: Vidéo "On peut mourir d'enseigner en France", s'indigne le Snes-FSU qui pointe "un sentiment d'abandon" chez les enseignants après un nouvel incident au collège
Une professeure de français est accusée d'islamophobie et de racisme pour avoir montré un tableau de la Renaissance à ses élèves. Cela "montre que certains continuent de contester ce qu'on fait dans nos cours", pointe le syndicat national des enseignements de second degré.
"Ce qui a fait déborder le vase" chez les enseignants, "c'est le sentiment d'abandon", déplore mardi 12 décembre sur franceinfo Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat Snes-FSU, alors que l'équipe pédagogique du collège Jacques-Cartier d'Issou (Yvelines) a exercé son droit de retrait vendredi 8 décembre, après qu'une professeure de français a été la cible d'accusations de racisme et d'islamophobie. Elle avait présenté à sa classe un tableau de la Renaissance, Diane et Actéon, sur lequel cinq muses dénudées laissent apparaître leurs seins.
franceinfo : Dans quel état d'esprit sont les enseignants du collège Jacques-Cartier d'Issou ?
Sophie Vénétitay : Aujourd'hui, ils se rendent compte que cette affaire a eu un écho considérable. Ils disent aussi que c'est terriblement révélateur d'en arriver là pour obtenir ne serait-ce que l'attention de l'institution et pour obtenir des moyens. Certes, ils étaient en droit de retrait vendredi après cet incident, mais c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase dans un climat scolaire très dégradé. Aujourd'hui, ils nous disent : "On a été abandonnés pendant des semaines, on a tiré la sonnette d'alarme, on a dit que le climat scolaire était dégradé et personne ne nous a répondu. Et il faut qu'on en arrive dans cette situation pour que tout d'un coup, tout le monde débarque au collège et nous dise effectivement 'c'est grave et vous allez être aidés'". Donc d'un côté, ils ont obtenu des moyens supplémentaires, mais il y a certainement un peu d'amertume d'en être arrivés là pour être entendus.
Gabriel Attal, sur place lundi, est venu dire qu'à l'école française, on ne négocie ni l'autorité de l'enseignant, ni l'autorité de nos règles et de nos valeurs. Ça, c'est important ?
Oui, il l'avait déjà dit. Je me souviens que lors de son arrivée rue de Grenelle, il avait dit que si des enseignants voyaient leur autorité bafouée, il serait toujours à leurs côtés. Il n'empêche que là, pendant des semaines, on a des collègues qui ont été seuls face à des remarques de parents, seuls face à la dégradation du climat scolaire, sans aucune réponse de l'institution. C'est bien beau que Gabriel Attal parle beaucoup, se déplace, mais sur le terrain, qu'est-ce qui change ? Des collèges où le climat scolaire est dégradé parce que vous manquez de conseillers principaux d'éducation (CPE), de surveillants, d'assistants d'éducation (AED), de professeurs... il y en a un grand nombre. On se retrouve à tenir à bout de bras les établissements scolaires et au bout d'un moment, ça craque parce qu'on n'y arrive plus. Combien va-t-il falloir de collèges qui sont dans cette situation pour que le ministre se rende compte qu'il faut soutenir les équipes et renforcer les moyens ?
Dans ce collège des Yvelines, on a les ingrédients qui ressemblent beaucoup à l'engrenage infernal qui avait mené à l'assassinat de Samuel Paty. La rumeur, le mensonge, une incompréhension du rôle de l'école, de certains parents vindicatifs qui s'expriment parfois sur les réseaux sociaux. C'est ça qui choque les enseignants ?
C'est ce qui explique en tout cas que cette affaire ait eu un écho particulier dans la profession. Forcément, le point de départ, c'est-à-dire un cours qui est contesté par les élèves, des rumeurs qui circulent sur notre collègue, tout ça rappelle de mauvais souvenirs. Surtout, ça montre que certains continuent de contester ce qu'on fait dans nos cours et on sait qu'on peut malheureusement mourir d'enseigner en France. Et ça, ça a durablement marqué la profession.
"On fait ce métier pour les jeunes. On fait ce métier pour les faire grandir, pour les ouvrir au monde qui les entoure. Et ça doit être respecté par tout le monde, y compris les parents d'élèves."
Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat Snes-FSUà franceinfo
On a besoin de soutien et de protection, bien évidemment de la part du ministre, de la part des directeurs académiques, des recteurs.
Notamment sur les questions de laïcité ?
On sait que ce sont des sujets qui peuvent frotter un peu. Notre rôle, c'est justement d'ouvrir les élèves à ces questions-là. Et c'est vrai que, dans ce contexte où il peut y avoir des questions sur ce qu'on fait, il faut le soutien de tout le monde. Là, comment expliquer que pendant trois semaines, personne à la direction académique n'ait répondu aux appels à l'aide des collègues ? Ce qui a fait déborder le vase, c'est bien évidemment ces violences, mais aussi ce sentiment d'abandon. On nous dit que l'école est au cœur de la République, au cœur de notre modèle social. Il ne faut pas que des mots, il faut des actes.
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