On vous explique en quatre points comment le drapeau du manga "One Piece" est devenu le symbole de révolte pour la jeunesse
Brandi lors de manifestations aux quatre coins de la planète, l'étendard de pirate facilement identifiable de l'œuvre du mangaka japonais Eiichiro Oda prend aujourd'hui un nouvel écho.
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C'est une tête de mort coiffée d'un chapeau de paille. Blanche sur fond noir : un drapeau de pirate. Issu du navire des protagonistes du manga One Piece, il a été brandi, porté en étendard par de nombreux manifestants : à Madagascar, aux Philippines – où il a même été menacé d'interdiction par le gouvernement – ou plus récemment en France, aperçu lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. Pourquoi l'utilisation d'un tel symbole ? Quatre éléments de réponse.
1"One Piece" a conquis le monde
Peut-être que le jeune pirate au chapeau de paille, au veston rouge et à la cicatrice sous l'œil gauche vous est familier. Depuis près de trente ans, Monkey D. Luffy et son équipage de bras cassés, créés par le mangaka Eiichiro Oda en 1997, sillonnent les mers à la recherche du One Piece, trésor légendaire et très bien caché.
One Piece est tout simplement le manga le plus vendu au monde, avec plus de 500 millions d'exemplaires écoulés à travers le globe, traduit en plus de 40 langues. Depuis 1997, 112 tomes ont été publiés au Japon, 109 en France – un décalage dû au temps de traduction. L'écriture est toujours en cours : la parution du 113e tome est annoncée pour novembre.
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2Une œuvre politique
Pourquoi le logo de cette histoire de pirates chasseurs de trésor se retrouve-t-il au milieu des manifs ? Parce que derrière son aspect pop, drôle et épique, Eiichiro Oda – seul maître à bord de sa création – a bâti une œuvre bien plus complexe qu'il n'y paraît. C'est ce qu'explique Phédra Derycke dans son essai One Piece - Leçons de pouvoir : "L'univers de One Piece est irrigué d'enjeux politiques, et ce, dès les débuts de l'œuvre ", écrit-il dans son introduction.
Dès les premiers tomes, l'opposition entre les pirates, dont font partie Luffy et son équipage, et la Marine, un ordre militaire organisé et puissant qui règne sur les océans, est au cœur du récit. Derrière cette Marine, se cache un Gouvernement mondial aux ramifications multiples.
Au fil des tomes, en combattant la Marine et en renversant des chefs tyranniques, Luffy devient peu à peu un symbole de rébellion et de justice face à un pouvoir central corrompu et monopolistique.
3Un écho pour la jeunesse d'aujourd'hui
En août 2025, des citoyens ont brandi le drapeau de One Piece en Indonésie, pour protester contre un gouvernement jugé corrompu. Les autorités ont même menacé de l'interdire. En septembre, un mouvement de révolte, largement relayé sur les réseaux sociaux, a gagné plusieurs pays de l'océan Indien. Après Katmandou, des manifestations ont éclaté au Népal et à Madagascar, menées principalement par des jeunes – la génération Z (nés entre 1997 et 2012).
Leurs revendications sont similaires : dénoncer des systèmes politiques défaillants, inégalitaires et élitistes. Le drapeau au crâne et au chapeau de paille a alors défilé dans tous les cortèges et envahi les réseaux sociaux. Le compte "@gen_z_madagascar", à l'origine des manifestations sur la "grande île", en a même fait son symbole.
"J'ai grandi avec One Piece, comme la grande majorité de la Gen Z, donc c'est devenu un symbole pour nous", explique "Kai", un jeune Malgache de 26 ans, interrogé par l'AFP sous pseudonyme. Pour lui, One Piece porte un message clair : une lutte contre les gouvernements oppressifs.
Le 7 octobre, le drapeau pirate a de nouveau été aperçu, lors de manifestations en soutien à Gaza au Mexique et au Brésil, ou encore contre les politiques gouvernementales en Équateur.
4 La pop culture, symbole de ralliement
Interrogée par l'AFP, Élisabeth Soulié, anthropologue et autrice de La Génération Z aux rayons X, souligne la dimension émotionnelle de ce symbole "unificateur". "Cette image contient de l'affect, des émotions, et celles-ci circulent à travers des représentations qui permettent de se mobiliser ", explique-t-elle, rappelant que la génération Z s'engage autant en ligne que sur le terrain, de façon collective, sans leader désigné.
Ainsi, le héros imaginé par Eiichiro Oda est devenu, presque malgré lui, un emblème de la lutte des opprimés. Mais il n'est pas le seul : en 2021, les manifestants birmans, à la suite du coup d'État militaire du 1er février, avaient adopté le salut à trois doigts levés vers le ciel, tiré de la saga américaine Hunger Games. Ce geste avait déjà été repris lors des grandes manifestations étudiantes pro-démocratie en Thaïlande en 2020. Facilement identifiables et largement partagés, ces symboles issus de la culture populaire se diffusent sur les réseaux sociaux par mimétisme, créant de nouveaux langages universels de contestation.
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