"Bien plus symbolique qu'utile" : obtenir le diplôme du brevet sert-il encore à quelque chose ?
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Alors que plus de 865 000 élèves de troisième attendent les résultats du brevet à partir de lundi, certains se demandent à quoi va bien pouvoir leur servir ce diplôme national.
Mathématiques, français, sciences, histoire-géographie et enseignement moral et civique : voilà les quatre matières sur lesquelles ont planché les candidats au brevet. Les premiers résultats sont attendus lundi 7 juillet pour Mayotte et la Corse puis s'échelonneront jusqu'à jeudi pour les autres académies.
A partir de l'année prochaine, ces quatre épreuves représenteront 60% de la note finale de ce diplôme national, contre 50% actuellement. Les 40% restants seront constitués des moyennes trimestrielles. De cet énième changement de notation du brevet, l'historien de l'éducation Claude Lelièvre n'est pas étonné : "On n'a jamais vraiment su à quoi il sert et ce qu'il est." Preuve en est, selon lui, les nombreuses dénominations de "cet examen malheureux" depuis sa création au XIXe siècle : du brevet élémentaire au brevet d'études du premier cycle (BEPC), en passant par le brevet des collèges et enfin l'actuel diplôme national du brevet (DNB).
Un pied à l'étrier avant le bac
Peu importe son nom, cet examen joue toujours son rôle de petit frère du bac. Premier diplôme national et universel, le brevet sert d'entraînement :"Ça permet d'apprendre à se préparer, à réviser un programme annuel", détaille Jérôme Fournier, professeur d'histoire-géographie et secrétaire national du syndicat SE-Unsa. Pour son homologue au syndicat des chefs d'établissement (SNPDEN), Audrey Chanonat, principale d'un collège en Charente, "le brevet n'est pas inintéressant, il initie aux conditions particulières d'un examen". De son côté, la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) plaide pour la "sanctuarisation de ce rituel de passage jalonnant l'enfance" qui "apprend à se préparer à une échéance et à répondre à des attendus", appuie son vice-président national, Grégoire Ensel.
Pour être reçu, un candidat doit obtenir 400 points sur 800. Le socle commun de connaissances, que tout élève doit maîtriser à la fin de la scolarité obligatoire, rappelle le ministère de l'Education, est évalué en contrôle continu et compte pour 400 points. Les épreuves écrites de fin d'année sont donc parfois considérées comme une formalité, car le candidat peut être sûr d'avoir son brevet avant même de composer. "Les élèves ne voient pas l'intérêt de perdre du temps à le préparer, rapporte Jérôme Fournier, ils ne le prennent pas au sérieux parce qu'il n'y a ni finalité immédiate, ni enjeu pour la poursuite d'études." De ce fait, l'Unsa se dit "prête à voir disparaître le brevet", estimant qu'il "n'est pas très utile dans sa forme actuelle".
Passerelle vers la fonction publique, pas vers le lycée
Lorsque Gabriel Attal était ministre de l'Education nationale, l'une de ses volontés était de réformer le brevet pour lui donner un nouveau souffle. C'est ce qu'il a tenté de faire en lançant le "choc des savoirs" en 2023. Il avait notamment annoncé que le diplôme serait, à partir de la rentrée 2025, obligatoire pour permettre le passage des élèves en seconde générale et technologique. Mais cette mesure a été abandonnée par la ministre actuelle, Elisabeth Borne.
Un soulagement pour les syndicats enseignants et les fédérations de parents d'élèves interrogés par franceinfo, qui ont tous lutté pour que le brevet ne devienne pas un sésame obligatoire pour la poursuite d'études. "Le brevet est indépendant de l'accès au lycée, et heureusement ! se félicite Grégoire Ensel. C'est un objectif de fin de scolarité, pas un examen qui ouvre les portes du lycée." Pour autant, supprimer le brevet "serait une bêtise, parce que les élèves ont besoin d'être évalués pour éviter d'être mis en échec au lycée", estime Sylvain Duyck, de la Peep.
Ce ne sont pas les recruteurs de la fonction publique qui vont le contredire. En effet, le diplôme national du brevet est le premier niveau de recrutement des fonctionnaires, via les concours de catégorie C. Avec le brevet en poche, on peut par exemple prétendre aux concours de surveillant pénitentiaire, policier municipal, auxiliaire de puériculture, magasinier des bibliothèques, garde champêtre ou sapeur-pompier professionnel. Des perspectives de carrière qui "ne parlent pas du tout aux enfants. Eux, ils veulent obtenir leur brevet uniquement pour avoir une mention", tranche Audrey Chanonat. Elle estime en outre que "le DNB n'a pas de réelle reconnaissance dans le monde du travail. Il est bien plus symbolique qu'utile."
"Il y a d'autres priorités" qu'une réforme du brevet
En 2025, les nouveautés sont loin de ce qu'espérait Gabriel Attal. Une nouvelle mention "très bien avec félicitations du jury" est instaurée pour un résultat final supérieur à 18/20, et deux notes distinctes sont attribuées en histoire-géographie et en éducation morale et civique. Mais les syndicats d'enseignants et les fédérations de parents d'élèves interrogés par franceinfo n'en attendaient pas forcément plus. "A la Peep, on ne reçoit pas de demandes de réforme du brevet, parce qu'il y a d'autres priorités bien plus urgentes. Les politiques s'attardent sur des examens alors que le sujet est ailleurs, du côté de l'échec scolaire, de la santé mentale, de l'orientation professionnelle", argue Sylvain Duyck. Il est soutenu par son homologue de la FCPE, Grégoire Ensel, pour qui "'le choc des savoirs' est la mauvaise réponse : le système invente de nouvelles contraintes parce qu'il n'arrive pas à corriger ses défaillances, ça revient à prendre le problème à l'envers."
Même son de cloche du côté du SNPDEN, où Audrey Chanonat dénonce "la 'réformite' qui tue l'Education nationale : il ne nous faut pas une énième réforme du brevet, mais des moyens humains et financiers supplémentaires pour mettre suffisamment de professeurs devant des classes pas surchargées."
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