Suicide d'une directrice d'école : "Elle a été lâchée" et "pointée du doigt" par l'Éducation nationale, dénonce l'enseignant qui avait raconté son histoire dans une BD

Christophe Tardieux, alias Remedium, avait raconté l'histoire dans une bande dessinée de cette directrice d'école dans le Cantal, victime d'insultes et de menaces homophobes. Elle s'est suicidée lundi, le jour de la rentrée.

Article rédigé par franceinfo
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La directrice d'une école dans le Cantal s'est suicidé après avoir reçu des insultes et des menaces homophobes. (JEREMIE FULLERINGER / MAXPPP)
La directrice d'une école dans le Cantal s'est suicidé après avoir reçu des insultes et des menaces homophobes. (JEREMIE FULLERINGER / MAXPPP)

La directrice d'école du Cantal qui s'est suicidée après avoir été harcelée par un corbeau en raison de son homosexualité a été "lâchée" et "pointée du doigt" par l'Éducation nationale, dénonce mercredi 3 septembre sur France Inter et franceinfo Christophe Tardieux, un enseignant qui avait raconté son histoire dans une bande dessinée.

Caroline Grandjean, institutrice de 42 ans qui travaillait dans l'école primaire de Moussages, était victime depuis 2023 de tags homophobes et de menaces de mort. Une enquête avait été ouverte en 2024 pour "injure publique commise en raison de l’orientation sexuelle" et "menace de mort commise en raison de l’orientation sexuelle". Enquête classée en mars dernier par le parquet d'Aurillac. L'enseignante a été retrouvée morte lundi matin à Anglards-de-Salers, près de son domicile.

Une "absence de soutien de l'Éducation nationale"

L'institutrice avait contacté en janvier 2025 Christophe Tardieux, alias Remedium, auteur de la BD Cas d'école (éditions des Équateurs), et lui avait confié se sentir très seule face à ces menaces, déplorant "l'absence de soutien de sa hiérarchie". "Elle sentait que son histoire était un peu mise sous le tapis, elle avait l'impression que l'Éducation nationale l'avait oubliée et l'enquête sur le corbeau n'avançait pas, raconte Christophe Tardieux. Elle était touchée par les insultes. Mais au-delà de ça, ce qui l'a le plus marquée, c'était l'absence de soutien de l'Éducation nationale."

"Elle s'est beaucoup plaint du fait que la hiérarchie ne prenait pas la mesure de ce qui se passait, qu'elle recevait des remarques désobligeantes ou qu'on remettait en question le fait que peut-être, ça venait d'elle, qu'il y avait quelque chose qu'elle avait mal fait pour recevoir de telles insultes", poursuit le dessinateur, lui-même enseignant. Caroline Grandjean avait également très mal vécu la proposition de mutation pour la rentrée de septembre 2024, qu'elle avait déclinée, car "elle était victime et ne voulait pas être déplacée, ce n'était pas à elle de partir", dit Christophe Tardieux. Le rectorat de Clermont-Ferrand avait fait valoir qu'il s'agissait d'une "mesure de protection" et non d'une "punition".

"Elle a été plus que lâchée, elle a été pointée du doigt" par l'Éducation nationale, dénonce l'enseignant. "Ça l'a énormément blessée" et "fortement affectée". Elle espérait que la publication de la bande dessinée pourrait relancer l'enquête mais "la seule réaction de l'Éducation nationale a été de porter plainte contre la bande dessinée", affirme-t-il.

L'enseignant dénonce plus largement "des violences systémiques dans l'Éducation nationale, une gestion toxique des personnels qui conduit les personnes les plus fragiles à ce genre d'extrémité, une mécanique qui se répète systématiquement lorsqu'il y a des problématiques de ce genre" et "une rhétorique déployée par les communicants de l'Éducation nationale mais au final, rien n'est jamais fait".

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