemment une violence politique qui existe depuis très longtemps. Je rappellerai qu'il y a encore quelques mois, une élue du Minnesota et son époux ont été assassinés. Nancy Pelosi, par l'intermédiaire de son époux, avait également fait l'objet d'attaques. On ne revient pas sur les deux tentatives d'assassinat odieuses contre Donald Trump. Mais aussi contre les frères Kennedy, Martin Luther King, Ronald Reagan... On voit bien qu'il y a une tradition extrêmement violente aux États-Unis. Ce qui est important cette fois-ci, c'est qu'à peine l'enquête commence, que les enseignements ont déjà été tirés, puisqu'on nous dit que c'est l'extrême gauche. Là encore, il ne s'agit pas de dire que c'est X ou Y, mais en tant qu'avocat, j'ai envie de vous dire qu'il est encore trop tôt pour pouvoir dire qui est responsable ou, en tout état de cause, quelles sont les motivations de la personne qui a tiré et qui a été arrêtée.


Vous avez raison de dire que Donald Trump n'a pas attendu. À peine l'assassinat de Charlie Kirk a été annoncé, il a tout de suite ciblé la gauche. Avec des mots très durs, cette nuit, de la Maison-Blanche, qui affirme son intention de "réprimer" ce qu'elle qualifie de "terrorisme intérieur de la gauche."

François Beaudonnet : On va voir comment cela va être possible, quelles sont les organisations, par exemple, qui vont être réprimées. Mais je voudrais revenir un instant sur la violence politique aux États-Unis. Jean-Claude Beaujour dit, à juste titre, que ça fait presque partie de la culture, malheureusement, des États-Unis. Parce que depuis toujours, il y a eu de la violence politique. La polarisation date d'une vingtaine ou une trentaine d'années. Je me souviens très bien qu'il y a trente ans, de France, on disait finalement qu'il y avait assez peu de différences politiques entre les démocrates et les républicains. Et c'est vrai qu'ils n'étaient pas si éloignés que ça. La polarisation s'est accentuée. Mais là, ce qui est nouveau, c'est que cette polarisation devient physique. Depuis quelques mois, on assiste à une augmentation exponentielle des actes de violence politique. Il y a eu 150 incidents violents à motivation politique depuis le début de l'année aux États-Unis. C'est à peu près le double de ce qu'il y avait en 2024. C'est quelque chose qui existe depuis longtemps et qui est en train d'augmenter de façon exponentielle.

Jean-Claude Beaujour : Républicains et démocrates, les uns parlent des autres comme étant des ennemis, ce qui est vraiment nouveau. Et l'ennemi, qu'est-ce qu'on fait ? L'ennemi, il faut l'abattre en quelque sorte.


Comment interprétez-vous ces propos de la Maison Blanche ? Je rappelle qu'ils parlent de terrorisme intérieur de la gauche, en disant qu'il va falloir le réprimer, voire l'éradiquer presque, en interdisant des mouvements de gauche. Donald Trump en fait vraiment une question de principe ?

Jean-Claude Beaujour : Il peut en faire une question de principe. Il y a plusieurs choses. Qu'est-ce qu'on appelle terrorisme intérieur de la gauche ? Qu'est-ce que l'extrême gauche ? Est-ce qu'on considère que certains démocrates sont d'extrême gauche ? Qu'est-ce qu'on en fait ? Est-ce qu'on va leur dire qu'ils ne peuvent pas être élus parce que certains sont considérés comme ayant des propos extrêmement à gauche. Pour certains, Bernie Sanders est un homme d'extrême gauche. Donc qui qualifie-t-on ? Quelles sont les organisations ? Quelles décisions peuvent être prises ? Alors même qu'on est dans un pays qui défend, au titre du premier amendement, la liberté d'expression qui est sacrée, tout en maintenant une séparation des pouvoirs entre l'exécutif et le judiciaire. Ce qui fonde l'Amérique, ce qui est intéressant, c'est que, et ça a d'ailleurs toujours été un peu surprenant pour un Européen, lorsque vous allez à la Maison-Blanche, vous pouvez voir des gens qui manifestent devant en permanence, qui disent au président qu'ils ne sont pas d'accord, et c'est quelque chose qui a toujours été extrêmement admis. Là où chez nous, on n'imaginerait pas d'aller poser un piquet devant l'Élysée. Pour autant, aux États-Unis, c'est possible, et on voit que ce grand pays démocratique est en train de changer de manière très surprenante.

Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.

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