Édito
Retraites : le dialogue social, l’angle mort du macronisme

En écartant l'hypothèse un retour de l'âge de départ à 62 ans, François Bayrou a sérieusement compromis le conclave sur les retraites. Une nouvelle illustration du difficile dialogue avec les partenaires sociaux depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à l’Élysée ?

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Emmanuel Macron (à droite) avec le maire de Pau et actuel Premier ministre, François Bayrou (à gauche), sur le balcon de l'hôtel de ville lors d'une visite à Pau, le 6 juillet 2023. (GAIZKA IROZ / AFP)
Emmanuel Macron (à droite) avec le maire de Pau et actuel Premier ministre, François Bayrou (à gauche), sur le balcon de l'hôtel de ville lors d'une visite à Pau, le 6 juillet 2023. (GAIZKA IROZ / AFP)

François Bayrou a-t-il enterré le conclave sur les retraites ? C’est possible ! Après avoir écarté l’hypothèse d’un retour de l’âge légal à 62 ans, il va tenter de recoller les morceaux avec la CFDT mardi 18 mars à Matignon. L’intersyndicale, elle, doit se réunir mercredi. Le premier effet de sa sortie, c’est d’avoir braqué des organisations qui resserrent les rangs pour l’accuser, sur des modes divers, de "trahir" l’engagement énoncé à l’ouverture de ce nouveau cycle de discussions : Pas de tabou, pas même su la question de l’âge de départ. Mais si les syndicats sont aussi remontés, c’est parce qu’ils sont sérieusement échaudés. 
 
Ils se sont sentis méprisés lors de l’adoption de la réforme des retraites grâce à l’article 49.3 au printemps 2023, malgré des mois de manifestations. L’épisode a laissé des traces. Mais le fossé s’était creusé bien avant. Le dialogue social, c’est l’angle mort du macronisme, depuis l’origine. Avant de conquérir l’Élysée, Emmanuel Macron se posait pourtant en disciple de Michel Rocard, un "exemple" disait-il. À l’automne 2016, quelques mois après sa disparition, il s’engageait à poursuivre l’oeuvre du leader historique de la "deuxième gauche", apôtre du dialogue et de la négociation avec les partenaires sociaux. Le souvenir de l’ancien Premier ministre semble irriguer les pages du livre de campagne du candidat Macron, Révolution, consacrées à la réconciliation et à l’apaisement du pays.

Un fonctionnement vertical


Une fois à l’Élysée, le ton a changé. Jupiter est apparu et un malentendu s’est installé, en particulier avec l’ex-secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger. Emmanuel Macron a adopté un mode de fonctionnement assez vertical, contournant parfois le dialogue social considéré comme une perte de temps pour réformer. Et la rigidité d’Édouard Philippe à Matignon n’a rien arrangé. L’ancien Premier ministre avait acté une première cassure avec les syndicats en 2019, sur la première réforme des retraites, celle à points, en voulant introduire un âge-pivot à 64 ans, déjà. Et il juge aujourd’hui le conclave sur les retraites "hors sol" et "complètement dépassé".

Certes, rares sont ceux qui espèrent encore en voir surgir une fumée blanche. François Bayrou est soupçonné de vouloir gagner du temps pour s’offrir l’indulgence des socialistes à l’Assemblée. Mais avec ce conclave, il avait quand même renoué un lien de confiance des syndicats. En assumant tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, l’impossible retour à 62 ans dans un contexte d’effort de réarmement, il a réveillé chez ses interlocuteurs les mauvais souvenirs du dialogue social version macroniste.

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