Open d'Australie : "Il va se répandre comme un raz-de-marée"... Pour la première fois, le pickleball prend place au sein d'un Grand Chelem

"L'Australian Open Pickleball Slam" est organisé à Melbourne Park, dans l'enceinte de l'Open d'Australie, sur les trois derniers jours du Majeur. Parmi les 24 joueurs engagés, deux Français ont été invités.

Article rédigé par Apolline Merle - envoyée spéciale à Melbourne (Australie)
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
Le premier tournoi du Grand Chelem de pickleball a débuté le 24 janvier 2025, sur l'un des courts de l'Open d'Australie, devant moins d'une centaine de spectateurs. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)
Le premier tournoi du Grand Chelem de pickleball a débuté le 24 janvier 2025, sur l'un des courts de l'Open d'Australie, devant moins d'une centaine de spectateurs. (APOLLINE MERLE / FRANCEINFO SPORT)

C'est un pas de géant pour ce nouveau sport en plein développement. Pour la première fois de son histoire, le pickleball est à l'honneur dans un Majeur de tennis. L'Open d'Australie organise l"'Australian Open Pickleball Slam", un tournoi de pickleball du 24 au 26 janvier, avec un prize money de 100 000 dollars australiens (60 250 euros) à la clé. Quel est ce nouveau sport ? Un mélange de tennis de table, de tennis et de badminton, sur un terrain dont la longueur correspond à la largeur d'un terrain de tennis.  

A Melbourne, pour l'occasion, le court numéro 3, situé en face du Margaret court et à quelques encablures de la Rod Laver Arena où Madison Keys a triomphé de la numéro un mondiale, en finale, samedi, a été transformé pour accueillir deux terrains, au revêtement bleu et vert, entourés d'un gazon synthétique. Pendant trois jours, les meilleurs joueurs du monde vont s'y affronter jusqu'à la finale. Tout au long de la journée, vendredi 24 janvier, les tribunes sont restées bien vides, même si elles ont gagné quelques dizaines de spectateurs à l'issue de l'abandon précoce de Novak Djokovic, lors de sa demi-finale face à Alexander Zverev. Parmi eux, Jordan, habitant de Sydney, a profité de ce match raccourci pour observer, pour la première fois, une compétition de pickleball professionnelle. "Je pratique le pickleball depuis quelques années, et j'aime beaucoup ce sport, car il est facile à pratiquer. La dimension physique est plus accessible qu'au tennis", admet-il. 

Hausse exponentielle de pratiquants

Malgré le peu de visiteurs lors de cette première journée, il s'agit d'un tournant pour la discipline qui connaît un véritable engouement à travers le monde. Inventé aux Etats-Unis dans les années 1960, le pickleball a explosé pendant la pandémie de Covid-19. Alors que la Fédération américaine recensait "seulement" quatre millions de pratiquants réguliers en 2020, elle en comptait près de 14 millions en 2024, soit une augmentation de 250 %. 

De quoi placer ce nouveau sport "dans la même catégorie que le baseball (16,7 millions), le soccer (14,1 millions) et le ski alpin (13,1 millions)", analysait en février 2024 le média américain Sportico. Il faut dire que d'anciennes grandes stars de la petite balle jaune (Andre Agassi, Steffi Graf, John McEnroe, Maria Sharapova, Eugénie Bouchard, Andy Roddick...) l'ont popularisé avec des matchs très "show à l'américaine".

La France n'a pas échappé à cette mode. "La croissance est exponentielle, analyse Caroline Dhenin, ancienne joueuse de tennis professionnelle de 51 ans, reconvertie au pickleball depuis cinq ans. On est encore au début. Mais le pickleball va débarquer comme un raz-de-marée", prédit celle qui est invitée pour le tournoi à Melbourne. Intégré dans le giron de la Fédération française de tennis (FFT) depuis janvier 2024, le pickleball a déjà conquis 13 000 pratiquants officiels dans l'Hexagone en 2025, d'après les chiffres de la FFT. Ils n'étaient que 1 400 un an plus tôt, soit une augmentation de plus de 800 %.

De fait, ce sport a de nombreux atouts à faire valoir. "Déjà, c'est un sport très convivial et accessible physiquement, commence Cyril Peltier, meilleur joueur français, qui a, lui aussi, bénéficié d'une invitation pour l'Open d'Australie. On n'a pas besoin d'être athlétique pour débuter. Et techniquement, on prend du plaisir dès les premiers échanges. Le pickleball a aussi un côté stratégique, comme une partie d'échecs, où on doit déplacer l'adversaire pour créer des espaces et ensuite être le plus rapide à la volée. Il faut être vif et explosif." Caroline Dhenin le voit comme "un sport très facile d'accès, où on peut mettre quatre terrains sur un court de tennis. On peut s'amuser sans avoir de bagage technique, ni de qualités athlétiques." 

