Salon de l'agriculture : "Les grands distributeurs ne respectent pas la loi EGalim", dénonce le président de l'Ania, l'association de l'agroalimentaire
Alors que les négociations commerciales, toujours plus tendues d'année en année, se terminent ce samedi 1er février, Jean-François Loiseau dénonce également les opérations de communication de la grande distribution au salon de l'agriculture.
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Les négociations commerciales entre les producteurs et le secteur de la grande distribution française ne sont pas près de calmer une colère agricole déjà bien exprimée en 2024. Si le dialogue est encore très tendu, l'arrivée au salon de l'agriculture de cinq patrons de la grande distribution française - ceux de Carrefour, Intermarché, Système U, Auchan et Casino - pour une rencontre inédite avec les agriculteurs, à l'initiative de Karine Lemarchand - la présentatrice vedette du groupe M6 et amie des agriculteurs -, devrait relancer les débats autour de la rémunération des producteurs. Les différents groupes ont déjà annoncé des initiatives pour soutenir les agriculteurs. "Une opération de communication", dénonce Jean-François Loiseau, président de l'Ania, principale association de l'agroalimentaire qui représente la quasi-totalité des 20 000 entreprises du secteur.
franceinfo : Est-ce que la grande distribution est en train de redorer son blason auprès des agriculteurs, selon vous ?
Jean-François Loiseau : Attention aux opérations de communication ! Il faut voir la réalité telle qu'elle est. Entre un produit agricole et un produit alimentaire, il y a ce qu'on appelle une chaîne de transformation et de valorisation. Le produit agricole - vous avez cité des produits animaux, des céréales, la betterave ou encore d'autres produits du sol - il faut bien qu'ils passent par un outil de transformation. Nous avons besoin de transformation si vous voulez proposer par exemple aux consommateurs des yaourts : entre le litre de lait et le yaourt, il y a une petite usine qui va faire un boulot, et ce boulot, il doit être rémunéré au juste prix. Parce que, en ce moment, ce n'est pas le cas.
"L'opération distributeur-agriculteur, ce n'est pas la vraie réalité."
Jean-François Loiseau, président de l’Aniafranceinfo
Les tensions sont extrêmes dans ces négociations commerciales qui se terminent samedi. Où en est-on dans ces négociations ?
À l'heure où nous nous parlons, elles ne sont pas terminées, et elles sont très tendues. Quels que soient les segments des entreprises : les grandes entreprises par exemple, on pense qu'elles peuvent tout avaler, tout absorber, mais c'est faux. Les petites, les moyennes et les grandes entreprises sont prises dans le même carcan : celui de quelques distributeurs. Nous sommes 20 000, vous l'avez rappelé. Moi, je représente 20 000 entreprises : elles sont familiales, elles sont internationales, elles sont coopératives.
"Face à ces 20 000 entreprises, il y a quelques distributeurs qui nous mettent une pression, et qui ne respectent pas les lois EGALIM, notamment celle de la fixation du prix agricole."
Jean-François Loiseau, président de l’Aniafranceinfo
La loi Egalim, qui garantit une meilleure rémunération des agriculteurs. Nous en sommes déjà à trois lois, la dernière ayant été promulguée en 2021.
C'est normal. Il faut préserver le revenu des agriculteurs si nous voulons un monde agricole fort pour des usines qui transforment. Mais je me permets de le dire : les distributeurs aujourd'hui emmènent nos entreprises en dehors de la France, dans d'autres pays pour négocier des conditions commerciales. Alors que les produits agricoles sont achetés en France, les usines sont en France, la réglementation est française et les produits vont être vendus en France. Et on nous demande d'aller négocier en Espagne parce que ce serait plus simple et surtout plus facile. Ce sont les fameuses grandes centrales d'achat européennes.
La grande distribution française ne respecte pas la loi ?
Mais, c'est exactement cela. La grande distribution ne respecte pas la loi sur la fixation de la matière première récolte - ça, c'est un point essentiel -. Et elle ne respecte pas la loi parce qu'elle veut nous emmener à l'international en nous expliquant qu'il y a des règles européennes qui le permettent. Moi, je regrette : il faut avoir un peu de bon sens, un réveil un peu national, au nom du patriotisme alimentaire. Si nous voulons faire du commerce en France, il faut que les règles de commerce se fassent sur le territoire français. Pourquoi écraser encore une fois le prix de l'usine, les prix agricoles et agroalimentaires des usines, alors que depuis 15 ans, nous subissons beaucoup trop de déflation ?
Êtes-vous d'accord avec le président de la République qui, lors de l'inauguration du salon, a affirmé qu'un travail était en cours pour réformer la structuration des prix, et que la loi Egalim est insuffisante ? Il en faut une nouvelle ?
C'est un peu le mal français : une loi encore pour essayer de mettre tout le monde sur le même niveau de discussion... Mais la France est le seul pays européen où les négociations commerciales se passent mal. Bien entendu, un rapport de force et c'est normal. Mais à un moment donné, même les distributeurs le disent : il faut créer de la valeur. Parce que si je ne crée pas de la valeur pour mes fournisseurs, notamment les industriels, ils vont fermer leurs usines et je ne pourrai pas vendre mes produits locaux.
Le consommateur qui nous écoute se demande s'il va payer plus cher ses produits dans les prochaines semaines ? Est-ce que vous êtes capable de nous le dire dès ce soir ?
Ce que l'on peut dire, c'est que sur 2024, l'inflation alimentaire a été négative, c'est-à-dire que les prix ont baissé. Force est de constater qu'il y a des prix de matières premières agricoles qui n'ont pas bougé. Mais à côté de cela, il y a les salaires qui augmentent, les emballages, les sujets de décarbonation aussi dont on ne parle pas, les sujets liés à l'IA, la formation, ou encore l'attractivité dans les territoires. Ça signifie qu'en fonction des filières, il y aura soit de la stagnation, soit des petites augmentations. Parce que la pression, je le répète, de la distribution est sans égale.
En fonction de certains produits agricoles, il pourrait y avoir des évolutions qui sont très basses. Mais je me permets de le dire, ça ne suffira pas pour assurer la pérennité durable de nos entreprises : sur les 20 000 entreprises, 98 % sont des PME, TPE.
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