Rat apporté au tribunal par un avocat : "Il a eu 1 000 fois raison et je lui dis bravo", réagit la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté

Au lendemain de la plaidoirie choc d'un avocat au tribunal de Paris, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté salut l'initiative. Mardi, l'avocat Romain Boulet est arrivé à l'audience avec un rat pour dénoncer les conditions de détention de son client.

Article rédigé par franceinfo
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Le centre pénitentiaire de Fresnes. (LP/ PHILIPPE DE POULPIQUET / MAXPPP)
Le centre pénitentiaire de Fresnes. (LP/ PHILIPPE DE POULPIQUET / MAXPPP)

Pour la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot, l'avocat Romain Boulet a eu raison de venir avec un rat au tribunal de Paris mardi 15 juillet pour dénoncer les conditions d'hygiène de certaines prisons françaises : "Il a eu 1 000 fois raison et je lui dis bravo, d'ailleurs, ça a marché."

L'avocat a apporté un rat lors d'une audience de prolongation de la détention provisoire de son client devant le tribunal de Paris. "Je ne suis pas venu tout seul", a déclaré Romain Boulet en s'approchant du juge des libertés et de la détention (JLD). "Voici Marie-Madeleine, que j'ai attrapée ce matin sur le parking de la maison d'arrêt de Nanterre". À la barre, l'avocat a justifié sa démarche par ses nombreuses procédures infructueuses engagées pour dénoncer l'indignité des conditions de détention de ses clients et auxquelles l'administration répond systématiquement qu'il "ne présente pas assez de preuves".

"On laisse pourrir les détenus"

Pour Dominique Simonnot, ce qu'a dit l'avocat est "très vrai". "Il a dit très justement, 'Si je lâche le rat, la salle est évacuée, mais dans la prison de Nanterre il ne se passe rien'". La contrôleuse générale des lieux de privation de liberté estime qu'on doit "prendre conscience des conditions dans lesquelles on laisse pourrir les gens, les détenus".

Elle rappelle que la prison a la fonction de punir, "c'est normal", mais "on doit être punis dans des conditions normales". Elle explique que la prison a aussi pour fonction de "réinsérer" : "Je ne crois pas qu'on puisse croire aux devises de la République quand on est détenus dans ces conditions au milieu des bestioles".

À Nanterre, le taux d'occupation de la maison d'arrêt est de 200%

Dans la maison d'arrêt de Nanterre, le taux d'occupation atteint les 200% avec 1 160 détenus pour 592 places et au moins 130 matelas au sol. Questionnée sur la manière à adopter pour sortir de la surpopulation chronique, Dominique Simonnot répond : "On fait sortir du monde comme on l'a fait du temps du Covid. Pendant le Covid, c'était une urgence vitale. C'est aussi une urgence vitale. Il y a eu cinq morts dans les prisons ces derniers mois, tués par leurs codétenus fous. On a perdu tout sens commun en laissant les choses aller comme ça".

Questionnée sur la prison de haute sécurité de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) qui doit accueillir les 100 détenus les plus dangereux issus de la criminalité organisée, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté se dit inquiète sur l'isolement des détenus. "C'est impossible d'isoler quelqu'un totalement, sous peine de rendre les gens fous. On ira vérifier le régime que les gens incarcérés là subissent. Il ne faut pas fabriquer des usines à malades mentaux, parce que l'isolement total c'est très dangereux."

Au 1er juin 2025, le nombre de détenus dans les prisons françaises était de 84 447 pour 62 566 places opérationnelles, selon les données du ministère de la Justice.

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