Budget 2026 : "Le coût d'une crise politique serait bien plus élevé que celui de la suspension de la réforme des retraites", affirme David Amiel, ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat

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David Amiel, ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat, était l’invité politique de franceinfo lundi 20 octobre pour revenir sur le braquage au musée du Louvres et défendre le Budget de Sébastien Lecornu, qui passe en commission à l'Assemblée nationale lundi 20 octobre.

Ce texte correspond à la retranscription d'une partie de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.


Le projet de budget de Sébastien Lecornu est examiné lundi 20 octobre par la commission des Finances et arrivera à l'Assemblée nationale vendredi 24. Au programme, normalement : suspension de la réforme des retraites et non-utilisation de l'article 49.3.

Alix Bouilhaguet : Un mot d'abord sur ce cambriolage hier au musée du Louvre et déjà une polémique politique sur le manque de sécurité dans les musées. Pour Jordan Bardella, c'est même une insupportable humiliation et délitement de l'État.

David Amiel : Vous savez, ce qui s'est passé au musée du Louvre, c'est d'abord un crime contre notre histoire et notre culture. Et on a tous été saisis de front en l'apprenant dimanche matin. C'est un symbole, le Louvre, symbole aussi évidemment de notre histoire, celle du 19e siècle. Et je vois les polémiques qui surgissent ; au fond, elles surgissent toujours à n'importe quel sujet. On a une enquête judiciaire en cours. J'espère d'abord qu'on arrivera le plus rapidement possible à retrouver les coupables, à retrouver les bijoux qui ont été dérobés et évidemment à châtier les malfaiteurs.

Aujourd'hui, l'examen du budget en commission à l'Assemblée nationale débute. Premier jour d'un marathon qui doit finir, je le rappelle, au 31 décembre. Il peut passer ce budget ? Je rappelle aussi que c'est sans l'usage du 49.3 puisque Sébastien Lecornu y a renoncé.

Je suis convaincu qu'un compromis est possible. Et la meilleure preuve qu'un compromis raisonnable est possible, c'est qu'il a déjà eu lieu. Puisqu'en 2025, on a réussi à avoir un compromis entre le Parti socialiste, le Bloc central et les élus de la droite républicaine pour avoir un budget qui réduise le déficit, qui n'augmente pas les impôts sur l'immense majorité des Français et qui poursuive les investissements indispensables dans l'armée et dans la transition écologique. J'étais à l'époque le négociateur principal pour l'Assemblée nationale. On avait fait cet accord au début de l'année 2025 et je crois que s'il y a de la bonne foi de part et d'autre, si on sort des jeux de posture, on peut refaire la même chose pour l'année 2026.

Dans ce budget, Sébastien Lecornu s'est engagé à la suppression de la réforme des retraites. On n'a pas bien compris quel sera le véhicule législatif pour proposer cette suspension. Sébastien Lecornu avait évoqué un amendement du gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances de la Sécurité sociale, ce qui obligerait finalement les socialistes à voter ce budget. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon réclament une lettre rectificative soumise au Conseil d'État pour suspendre cette réforme. Est-ce que ça, c'est une option sérieuse ?

L'engagement du Premier ministre sera tenu. La discussion sur la forme, le véhicule, continuera évidemment à avoir lieu. Le Premier ministre et le ministre des Relations avec le Parlement travaillent. Mais vous savez, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ne cherchent au fond qu'une seule chose : c'est à faire que tout explose. Ils veulent rendre l'adoption de ce budget impossible pour créer une crise politique, sans doute une crise financière, et essayer ainsi de tirer les marrons du feu. Je crois qu'il faut garder beaucoup de sang-froid. On a réussi à construire une relation saine, stable. Le fait que le Premier ministre renonce à l'usage du 49.3 est un acte très important de confiance dans le Parlement et les engagements seront tenus.

Il n'y aura pas d'entourloupe ? C'est ce que redoutent les oppositions vis-à-vis de l'engagement qui est pris vis-à-vis du Parti socialiste sur cette suspension de la réforme des retraites. Elle existera bien à la fin, au 31 décembre ?

Bien sûr, l'engagement sera tenu. Il n'y aura évidemment aucune entourloupe.

Hier, le patron du Sénat, Gérard Larcher, a étrillé le choix d'Emmanuel Macron d'abandonner les marqueurs qui avaient, je le cite, "marqué ces huit années de mandat". Ce compromis se fait quand même sur le dos de l'équilibre financier des retraites. Il place aussi un petit peu la France à rebours de l'Histoire quand on voit les âges de départ à la retraite de nos voisins européens. Il n'a pas raison, Gérard Larcher ?

J'étais favorable à la réforme des retraites, mais je crois que le Premier ministre fait aujourd'hui preuve de réalisme et de sagesse. Il n'y a plus de majorité à l'Assemblée nationale pour permettre la poursuite de la réforme des retraites jusqu'en 2027. La suspension est donc un choix éminemment réaliste. Et un compromis, c'est aussi pouvoir faire des concessions de part et d'autre. Maintenant, bien sûr qu'il faudra, en 2027, avoir à nouveau un débat sur la question des retraites. Je suis ministre de la Fonction publique. Quand on regarde les chiffres, on a une dette qui augmente, on a des déficits qui sont importants, des impôts qui sont importants. Et pourtant, beaucoup de services publics qui sont à l'os, dans la police, dans la justice... C'est d'ailleurs la raison pour laquelle on y a réinvesti. L'explication, c'est évidemment qu'une grande part des dépenses publiques est absorbée par les dépenses de retraite. C'est la moitié de l'augmentation de la dette ces dernières années. Donc il faudra qu'on ait à nouveau, en 2027, un débat sur cette question des retraites. Aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, il n'y a pas de majorité pour pouvoir avancer dessus.

Encore un dernier mot sur ce sujet. On sent quand même que pour certains de vos camarades de Renaissance, la pilule de la suspension de la réforme des retraites, elle est dure à avaler. Si vous, vous étiez député, est-ce que vous leur auriez voté ? Vous voteriez sans état d'âme cette suspension ?

Mais à l'Assemblée nationale, il y a dans tous les cas une majorité, sans Renaissance, pour voter en faveur d'une suspension de la réforme des retraites.

Donc vous nous dites que vous vous seriez abstenu ?

Je ne suis pas parlementaire aujourd'hui. Je respecte beaucoup les députés Renaissance qui, effectivement, ont un devoir très difficile dans la période : celui de faire des compromis. Vous savez, un compromis, ça coûte dans les deux camps. Donc évidemment, ça nous coûte. Évidemment, on continue à penser que, sur le fond, la réforme des retraites était indispensable, nécessaire. Aujourd'hui, elle n'est pas possible. Et si nous avions une crise politique, une explosion de ce budget en plein vol, le coût pour les finances publiques serait bien plus élevé que celui de la suspension de la réforme des retraites.

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