En Argentine, la recherche des bébés volés pendant la dictature relancée grâce à la série "L’Eternaute", inspirée d’une BD de science-fiction

Cette série argentine, disponible sur Netflix, remet la lumière sur les milliers de disparus et les vols d'enfants perpétrés par la dictature militaire en Argentine, de 1976 à 1983.

Article rédigé par Caroline Vicq
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
L'affiche de la série argentine "L'Eternaute" dans les rues de Buenos Aires. (DR)
L'affiche de la série argentine "L'Eternaute" dans les rues de Buenos Aires. (DR)

La série argentine L’Eternaute, sur Netflix, est l’adaptation d’une BD publiée en 1957 sur une invasion extraterrestre à Buenos Aires. Depuis la dictature de 1976, c’est aussi en Argentine le symbole de la résistance collective face à l’ennemi, d’autant plus que l’auteur lui-même de la BD et sa famille ont été tués par les militaires. Le succès de la série a donc réactivé la lutte des associations de droits de l’homme qui recherchent leurs disparus.

Il y a eu 30 000 disparus pendant la dictature dont Hector Oesterheld, l’auteur de L’Eternaute, ses 4 filles qui avaient de 19 à 25 ans et ses trois gendres, tous militants de gauche. Deux de ses filles, enceintes lors de leur enlèvement, ont accouché en captivité avant d’être tuées. Leurs bébés ont été mis en adoption sous une nouvelle identité. La femme d’Oestherfeld, seule survivante de la famille, a jusqu’à sa mort tenté de retrouver ses deux petits-enfants. Sans succès. La série a relancé leur recherche. 

"Ils ont aujourd’hui entre 47 et 48 ans. L’un est né fin 1976 et l’autre en 1977. Ils vivent sous une fausse identité, ils sont parmi nous, ils sont peut-être en Argentine ou à l’étranger. Ils peuvent d’ailleurs regarder la série en ce moment, et celui qu’ils appellent "papa" peut très bien être l’assassin de leur vrai père, comme c’est arrivé dans plusieurs cas", explique Carlos Pisano, membre de l’association des droits de l'homme HIJOS.

La famille Oestherfeld. Seule la mère survivra à la dictature militaire en Argentine. (DR)
La famille Oestherfeld. Seule la mère survivra à la dictature militaire en Argentine. (DR)

En tout, on estime que 500 bébés ont été mis en adoption pendant la dictature. L’association "des Grands-Mères de la Place de mai" recherche depuis maintenant 47 ans leurs petits-enfants, grâce à une énorme banque d’ADN. Mais leur tâche est de plus en plus difficile face au négationnisme et aux ajustements du président Milei. "Pour nous, la série est un baume au cœur au milieu des discours de haine et de tant d’individualisme, qu’on puisse récupérer et revendiquer comme dans L'Éternaute le sens de la construction collective et du héros collectif comme société possible", soutient Miguel Santucho, membre des Grands-Mères de la Place de Mai.

Cette même organisation populaire et cette résistance qui ont permis aux grands-mères de retrouver 139 de leurs petits-enfants sur les 500 bébés volés. Les associations espèrent donc, grâce au succès de la série, rendre leur lutte plus visible, sensibiliser les plus jeunes et retrouver les petits-enfants et arrière-petits-enfants, dont ceux, peut-être, de l’auteur de L’Eternaute.

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