Grèce : une ancienne réfugiée syrienne risque la prison pour avoir aidé les migrants
Le procès de 24 travailleurs humanitaires reprend vendredi 13 janvier sur l'île de Lesbos, en Grèce. Ils sont accusés entre autres d'espionnage et de trafic de migrants. Le plus étonnant c'est qu'une ancienne réfugiée fait partie des accusés.
Comme eux, elle risque jusqu'à 25 ans de prison. Son seul crime est d'avoir voulu aider ceux qui ont vécu l'enfer de l'exil. Sarah Mardini est syrienne. En 2015, à 20 ans, elle décide de quitter Damas avec sa sœur cadette Yusra, elle aussi championne de natation.
Leur parcours ressemble tristement à celui des centaines de milliers de Syriens qui fuient la guerre cette-année là : les deux sœurs gagnent la Turquie puis embarquent pour la Grèce sur un canot pneumatique surchargé. Pendant la traversée ce sont elles qui évitent aux passagers de se noyer, elles sautent à l'eau pour alléger l'embarcation et la traînent à la nage jusqu'aux rivages de Lesbos. Leur exploit leur vaudra une certaine notoriété et même un film, Les nageuses, sur Netflix.
Le film LES NAGEUSES raconte l’histoire vraie de Yusra et Sarah Mardini.
— Netflix France (@NetflixFR) December 2, 2022
Ces deux sœurs syriennes ont fui leur pays en guerre, en traversant une partie de la mer Méditerranée à la nage.
On vous raconte tout dans ce THREAD : pic.twitter.com/BRl3EixQUb
Une fois réfugiées en Allemagne, Yusra se prépare pour les Jeux olympiques tandis que Sarah choisit de retourner à Lesbos. Elle sert de traductrice dans une ONG, patrouille le long des côtes, jumelles à la main, se rend parfois au large pour secourir les bateaux en détresse. En 2018 elle est arrêtée et passe cent jours en prison avant d'être renvoyée à Berlin dans l'attente de son procès.
"Criminalisation de la solidarité"
Un procès "politique", un procès "grotesque", disent aujourd'hui les ONG. En tout cas un procès emblématique ; en 2020 Amnesty International avait épinglé huit pays dont la France pour leur penchant à multiplier les procédures judiciaires et les pressions contre les ONG d'aide aux migrants. Un rapport du Parlement européen présente le procès de Sarah et de ses 23 homologues comme "la plus grande affaire de criminalisation de la solidarité en Europe".
Tomorrow, humanitarians Seán Binder and Sarah Mardini will face trial for providing lifesaving support to people in need.
— Fair Trials (@fairtrials) January 9, 2023
We continue to stand with #FreeHumanitarians and to call on the EU to stop the criminalisation of solidarity and on Member States to #dropthecharges. pic.twitter.com/MbELMRFxay
Leurs avocats dénoncent des incohérences et demandent l'abandon des charges. Les audiences en Grèce se déroulent de manière assez chaotique. Cela a encore été le cas lundi, la séance a été ajournée pour des litiges de procédure. Le procès n'a toujours pas commencé alors qu'il devait se tenir en novembre 2021.
Un effet dissuasif pour les humanitaires
Ces méthodes finissent par avoir raison de l'engagement des humanitaires, à titre individuel d'abord. Si Sarah Mardini avoue aujourd'hui souffrir de dépression, si elle a abandonné ses études, c'est en grande partie à cause de ses démêlés judiciaires, bien plus difficiles dit-elle que la prison ou la traversée de la Méditerranée.
Cette judiciarisation de l'aide humanitaire a aussi des conséquences collectives. Puisque face à la multiplication des procédures, les ONG de sauvetage de migrants ont quasiment toutes cessé leurs opérations au large de la Grèce, laissant cette tâche aux garde-côtes. Qui sont, eux, accusés de refouler illégalement les embarcations vers les eaux territoriales de la Turquie.
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