Suspension de la réforme des retraites : "Ce retardement de la réforme ne peut pas effacer tout le reste", estime Benjamin Lucas-Lundy, député écologiste
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Après l'échec des deux motions de censure contre le gouvernement de Sébastien Lecornu, Benjamin Lucas-Lundy, député écologiste-NFP des Yvelines, est l'invité politique de franceinfo, vendredi 17 octobre.
Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.
Ces deux motions de censure rejetées sont un sursis ou une victoire pour le Premier ministre ?
Benjamin Lucas-Lundy : Cet échec du vote de la censure n'éteint pas, ne clôt pas la crise démocratique dans laquelle nous sommes. Au contraire, je crois même qu'il l'aggrave. Le Premier ministre obtient un sursis, mais je ne vois pas au bout du compte comment ce gouvernement, qui est le plus faible au Parlement de l'histoire de la Ve République, qui est le moins légitime de l'histoire de la Ve République, va tenir.
Vous parlez d'une crise démocratique, mais il est sauvé par la non-censure des socialistes. Est-ce que les socialistes ont changé de bord, ont changé de camp ?
C'est déjà arrivé avec le gouvernement de M. Bayrou. Les socialistes avaient d'abord refusé de censurer, puis ils s'étaient ralliés. Donc je ne doute pas que la séquence budgétaire qui s'ouvre va les convaincre qu'on ne peut pas continuer avec ce gouvernement. Nous, nous avons considéré qu'on ne pouvait pas avaliser le coup de force d'Emmanuel Macron, qu'on ne pouvait pas tolérer qu'un président de la République, à ce point replié sur lui-même et sur son dernier carré de fidèles, impose sa volonté au Parlement et au pays. Et nous avons vu aussi la copie budgétaire qui est proposée. Et compte tenu des délais très courts dans lesquels nous allons en débattre, c'est cette copie qui va être la majeure partie du budget. Or, c'est le budget que nous avons rejeté avec M. Bayrou.
L'un des points qui a poussé les socialistes à ne pas censurer, c'est la suspension de la réforme des retraites. Pour vous, c'est un piège qui a été tendu aux socialistes qui pourraient être obligés de voter un amendement, tout en votant tout ce qui va avec, c'est-à-dire le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui n'est, j'imagine, pas un budget de gauche ?
Ce qui est certain, c'est que ce retardement de la réforme des retraites ne peut pas effacer tout le reste. Les injustices sociales, les injustices fiscales qui demeurent, la cure d'austérité qui va être imposée à nos collectivités locales, au secteur de l'économie sociale et solidaire, à la jeunesse, au sport, à tous les domaines qui font notre vie en société. Et puis en matière de sécurité sociale, à l'hôpital public, à notre santé, à nos protections du quotidien. Donc on ne peut pas avaliser, tolérer ce budget de la sécurité sociale, je pense que les socialistes en feront eux aussi le constat. Pour ce qui est de la réforme des retraites, on est sur un retardement, on n'est pas sur une abrogation comme nous la demandions et donc cette réforme des retraites continuera à s'appliquer en 2027 et elle ne touchera, comme elle n'est pas rétroactive, que quelques dizaines de milliers de personnes. C'est mieux que rien, mais ce n'est presque rien.
"On ne sait pas ce qu'il va advenir de la réforme des retraites"
Vous craignez qu'en fonction de celui ou celle qui gagnera l'élection présidentielle, cette réforme reparte d'où elle est arrêtée aujourd'hui ?
Aujourd'hui, elle crée de l'incertitude pour nos concitoyennes et nos concitoyens parce qu'on ne sait pas ce qu'il va advenir de cette réforme. On ne parle pas d'un petit sujet, le pays s'est mobilisé massivement contre la réforme des retraites. Regardez toutes les enquêtes d'opinion, il suffit d'être dans nos permanences, sur les marchés, auprès des habitantes et des habitants de nos circonscriptions pour constater qu'elle est encore rejetée. Et cette réforme n'a aucune espèce de légitimité démocratique à la base. Quand nous réclamons son abrogation, ce n'est pas simplement pour se faire plaisir, c'est parce qu'on considère que ce serait une justice, une réparation de la violence démocratique qui a été infligée au pays et au mouvement social. On dit souvent pour les entreprises qu'il faut créer de la stabilité, qu'il faut créer de la visibilité. Or aujourd'hui, pour nos compatriotes qui font les calculs, qui se disent "Après 2027 peut-être serais-je impacté", vous allez avoir des mois et des années d'angoisse jusqu'à l'élection présidentielle, ça je ne peux pas le tolérer.
Donc la victoire du jour des socialistes est pour vous une défaite qui s'ignore à l'occasion des débats ?
Oui, je crois qu'à la fin on va aller vers un affrontement au moment du budget qui rendra à nouveau irréconciliables les points de vue au sein de l'Assemblée nationale.
Les socialistes devraient voter un amendement qui entre dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ils seraient alors obligés de voter l'ensemble de ce projet de loi ?
Écoutez, ça les regarde. Posez-leur la question. Je ne suis pas porte-parole du Parti socialiste. Si vous votez la suspension, qu'est-ce que vous ferez ? Moi, je ne voterai pas le budget de la sécurité sociale parce que voter le budget, c'est appartenir à la majorité. Je ne peux pas appartenir à la majorité d'Emmanuel Macron, entendons-nous bien. J'ai été élu pour rompre avec la politique d'Emmanuel Macron parce qu'il y a la question des retraites, mais il y a le cœur de cette politique qui est la politique de l'offre, c'est-à-dire les cadeaux fiscaux aux grandes entreprises, aux ultrariches, la baisse de nos protections sociales, la baisse des protections du quotidien pour les Français et l'affaiblissement de services publics. Je ne vois pas comment je pourrais voter un paquet budgétaire qui continue la politique de M. Bayrou, de M. Barnier, de Mme Borne, de M. Philippe, de M. Attal. Bref de tout ce que les macronistes font depuis 2017. Il y aurait là un reniement de mes convictions, je ne peux pas aller devant les électrices et les électeurs de ma circonscription et dire que j'ai bazardé tous mes engagements.
Alors place au débat à partir de lundi 20 octobre. L'absence de 49.3 a été confirmée par le Premier ministre. Il y a des délais à respecter. Au bout du compte, l'absence de 49.3 ne va pas permettre au gouvernement de faire autrement pour faire passer ce budget ?
Je le crains. Compte tenu des délais constitutionnels qui nous sont impartis, le débat va être très court. Et plus le débat est court, plus c'est la copie initiale qui a de chances d'être quasiment intégralement reconduite à la fin du débat parce qu'on pourra déposer peu d'amendements, qu'on aura peu de temps pour débattre, pour aller au vote et qu'il faudra finir tout ça dans les délais. La fin de l'année ne peut pas être reportée. Sans faire de complotisme excessif, je vois quand même la volonté d'avoir joué la montre avec M. Bayrou puis avec M. Lecornu, une volonté de retarder au maximum. Et donc finalement, le renoncement au 49.3 ne leur coûte pas cher compte tenu de ces délais, compte tenu de tous les instruments qu'ils ont à leur disposition pour contraindre le Parlement.
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