"On peut jouer avec des personnes de tous âges et de tous niveaux, c'est un sport intergénérationnel. Ce sport a été inventé pour les familles."

Caroline Dhenin, joueuse française de pickleball

à franceinfo: sport

Selon la doyenne de la compétition, si l'engouement est si fort, c'est aussi parce qu'il répond à l'évolution de la société. "Les gens veulent s'amuser rapidement et se rassembler. Ce sport est fait pour ça", ajoute-t-elle. Autant d'avantages qui permettent de rassembler un large public, de tous horizons.

Profiter de l’exposition de l'Open d’Australie

Avec cette intégration à l'Open d'Australie, la discipline s'offre une exposition inédite. "Que le pickleball soit reconnu par un tournoi du Grand Chelem comme celui-ci en Australie, sur son propre site, pendant la quinzaine, est absolument génial pour notre sport", s'est réjoui Zack Taylor, joueur américain en amont de sa compétition. "Nous voulions utiliser la plus grande plateforme que nous ayons, à savoir l'Open d'Australie, pour en faire la démonstration au plus grand nombre. Ce sport est là pour durer", assure Callum Beale, le directeur du tournoi.

"C'est le début d'une ère. Ici, ils disent que nous sommes les pionniers. Le pickleball est enfin reconnu par le grand frère, qui l’accueille sur son lieu de compétition."

Caroline Dhenin, joueuse française de pickleball

à franceinfo : sport

Et il n'est pas anodin que ce premier tournoi organisé dans le cadre d'un Grand Chelem de tennis, le soit en Australie. Ici, la plupart des clubs de tennis ont une section pickleball à proposer à leurs adhérents. "Il y a un intérêt évident que nous l'intégrions de manière plus formelle. Nous pensons que le moment est bien choisi, que sa croissance et sa maturité sont sur la bonne voie, pour aller vers ce genre de tournoi", poursuit Callum Beale. Un constat que confirme le joueur français Cyril Peltier : "Ils ont de l'avance sur nous. On peut notamment le voir avec le nombre de joueurs de haut niveau qu'ils ont, où plus de la moitié sont Australiens."

La discipline voit déjà grand

Cette présence dans un Grand Chelem est une première étape, avant de voir plus grand. Pour le directeur du tournoi, le prochain objectif est d'organiser "des compétitions tout au long de l'année" pour normaliser le circuit et de continuer à "créer des terrains pour donner le plus d'opportunités possible aux Australiens de jouer au pickleball", tout en assurant que tous les sports de raquettes, de plus en plus nombreux, se développent "en harmonie", sans faire de l’ombre aux uns et aux autres.

Caroline Dhenin (au centre) a été invitée au premier Grand Chelem de pickleball, à l'Open d'Australie, le 24 janvier 2025, à Melbourne. Elle pose avec ses coéquipiers, tirés au sort, lors de ce tournoi. (Tennis Australia)
Caroline Dhenin (au centre) a été invitée au premier Grand Chelem de pickleball, à l'Open d'Australie, le 24 janvier 2025, à Melbourne. Elle pose avec ses coéquipiers, tirés au sort, lors de ce tournoi. (Tennis Australia)

"Les chiffres explosent, cela ne m'étonnerait pas que le pickleball rattrape le padel", estime Cyril Peltier. Il est vrai que sa croissance est telle qu'il pourrait bien, à terme, faire de l'ombre à cet autre sport de raquette en vogue [sur un terrain entouré de vitres], plus coûteux à mettre en place. En France, ce dernier compte plus de 500 000 pratiquants en 2024, soit environ 39 % de plus qu’en 2022, d'après la FFT.

"Le développement du pickleball n'est pas forcément plus fort que le padel, mais il va devenir tout aussi important, tranche Zack Taylor. Il a d'ailleurs déjà été question que le pickleball fasse partie des Jeux olympiques, et je pense que nous sommes très proches d'y parvenir en termes de portée mondiale." La discipline ne sera pas ajoutée aux prochains JO à Los Angeles 2028, qui a déjà annoncé ses sports additionnels, mais celle-ci pourrait être étudiée pour les Jeux de 2032, qui auront lieu à Brisbane, en Australie.

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