Procès du financement libyen : le parquet charge Nicolas Sarkozy, "véritable décisionnaire et commanditaire" du "pacte de corruption" avec Mouammar Kadhafi
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Les trois procureurs du Parquet national financier ont entamé mardi leur réquisitoire, prévu pour durer deux jours et demi. Ils annonceront les peines requises jeudi en fin de journée.
"Des explications extravagantes" et "des contre-vérités flagrantes". Dès le début de ses réquisitions, le ministère public a dénoncé, mardi 25 mars, l'attitude que les prévenus ont eue pendant le procès des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle 2007 de Nicolas Sarkozy, qui se tient depuis le 6 janvier devant le tribunal correctionnel de Paris.
Ce mardi après-midi, premier jour de réquisitoire, un premier magistrat du Parquet national financier (PNF) prend la parole, sous le regard de l'ex-chef de l'Etat, arrivé sans faire de déclaration face à la presse. "Ce procès n'est pas celui d'une classe politique globalement défaillante sur le plan de la probité", déclare le procureur Philippe Jaeglé. Il soutient qu'il s'agit "au contraire" du procès "d'un groupe d'individus qui n'ont pas hésité à s'engager avec des intermédiaires douteux".
Dans cette affaire, Nicolas Sarkozy est soupçonné d'avoir noué fin 2005, avec l'aide de ses proches Brice Hortefeux et Claude Guéant, un "pacte de corruption" avec le dictateur libyen Mouammar Kadhafi, afin qu'il soutienne financièrement sa campagne électorale pour la présidentielle de 2007, qu'il a remportée. "Un pacte de corruption qu'on peut considérer comme inconcevable, inouï et indécent", pointe le parquet dans l'introduction de son réquisitoire. "Inconcevable, inouï et indécent" : le procureur Philippe Jaeglé répète ces termes quatre fois.
"On nous ressort l'excuse du piège et du guet-apens"
Nicolas Sarkozy, assis sur le banc des prévenus en costume cravate sombre sur une chemise bleu clair, écoute avec attention et prend des notes sur des feuilles posées en tas sur une tablette à sa droite. L'ancien président âgé de 70 ans comparaît pour corruption, recel de détournement de fonds publics, financement illégal de campagne et association de malfaiteurs. Depuis l'ouverture du procès, il y a dix semaines, il n'a cessé de clamer son innocence, et lors du dernier tour des questions aux prévenus, il a à nouveau balayé les accusations à son encontre, sous le regard de son épouse Carla Bruni-Sarkozy.
Les trois représentants du ministère public, Quentin Dandoy, Philippe Jaeglé et Sébastien de la Touanne, s'évertuent à faire preuve de pédagogie, en s’appuyant sur des documents projetés sur grand écran dans la salle d'audience. Une frise chronologique avec des dates précises s'affiche à l'écran, lorsque Quentin Dandoy revient sur les événements autour de la première rencontre entre Mouammar Kadhafi et Nicolas Sarkozy. La visite, organisée à Tripoli, le 6 octobre 2005, a permis de nouer le "pacte de corruption", selon les juges d'instruction. Avant et après cette visite, Claude Guéant et Brice Hortefeux ont eux aussi réalisé des déplacements en Libye.
L'ancien bras droit de Nicolas Sarkozy, ainsi que son ex-ministre et ami fidèle, ont répété à l'audience avoir été piégés par l'intermédiaire Ziad Tiakieddine. Le Franco-Libanais, en fuite au Liban et jugé en son absence, leur a fait rencontrer, hors de tout circuit officiel, l'ancien chef du renseignement militaire libyen Abdallah Senoussi. Or, cet homme, beau-frère de Mouammar Kadhafi, a été condamné en 1999 à la perpétuité par la justice française pour son rôle dans l'attentat contre le DC-10 de la compagnie UTA, dans lequel 54 Français sont morts. "Face à l'inconcevable et la brutalité des faits", estime Quentin Dandoy, "on nous ressort l'excuse du piège et du guet-apens".
"On se moque de vous, Madame la présidente !"
Quentin Dandoy, procureurdevant le tribunal correctionnel de Paris
Le procureur élève la voix : "Le récit de la soirée apparaît comme peu crédible." Et il souligne la présence omniprésente, à chacune de ces rencontres, de l'homme d'affaires Ziad Takieddine, qui fait partie de ces "agents de corruption que l'on appelle pudiquement intermédiaires".
"Un homme porté par une ambition personnelle dévorante"
Si Quentin Dandoy insiste sur le rôle de Claude Guéant et Brice Hortefeux lors de leurs déplacements en Libye en octobre et en décembre 2005, c'est avant tout sur Nicolas Sarkozy qu'il se concentre. "Vous ne pourrez que constater que Nicolas Sarkozy est le véritable décisionnaire et commanditaire de cette opération", insiste-t-il en s'adressant au tribunal.
"Nicolas Sarkozy envoie Claude Guéant et Brice Hortefeux pour négocier et mettre en œuvre le pacte de corruption. On ne retrouvera jamais aucune trace écrite entre ces hommes qui se côtoient quotidiennement."
Quentin Dandoy, procureurlors du réquisitoire
"L'existence d'un faisceau d'indices graves et concordants vous permet sans aucune difficulté de caractériser ces délits, ce n'est pas une sous-preuve pour ceux qui n’ont pas de preuve véritable. Le faisceau d'indices est une preuve comme une autre, qui permet d'entrer en voie de condamnation", requiert Quentin Dandoy.
Le procureur demande ainsi la condamnation de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant et Brice Hortefeux pour corruption et association de malfaiteurs. Il requiert peu après la même chose pour Thierry Gaubert, également renvoyé dans cette affaire, pour association de malfaiteurs, en lien notamment avec un versement de 440 000 euros effectué début février 2006 sur son compte aux Bahamas.
En conclusion de sa première journée de réquisitions, Quentin Dandoy fustige encore Nicolas Sarkozy : "Derrière l'image de l'homme public, du ministre d'Etat, du président de la République, se dessine au gré des enquêtes judiciaires la silhouette d'un homme porté par une ambition personnelle dévorante, prêt à sacrifier sur l'autel du pouvoir les valeurs essentielles telles que la probité, l'honnêteté et la droiture."
Ce n'est qu'en fin de réquisitoire, soit jeudi en fin de journée, que le trio de magistrats du PNF détaillera les peines réclamées contre chacun des douze prévenus, dont l'ancien président de la République.
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